Les indications du topiramate dans le RCP sont le traitement de certaines formes d’épilepsie ainsi que la prophylaxie de la migraine chez les adultes.
Comme discuté dans les Folia d’avril 2023, il existe une association entre l’utilisation du topiramate pendant la grossesse  et les fentes labiales avec ou sans fente palatine. Des données cliniques soutiennent que l’utilisation du topiramate pendant la grossesse augmente la probabilité de faible poids gestationnel.
Des données récentes1 suggèrent aussi un risque de troubles neurodéveloppementaux en cas d’exposition au topiramate pendant la grossesse. Ces données récentes ont incité le comité européen de pharmacovigilance (PRAC) de l’Agence européenne des médicaments (EMA) à mener une réévaluation complète des risques en cas d’exposition au topiramate pendant la grossesse et à formuler des mesures pour tenter de minimiser ces risques.2
 

Principales conclusions

  • Le PRAC2 a conclu que l’incidence des troubles neurodéveloppementaux (troubles du spectre autistique, déficience intellectuelle et trouble du déficit de l’attention/hyperactivité) est potentiellement 2 à 3 fois supérieure chez les enfants de mères épileptiques exposées in utero au topiramate par rapport à des enfants de mères épileptiques qui n’y ont pas été exposées. Le PRAC est arrivé à cette conclusion après analyse de 3 études observationnelles dont 2 montrent une augmentation du risque et 1 ne montre pas d’augmentation.

    • La première étude1 a déjà été discutée dans les Folia d’avril 2023 : il s’agit d’une étude de cohorte dont les données proviennent de plusieurs registres nordiques, avec inclusion de 24 825 enfants exposés in utero à au moins un médicament antiépileptique (65% dans l’indication d’épilepsie) et suivis en moyenne jusqu’à leur 8ème année. Concernant le topiramate, 471 enfants y ont été exposés in utero. Sur ces 471 enfants, un risque augmenté de troubles du spectre autistique et de déficience intellectuelle est retrouvé. Pour la déficience intellectuelle, à l’âge de 8 ans, les incidences cumulées sont de 2,0% chez les enfants exposés au topiramate in utero contre 0,3 % pour la population non exposée. Pour les troubles du spectre autistique, 3,3% des enfants exposés in utero au topiramate sont concernés contre 0,8% dans la population non exposée.
    • La seconde étude3 porte sur des données issues des mêmes registres nordiques, avec inclusion de 38.661 enfants exposés in utero à au moins un antiépileptique. Cette étude concernait exclusivement des mères épileptiques. Pour le topiramate, l’exposition in utero (qui concernait 290 enfants) a été associée à un risque environ deux fois supérieur d’apparition de trouble du déficit de l’attention/hyperactivité (TDAH). Le suivi pour le topiramate a été effectué jusqu’à l’âge de 10 ans.
    • La troisième étude4 était une étude de cohorte américaine (2 469 enfants exposés au topiramate, dont 1 030 enfants de mères épileptiques). L’étude n’a pas montré d’augmentation des troubles neurodéveloppementaux chez les enfants de mères épileptiques, exposées au topiramate, par rapport à des enfants de mères épileptiques qui n’avaient pas été exposées à un antiépileptique. Les enfants ont été suivis jusqu’à l’âge de 8 ans.
  • Le PRAC1 confirme le risque d’anomalies congénitales (notamment fente labio-palatine et hypospadias) et de retard de croissance foetale. Les données montrent un effet dose-dépendant.

    • Les nourrissons exposés au cours du 1er trimestre au topiramate en monothérapie in utero présentent un risque environ 3 fois plus élevé de malformations congénitales graves (notamment fente labio-palatine et hypospadias) par rapport à des nourrissons non exposés in utero à des médicaments antiépileptiques : pour 100 femmes exposées au topiramate pendant la grossesse, on observe entre 4 et 9 cas d’anomalies congénitales, contre 1 à 3 cas pour 100 femmes n’ayant reçu aucun médicament antiepileptique5. Un risque accru n’a été observé qu’avec une dose élevée (> 125 – 600 mg p.j., pas avec une dose faible (25 – 150 mg p.j.).
    • Concernant le risque de déficit de croissance fœtale et de poids gestationnel, pour 100 enfants nés de femmes exposées au topiramate pendant la grossesse, on observe environ 18 cas d’enfants ayant à la naissance un poids et une taille inférieurs à la normale; chez les enfants nés de mères non épileptiques et ne prenant pas d’antiépileptique, ce déficit est observé chez 5 enfants sur 1006.

Mesures de minimisation des risques

Pour éviter l’exposition in utero au topiramate, les mesures de minimisation des risques suivantes s’appliquent désormais2 :

  • Pour la prévention des migraines, le topiramate est contre-indiqué pendant la grossesse et chez les femmes en âge de procréer qui ne prennent pas de contraception efficace.  Cette mesure n’est pas nouvelle mais est encore une fois confirmée.

  • Pour le traitement de l’épilepsie, le topiramate est contre-indiqué pendant la grossesse, sauf s’il n’y a pas d’alternative.

  • Quelle que soit l’indication, le topiramate ne peut être utilisé chez une femme en âge de procréer que si les conditions du programme de prévention de la grossesse sont remplies :

    • effectuer un test de grossesse avant d’initier le traitement ;

    •  informer la patiente concernant les risques pour le fœtus et sur la nécessité d’une contraception efficace (p.ex. un dispositif intra-utérin ou deux méthodes complémentaires, dont une méthode barrière) pendant toute la durée du traitement et jusqu’à 4 semaines après l’arrêt de celui-ci.

    • en cas de contraception hormonale, vu le risque d’interaction (le topiramate est un inducteur enzymatique et accélère la métabolisation des estrogènes et progestagènes), une seconde méthode contraceptive type barrière est recommandée [note de la rédaction du CBIP : dans les Folia de novembre 2021, les mesures suivantes sont proposées pour éviter les interactions : (1) en cas de traitement de courte durée (< 2mois) avec un inducteur enzymatique : poursuivre l’estroprogestatif et utiliser une méthode contraceptive supplémentaire (préservatif) jusqu'à un mois après l'arrêt de l'inducteur enzymatique; (2) en cas de traitement de longue durée (> 2 mois) par un inducteur enzymatique : si possible, passer à un médicament non inducteur enzymatique ; s’il n’est pas possible de remplacer l’inducteur enzymatique : passer à un DIU au cuivre, un DIU au lévonorgestrel ou à la piqûre contraceptive] ;

    • parcourir une fois par an avec la patiente un formulaire concernant les risques pour s’assurer qu’elle demeure bien consciente des risques en cas de grossesse ;

    • en cas de désir de grossesse ou si une femme est enceinte ou suspecte qu’elle est enceinte, un spécialiste doit être consulté. Le traitement par topiramate doit être réévalué et les options thérapeutiques alternatives discutées.

  • Du matériel éducationnel sera mis à disposition des professionnels de la santé et des patients pour les informer sur les risques de l’exposition au topiramate, et sur les mesures qui visent à éviter l’exposition des femmes enceintes au topiramate. Seront disponibles : un guide destiné aux professionnels de santé (avec un formulaire qui peut être utilisé pour parcourir une fois par an les risques), un guide destiné aux patientes et une carte patient [pas encore disponible au 01/01/2024].

  • Un avertissement (pictogramme + texte court) sera ajouté sur l’emballage des médicaments contenant du topiramate, pour alerter sur les risques durant la grossesse.

Noms des spécialités concernées : 

  • Topiramate: Topamax®, Topiramate EG® (voir Répertoire)

     

Sources spécifiques

Bjork M.H., Zoega H. et al. Association of Prenatal Exposure to Antiseizure Medication With Risk of Autism and Intellectual Disability, Jama Neurology, mai 2022;79:672-681.
EMA. Topiramate-referral. via https://www.ema.europa.eu/en/medicines/human/referrals/topiramate, met onder andere “Assessment report” (18/10/2023). Een DHPC werd rondgestuurd naar de zorgverstrekkers : via https://geneesmiddelendatabank.be/menselijk-gebruik > zoekterm: topiramaat > download de DHPC voor elke specialiteit via “DHPC”
3 Dreier JW, Bjørk M, Alvestad S, et al. Prenatal Exposure to Antiseizure Medication and Incidence of Childhood- and Adolescence-Onset Psychiatric Disorders. JAMA Neurol. 2023 Jun 1;80(6):568-577. doi: 10.1001/jamaneurol.2023.0674.
Hernandez-Diaz S, Straub L, Bateman B, et al. Topiramate During Pregnancy and the Risk of Neurodevelopmental Disorders in Children. In: ABSTRACTS of ICPE 2022, the 38th International Conference on Pharmacoepidemiology and Therapeutic Risk Management (ICPE), Copenhagen, Denmark, 26–28 August, 2022. Pharmacoepidemiol Drug Saf, 2022; 31 Suppl 2:3-678, abstract 47
5 Cohen JM, Alvestad S, Cesta CE, et al. Comparative Safety of Antiseizure Medication Monotherapy for Major Malformations. Ann Neurol. 2023; 93(3):551-562.

Hernandez-Diaz S, McElrath TF, Pennell PB et al. Fetal Growth and Premature Delivery in Pregnant Women on Anti-epileptic Drugs. Registre nord-américain des grossesses sous médicaments antiépileptiques. Ann Neurol. 2017 Sept;82 (3):457-465. doi:10.1002/ana.25031. PMI:28856694.