Dans les recommandations du Conseil Supérieur de la Santé concernant la vaccination contre la grippe, les femmes enceintes qui en sont au deuxième ou troisième trimestre de grossesse au moment de la saison grippale, sont mentionnées depuis plusieurs années comme étant l’un des groupes-cibles prioritaires de la vaccination contre la grippe[1]. Cette année, la campagne de vaccination contre la grippe de l’Agence flamande Soins et Santé accorde une attention particulière à la vaccination des femmes enceintes[2].

Le présent article apporte quelques éclaircissements à propos des données appuyant  la  vaccination contre la grippe chez les femmes enceintes. Ces éléments peuvent s’avérer utiles lors de la concertation avec la femme enceinte pour décider si l’on procède à la vaccination ou non.

 

La grossesse, un facteur de risque de complications graves liées à la grippe ?

– La plupart des données concernant le risque dû à la grossesse de développer des complications graves liées à la grippe, ont été collectées lors de la pandémie par le virus de l’influenza H1N1 (saison 2009-2010). Une méta-analyse a récemment été publiée à ce sujet[3]. Les études menées lors de cette pandémie révèlent que la grossesse était un facteur de risque d’hospitalisation mais pas de pneumonie, ni de décès ou d’hospitalisation en soins intensifs.

– On ne dispose pas de données suffisantes pour déterminer si la grossesse est un facteur de risque de complications grippales en cas de grippe saisonnière, non pandémique. L’étude à ce sujet qui était incluse dans la méta-analyse[3] n’a pas montré de relation entre la grippe en période de grossesse et le décès.

 

Utilité de la vaccination en période de grossesse

Utilité pour la femme enceinte

Les vaccins antigrippaux actuels confèrent généralement chez l’adulte une protection partielle, mais cet effet est modeste et incomplet. C’est particulièrement le cas durant les saisons où la composition vaccinale n’est pas en parfaite adéquation avec les virus grippaux circulants: voir à ce sujet la discussion dans les Folia de juillet-août 2013. Nous n’avons pas trouvé d’arguments pour supposer que l’effet protecteur de la vaccination chez les femmes enceintes soit différent de celui observé dans la population générale.

 

Utilité pour l’enfant

Un certain nombre d’études – menées aussi bien durant la pandémie par le virus de l’influenza H1N1 que durant les saisons de grippe non pandémique – suggèrent que la vaccination des femmes enceintes  offre une protection contre la prématurité et la mortinatalité, et contre l’infection par le virus influenza chez les enfants durant les six premiers mois de vie. Ces études présentent toutefois certaines limites. Les résultats des études menées dans des pays du tiers-monde (sub)tropicaux sont-ils extrapolables à la situation dans des zones tempérées où la grippe est saisonnière ? Dans les études observationnelles menées dans les pays occidentaux, y a-t-il un healthy user effect qui expliquerait que les effets positifs observés seraient plutôt liés au meilleur état de santé des femmes vaccinées qu’à la vaccination elle-même ?

 

Profil d’innocuité des vaccins contre la grippe

Les études menées chez les femmes enceintes et les longues années d’expérience en ce qui concerne la vaccination de femmes pendant le deuxième ou troisième trimestre de grossesse, ne suggèrent pas de risques pour l’enfant à naître consécutifs à la vaccination. L’expérience avec les vaccins antigrippaux chez les femmes pendant le premier trimestre de grossesse est limitée. D’après l’ouvrage de référence Drugs in Pregnancy and Lactation (Briggs et al., 9e édition, 2011), les vaccins antigrippaux sont considérés comme inoffensifs durant toute la période de grossesse. Chez la mère, les effets indésirables potentiels sont les mêmes que dans la population générale.

 

Conclusion

La vaccination contre la grippe chez les femmes pendant le deuxième ou troisième trimestre de grossesse peut apporter un bénéfice limité pour la santé, mais davantage de données sont nécessaires concernant le bénéfice de la vaccination en termes de morbidité et de mortalité pour la mère et l’enfant. Il est évident que  la présence de facteurs de risque supplémentaires chez une femme enceinte telle qu’une affection  respiratoire ou cardiaque sous-jacente,  augmente l’importance de la vaccination contre la grippe saisonnière. Les vaccins antigrippaux sont considérés comme inoffensifs durant la grossesse; l’expérience en ce qui concerne la vaccination contre la grippe chez les femmes pendant le premier trimestre de grossesse est faible.

 



[1]Avis du Conseil Supérieur de la Santé “Vaccination contre la grippe saisonnière – Saison hivernale 2013-2014”, sur https://tinyurl.com/CSS-9124-vacc-grippe1314

[2]www.griepvaccinatie.be, où sont proposées des informations scientifiques plus détaillées concernant la recommandation chez les femmes enceintes, voir www.zorg-en-gezondheid.be/uploadedFiles/NLsite_v2/Ziekten/Ziekten_A-Z/Griep/griep%202013%20%20-wetenschappelijke%20achtergrond%20vaccineren%20bij%20zwangerschap.pdf

[3]Brit Med J2013;347:f5061 (doi :10.1136/bmj.f5061)