Voyages et Médicaments
Diarrhée du voyageur (mise à jour mai 2019)

La diarrhée du voyageur, souvent d’origine bactérienne en région tropicale, est désagréable mais ne met que rarement la vie en danger.

Prévention
– En faisant attention à ce que l’on mange et à ce que l’on boit et en respectant une hygiène élémentaire des mains, on diminue le risque d’infections.
– Une prophylaxie antibiotique est toujours à déconseiller.
– L’usage préventif de probiotiques n’est pas suffisamment étayé.
– Il est préférable d’arrêter l’utilisation chronique d’IPP lors de voyages en pays tropical.

Traitement
– La priorité est donnée à la compensation de la perte hydrique.
En cas de diarrhée accompagnée de symptômes d’alarme (c.-à-d. (1) selles liquides au moins trois fois sur 24 heures et (2) soit fièvre > 38,5°C, soit une diarrhée mucopurulente soit une diarrhée sanguinolente, soit de fortes crampes abdominales), des antibiotiques peuvent être utilisés en auto-traitement dans certaines circonstances, mais un usage restrictif est recommandé pour éviter l’apparition et la propagation de germes multirésistants. La prescription d’un antibiotique pour l’auto-traitement de la diarrhée du voyageur doit en principe être limitée aux voyageurs qui effectuent un voyage d’au moins 16 jours en Asie ou en Afrique. Font exception à cette règle des 16 jours, les voyageurs du sous-continent indien. Dans certains groupes à risque les voyageurs doivent toujours être munis d’antibiotiques à utiliser en cas d’urgence pendant le voyage (indépendamment de la destination et de la durée du voyage). L’azithromycine (1 g en une seule prise chez l’adulte) est toujours l’antibiotique de premier choix. Si les symptômes ne s’améliorent pas dans les 48 heures, il faut faire appel à une aide médicale. Le lopéramide est contre-indiqué dans ce type de diarrhée.
– Dans la diarrhée incommodante sans symptômes d’alarme, les antibiotiques n’ont pas de place; le lopéramide peut alors être envisagé comme traitement de confort.
– Les preuves de l’utilisation thérapeutique des probiotiques sont insuffisantes.

La diarrhée du voyageur est un problème fréquent et désagréable, mais ne mettant que rarement la vie en danger. Il s’agit le plus souvent (contrairement aux gastro-entérites le plus souvent d’origine virale dans nos régions) d’une infection bactérienne, plus rarement d’une infection virale ou parasitaire.

Prévention

  • En faisant attention à ce qu'ils mangent et à ce qu'ils boivent, les voyageurs peuvent limiter l’ingestion de micro-organismes pathogènes et diminuer le risque de diarrhée sévère. Une hygiène élémentaire des mains diminue également le risque d’infections. Pour plus de détails, nous renvoyons aux “Sources générales”.

  • L’administration préventive de probiotiques n’est pas recommandée, les preuves d’efficacité étant insuffisantes.1

  • Une prophylaxie antibiotique est toujours à déconseiller.

  • L’Institut de Médecine Tropicale (IMT) conseille de limiter l’usage d’IPP, ou de l’éviter si possible, en cas de voyages en région tropicale. Étant donné qu’ils augmentent le pH gastrique, les IPP sont en effet associés à un risque accru d’infections gastro-intestinales [voir aussi les Folia de novembre 2016].

Traitement

Diarrhée accompagnée de symptômes d’alarme (dysentérie aiguë)

Dans la diarrhée accompagnée de symptômes d’alarme (dysenterie aiguë), il s’agit de (1) selles liquides au moins trois fois sur 24 heures et (2), soit de la fièvre > 38,5°C, soit une diarrhée mucopurulente, soit une diarrhée sanguinolente, soit de fortes crampes abdominales.

  • La compensation de la perte hydrique reste prioritaire. Pour les nourrissons et les jeunes enfants, les personnes âgées et les personnes atteintes de maladies chroniques comme le diabète, la prévention de la déshydratation par une solution de réhydratation orale est préférable; pour les autres personnes, tout liquide non infecté est adéquat (par exemple soupe, thé, jus de fruits, éventuellement accompagné de biscuits salés ou de chips).

    Informations dans le Répertoire à propos de la réhydratation:
    – Les solutions de réhydratation orale peuvent être préparées à partir de sachets de poudre disponibles en pharmacie. Ils contiennent un mélange d'hydrates de carbone et de sels, qui doit être ajouté à une quantité déterminée d'eau.
    – En prévention de la déshydratation en cas de diarrhée (nourrissons et jeunes enfants, personnes âgées, personnes atteintes d’une affection chronique comme le diabète), ces solutions de réhydratation orale peuvent être indiquées. Pour la prévention de la déshydratation chez les nourrissons de moins d'un an, 10 ml/kg de solution de réhydratation orale peuvent être administrés par épisode de défécation liquide ; chez les enfants de plus d'un an et chez l'adulte, une telle prévention est généralement inutile et il est conseillé de boire souvent (soupe, thé, ...).
    – Dans le traitement de la déshydratation modérée (perte de 5% du poids corporel en eau), 50 à 75 ml/kg sont administrés par petites quantités régulières sur une période de 4 à 6 heures. Après réhydratation, l'alimentation normale peut être reprise, et tant que la diarrhée persiste, 10 ml/kg peuvent être administrés par épisode de défécation liquide.
    – En cas de déshydratation sévère (perte > 5% du poids corporel en eau), ou en cas d’échec de la réhydratation orale, une réhydratation parentérale peut être nécessaire, ce qui est plus souvent le cas chez les nourrissons.
  • Des antibiotiques peuvent être utilisés en auto-traitement dans certaines circonstances, mais une utilisation restrictive est recommandée car c’est un facteur de risque pour développer le portage et la propagation de germes multirésistants. Si les symptômes ne s’améliorent pas dans les 48 heures, il faut faire appel à une aide médicale (éventuellement plus tôt chez les enfants, les femmes enceintes et les personnes âgées).

    Les recommandations du « Groupe d’étude Scientifique de Médecine du Voyage de Belgique » (en collaboration avec l’Institut de Médecine Tropicale (IMT) et nombre d’autres cliniques de voyage) concernant l’usage des antibiotiques dans l’auto-traitement de la diarrhée du voyageur, ont été modifiées en 2016, dans le but de parvenir à un usage plus restrictif des antibiotiques. L’appel à un usage plus limité des antibiotiques en cas de diarrhée du voyageur s’explique par les preuves de plus en plus nombreuses que l’(auto-)traitement antibiotique de la diarrhée du voyageur constitue un facteur de risque important pour le portage et la propagation de bactéries multirésistantes telles que Extended-Spectrum Beta-Lactamase-Producing Enterobacteriaceae (ESBL-PE) [voir l’étude COMBAT néerlandaise publiée en 20162,3].
    • La prescription d’un antibiotique pour l’auto-traitement de la diarrhée du voyageur doit en principe être limitée aux voyageurs suivants.

      • Les voyageurs qui effectuent un voyage d’au moins 16 jours en Asie ou en Afrique.

      • Les voyageurs du sous-continent indien, même lors de voyages courts.

        Le sous-continent indien est la région en Asie du Sud où se situent l’Inde, le Bangladesh, le Pakistan, le Sri Lanka, ainsi que des parties du Népal, du Bhoutan, du Myanmar et de la Chine.
      • Les voyageurs qui appartiennent aux groupes à risque suivants (indépendamment de la destination et de la durée du voyage):

        • les voyageurs aventureux (longue durée, altitude élevée, dans la jungle);

        • les patients immunodéprimés (p.ex. hémopathies malignes, traitement immunosuppresseur…);

        • les patients présentant une comorbidité (p.ex. diabète, insuffisance rénale, insuffisance cardiaque);

        • les enfants jusqu’à l’âge de 12 ans;

        • les femmes enceintes.

    • L’antibiotique de premier choix est toujours l’azithromycine. La posologie chez l’adulte (y compris chez la femme enceinte, et ce durant toute la période de grossesse, et chez les femmes qui allaitent4-6) est de 1 g en une seule prise; chez l’enfant, la posologie est de 10 mg/kg une fois par jour, pendant 3 jours. L’usage de quinolones en cas d’auto-traitement de la diarrhée du voyageur est donc abandonné.

      • La diarrhée du voyageur n’est pas mentionnée comme indication dans le RCP des spécialités belges à base d’azithromycine.
      • L’abandon des quinolones s’explique entre autres par des données qui suggèrent qu’un usage préalable de quinolones rend les patients plus sensibles aux infections invasives par Salmonella et Campylobacter.
  • Le lopéramide est contre-indiqué en cas de dysenterie aiguë. D’autres médicaments antidiarrhéiques ne sont pas recommandés : leur utilité n’a pas été prouvée et ils sont parfois à l’origine de retards dans l’instauration d’un traitement adéquat.

  • L’usage thérapeutique de probiotiques n’est pas conseillé en raison du manque de preuves quant à leur efficacité.

Diarrhée incommodante sans symptômes d’alarme 

Dans la diarrhée incommodante sans symptômes d’alarme, il s’agit d’une diarrhée aqueuse fréquente sans fièvre notable et sans la présence de sang dans les selles.

  • La principale mesure consiste à compenser la perte hydrique: voir plus haut.

  • Les antibiotiques n’ont pas de place.

  • Comme traitement de confort, le lopéramide peut être envisagé.

    En ce qui concerne le lopéramide, la posologie conseillée par l’IMT est de 2 mg après chaque selle molle, jusqu’à maximum 8 mg par jour chez l’adulte (cette posologie est donc plus faible que celle mentionnée dans les RCP). Le lopéramide peut être utilisé pendant trois jours maximum. Chez les enfants, l’usage du lopéramide doit être très restrictif ; il est contre-indiqué chez les enfants de moins de 2 ans et à déconseiller chez les enfants de moins de 6 ans.
    L’expérience avec le lopéramide en période de grossesse est limitée. Vu sa faible résorption, Briggs4 et Lareb7 considèrent que le risque pour le fœtus est probablement minime. Chez les femmes allaitantes, les quelques données disponibles ne révèlent pas d’effets néfastes chez le nourrisson (Briggs4, Lareb8)
  • L’usage thérapeutique de probiotiques n’est pas conseillé en raison du manque de preuves quant à leur efficacité.1

Note. Dans de rares cas, la diarrhée peut être due à une infection par Entamoeba histolytica (dysentérie amibienne) ou par Giardia lambilia (giardiase). En ce qui concerne la dysenterie amibienne, l’auto-traitement (métronidazole, suivi de paromycine) peut être utile pour les voyageurs aventuriers ou ceux qui font de longs voyages [pour plus de détails, nous renvoyons aux “Sources générales].

Sources générales

Site Web de l’Institut de Médecine Tropicale
– www.medecinedesvoyages.be > Destinées aux experts > Consensus meeting > 2016 (terme de recherche: “diarrhea").
​– www.medecinedesvoyages.be > Maladies et vaccinations > Diarrhée du voyageur > Informations générales (ou cliquer ici).

Sources spécifiques

1 Riddle MS, Connor BA, Beeching NJ, DuPont HL et al. Guidelines for the prevention and treatment of travelers’ diarrhea: a graded expert panel report. Journal of Travel Medicine 2017;24:S63-S80 (doi:10.1093/jtm/tax026)
2 Arcilla MS et al. Import and spread of extended-spectrum β-lactamaseproducing Enterobacteriaceae by international travellers (COMBAT study): a prospective, multicentre cohort study. Lancet Infect Dis 2017;17(1):78-85 (doi: 10.1016/S1473-3099(16)30319-X)
3 International travel and antimicrobial resistance. Drug and Therapeutics Bulletin 2017;55(3):5 (doi: 10.1136/dtb.2017.1.0447).
4 Briggs GG and Freeman RK. A Reference Guide To Fetal and Neonatal Risk: Drugs in Pregnancy and Lactation. 11ème édition (version électronique
5 https://www.lareb.nl/teratologie-nl/zwangerschap/#TOC_Macroliden_en
6 https://www.lareb.nl/teratologie-nl/borstvoeding/#TOC_Macroliden_en1

7 https://www.lareb.nl/teratologie-nl/zwangerschap/#TOC_Antidiarrhoica.
8 https://www.lareb.nl/teratologie-nl/borstvoeding/#TOC_Antidiarrhoica1