Le nombre de femmes en âge de procréer atteintes de maladies cardio-vasculaires augmente, en partie en raison d’une population croissante d’adultes souffrant de cardiopathies congénitales qui ont aujourd’hui de meilleures chances de survie, et en partie en raison d’une multiplication des facteurs de risque cardio-vasculaire.
Les femmes qui ont un antécédent, des facteurs de risque ou une maladie cardio-vasculaire sont exposées à un risque accru de complications pendant la grossesse, telles que la prééclampsie et la thromboembolie. Il est dès lors très important, lors de la formulation de conseils en matière de contraception, de s’attarder sur les éventuelles contre-indications relatives et absolues de certains contraceptifs dans ce groupe de femmes. Cet article aborde les différentes méthodes de contraception, ainsi que leurs contre-indications cardio-vasculaires, en vue de permettre au médecin de prodiguer des conseils avisés.
Pour choisir une méthode de contraception, il est important d’évaluer soigneusement les facteurs de risque cardio-vasculaire. Le tabagisme, l’obésité et l’hypertension font partie des facteurs de risque susceptibles d’influencer le choix.
Les préparations combinées (estroprogestatives) ont été mises en corrélation avec un risque légèrement accru d’événements cardio-vasculaires, surtout chez les fumeuses et les patientes âgées de plus de 35 ans. Les préparations combinées sont contre-indiquées dans dans certaines maladies cardio-vasculaires. Les monopréparations progestatives et les dispositifs intra-utérins peuvent constituer des options plus sûres, selon les facteurs de risque et les besoins individuels.
En résumé, il est essentiel de tenir compte de la santé cardio-vasculaire d’une femme au moment de choisir sa méthode de contraception.

Maladies cardio-vasculaires et grossesse

Le nombre de femmes en âge de procréer atteintes d’une maladie cardio-vasculaire ou présentant un antécédent de maladie cardio-vasculaire est en augmentation. Aux États-Unis, par exemple, on estime que 11,5 % environ des femmes âgées de 20 à 39 ans souffrent de maladies cardio-vasculaires ou de facteurs de risque cardio-vasculaire (maladie coronarienne, insuffisance cardiaque, AVC et hypertension)1. Il n’y a pas de données disponibles pour l’Europe ou pour la Belgique.

Cette augmentation peut en partie s’expliquer par le nombre croissant d’enfants souffrant de cardiopathies congénitales qui atteignent l’âge adulte, mais en partie aussi, et dans une mesure plus importante, par le nombre croissant de jeunes femmes présentant des facteurs de risque cardio-vasculaire (tels qu’hypertension, diabète, obésité, etc.).
 
Les femmes qui ont un antécédent, des facteurs de risque ou une maladie cardio-vasculaire sont exposées à un risque accru de certaines complications pendant la grossesse, telles que la prééclampsie et la thromboembolie. Qui plus est, elles prennent souvent des traitements chroniques qui peuvent être contre-indiqués pendant la grossesse ou qui peuvent interagir avec certaines formes de contraception. Au vu de ces risques, il est essentiel d’informer ces femmes quant aux méthodes de contraception adéquates afin d’éviter de potentielles complications en cas de grossesse non planifiée et non désirée.
 
Les facteurs de risque cardio-vasculaire, comme le tabagisme et le surpoids, sont importants lors du choix d’une méthode de contraception, car ils peuvent aggraver le risque de complications cardio-vasculaires. D’après l’enquête de santé de 2018, 14,2 % des femmes âgées de 20 à 24 ans fument quotidiennement et 15,9 % des adultes est en situation d’obésité (IMC ≥ 30)2.
 
Pour les femmes qui sont exposées à un risque élevé de complications cardio-vasculaires en cours de grossesse ou qui reçoivent des médicaments tératogènes, il est recommandé d’opter pour une forme de contraception sûre et durable, comme un dispositif intra-utérin (DIU), un implant sous-cutané ou une stérilisation définitive.
 
Dans le présent article, nous abordons les facteurs de risque cardio-vasculaire et leur impact sur le choix d’une méthode de contraception. Nous nous attardons également sur l’innocuité de différentes méthodes de contraception en présence de maladies cardio-vasculaires.

 

La sécurité des différentes formes

Méthodes contraceptives associant estrogènes et progestatif (préparations combinées)

L’utilisation d’estroprogestatifs comme contraception, que ce soit en présentation orale, transdermique ou vaginale, augmente légèrement le risque d’événements cardio-vasculaires tels que les AVC et les crises cardiaques. Ce constat s’applique surtout aux estroprogestatifs à teneur élevée en estrogènes (> 50 mcg), aux fumeuses et aux femmes âgées de plus de 35 ans (cf. Répertoire 6.2.1. Estroprogestatifs à usage contraceptif).
En outre, il existe un risque légèrement accru de thrombose veineuse profonde lors de l’utilisation de préparations combinées contenant certains progestatifs (cf. Folia de décembre 2020). Les préparations monophasiques de deuxième génération semblent présenter le meilleur rapport bénéfice/risque.
Le risque de thrombose veineuse profonde est plus élevé avec les associations contenant un progestatif de troisième génération (désogestrel, gestodène), la drospirénone, la cyprotérone ou le diénogest (cf. Répertoire 6.2. Contraception).
Le traitement hormonal combiné est contre-indiqué chez les personnes atteintes de cardiopathies congénitales compliquées et de certaines pathologies cardiaques acquises. Les femmes qui cumulent plusieurs facteurs de risque cardio-vasculaire sont soumises à une contre-indication relative, et parfois absolue, au traitement hormonal combiné (cf. tableau 1) 3-5. Dans ces cas, il est recommandé d’utiliser une contraception à base de progestatifs seuls ou une contraception non hormonale.

Tableau 1: Contre-indications cardio-vasculaires aux préparations combinées
(maladies cardio-vasculaires et facteurs de risque cardio-vasculaire)

Contre-indication absolue :

Antécédent de thrombose veineuse profonde ou d’embolie pulmonaire, thrombophilie (résistance à la protéine C activée par mutation du facteur V de Leiden, déficit en antithrombine, en protéine S ou en protéine C)

Antécédent d’AVC ischémique, d’infarctus du myocarde ou d’artériopathie périphérique

Facteurs de risque cardio-vasculaire tels que :

  • Tabagisme (> 15 cigarettes par jour) et âge > 35 ans

  • Pression artérielle systolique > 160 mm Hg et pression artérielle diastolique > 105 mm Hg

Diabète avec néphropathie, rétinopathie, neuropathie ou autres affections vasculaires

Valvulopathies et cardiopathies congénitales compliquées (p. ex. par une hypertension artérielle pulmonaire)

Fibrillation auriculaire

Cardiomyopathie avec trouble de la fonction cardiaque

Migraine avec aura

Contre-indication relative

Antécédent familial au 1er degré de TEV, avec ou sans thrombophilie établie

Facteurs de risque cardio-vasculaire tels que :

  • Tabagisme (< 15 cigarettes par jour) et âge > 35 ans

  • Pression artérielle systolique > 140 mm Hg et pression artérielle diastolique > 90 mm Hg

  • IMC supérieur ou égal à 35

Progestatifs en monopréparation

Les progestatifs en monothérapie utilisés comme contraceptifs ne s’accompagnent généralement pas d’un risque accru de thrombose veineuse, et cela s’applique tant aux préparations orales qu’à l’implant sous-cutané. L’injection d’un contraceptif est associée à une potentielle légère augmentation du risque de thromboembolie et n’est dès lors pas conseillée chez les femmes qui sont exposées à un risque très élevé de thromboembolie veineuse, par exemple les femmes qui ont un antécédent de thromboembolie veineuse (cf. Folia de février 2014)6.
Les données de sécurité limitées ne montrent aucune association entre l’usage de progestatifs oraux en monopréparation et la survenue d’événements cardio-vasculaires.
 

Dispositifs intra-utérins

Les dispositifs intra-utérins au cuivre peuvent être associés à des menstruations plus abondantes et plus longues, qui peuvent surtout être notables chez les utilisatrices d’anticoagulants ou d’antiagrégants. Cela peut être une raison d’éviter les dispositifs intra-utérins au cuivre. Dans ces cas, il convient de privilégier les contraceptifs qui réduisent fortement la fréquence des saignements, comme un DIU hormonal, une injection contraceptive ou des progestatifs oraux1.
Les dispositifs intra-utérins au lévonorgestrel provoquent souvent une aménorrhée (absence de menstruations), ce qui peut être bénéfique pour les utilisatrices d’anticoagulants. En outre, les dispositifs intra-utérins au lévonorgestrel ne sont pas associés à un risque accru de thromboembolie veineuse (cf. Folia de février 2014).
Il existe, lors de la mise en place d’un DIU, un faible risque de réaction vasovagale, qui peut être plus sévère chez les patientes atteintes d’affections précharge-dépendantes, comme une hypertension artérielle pulmonaire ou une sténose sévère des valves cardiaques. Cette réaction est le plus souvent de courte durée et peut être atténuée par une analgésie et une information adéquates de la patiente. En général, elle ne constitue pas une contre-indication à la pose d’un DIU1.

 

Conclusion

  • Les femmes qui ont un antécédent cardiovasculaire, qui présentent des facteurs de risque cardiovasculaire ou qui souffrent de maladies cardiovasculaires sont exposées à un risque accru de complications pendant la grossesse. Une attention particulière doit être portée à ce groupe de femmes en matière de contraception afin d’éviter les complications en cas de grossesses non planifiées. Une évaluation minutieuse des facteurs de risque cardio-vasculaire est nécessaire pour choisir une méthode de contraception.

  • Les préparations combinées (estroprogestatives) peuvent être associées à un risque légèrement accru d’événements cardio-vasculaires, surtout chez les fumeuses et les femmes âgées de plus de 35 ans, et elles sont contre-indiquées en présence de certaines maladies cardio-vasculaires. Au sein du groupe des préparations combinées, les préparations monophasiques de deuxième génération présente le meilleur rapport bénéfice/risque en ce qui concerne le risque de thrombose veineuse profonde. Le risque de thrombose veineuse profonde est plus élevé avec les associations contenant un progestatif de troisième génération (désogestrel, gestodène), la drospirénone, la cyprotérone ou le diénogest.

  • Les monopréparations progestatives et les dispositifs intra-utérins peuvent constituer des options plus sûres dans certaines situations, en fonction des facteurs de risque et des besoins individuels.

     

Bronnen/Sources

Contraception in Women With Cardiovascular Disease Kathryn J. Lindley, MD; Stephanie B. Teal, MD, MPH
ENQUÊTE DE SANTÉ PAR EXAMEN BELGE 2018 « Belgian Health Examination Survey » (BELHES) (https://www.sciensano.be/fr/biblio/enquete-de-sante-par-examen-belge-2018)
3 Recommandation du NHG relative à la contraception. Publiée en mai 2020. Dernière mise à jour en avril 2023.
4 Guide de pratique clinique de Domus Medica sur la contraception hormonale. Publié en avril 2012.
5 Faculty of Sexual & Reproductive Healthcare. UK Medical Eligibility Criteria for Contraceptive Use (UKMEC 2016). 2016. https://www.fsrh.org/pdfs/UKMEC2016.pdf

6 Mantha S, Karp R, Raghavan V, Terrin N, Bauer KA, Zwicker JI. Assessing the risk of venous thromboembolic events in women taking progestin-only contraception: a meta-analysis. BMJ. 2012;345:e4944. Published 2012 Aug 7. doi:10.1136/bmj.e4944