En dépit de quelques nouvelles publications, les données probantes issues d’études randomisées pour un objectif tensionnel plus strict dans le traitement antihypertenseur restent insuffisantes
Deux revues Cochrane actualisées à l’automne 2020 confirment l’insuffisance de données probantes issues d’études randomisées pour étayer la plus-value d’un contrôle plus strict de la tension artérielle (valeur cible < 135/85 mmHg, voire moins) par rapport à un contrôle moins strict de la tension artérielle (valeur cible < 140/90 mmHg), et ce tant dans la population générale de patients hypertendus que parmi les patients avec hypertension et maladie cardiovasculaire existante. Les deux revues ont montré des avantages limités sur le plan de la morbidité cardiovasculaire, mais les différences n’étaient pas statistiquement significatives pour tous les critères d’évaluation et il n’y avait pas de gain en termes de mortalité cardiovasculaire et totale.
Deux études publiées dans le courant de l’année 2021 semblent à première vue fournir des données complémentaires pour étayer des cibles tensionnelles plus strictes: une méta-analyse de la Blood Pressure Lowering Treatment Trialists’ Collaboration et STEP, une étude randomisée chinoise. À y regarder de plus près, ce n’est toutefois pas le cas. Ces publications ne sont pas davantage en mesure de fournir des données probantes suffisantes pour étayer des cibles tensionnelles plus strictes.
Pour certains sous-groupes, un contrôle strict de la tension artérielle pourrait représenter un bénéfice, mais des recherches supplémentaires sont nécessaires pour définir les sous-groupes concernés.
Ces dernières années, les grandes directives américaine et européenne pour le traitement de l’hypertension ont encore resserré les valeurs cibles. La directive américaine a même étendu la définition de l’hypertension, abaissant de ce fait les cibles tensionnelles (< 130/80 mmHg)1. La directive européenne a maintenu la définition de l’hypertension de même que, dans un premier temps, la valeur cible de 140/90 mmHg pour le traitement, mais elle indique que, si le traitement est bien toléré, il conviendrait de viser une valeur cible inférieure pour tous les patients (130-139 mmHg de tension systolique, voire moins pour les patients âgés de moins de 65 ans)2. Dans notre discussion des deux directives (voir Folia de mars 2018 et Folia de mars 2019), nous soulignions déjà que l’ensemble des recommandations formulées dans les deux directives, dont ces valeurs cibles, ne sont pas suffisamment étayées par des données probantes. L’abaissement de ces valeurs cibles repose principalement sur l’étude SPRINT (voir Folia de février 2016) ou sur des méta-analyses dont la majorité des patients était fourni par cette étude vivement critiquée.
Deux revues Cochrane
Deux revues Cochrane actualisées à l’automne 2020, qui incluent toutes deux l’étude SPRINT, confirment l’insuffisance de données probantes issues d’études randomisées pour étayer la plus-value d’un contrôle plus strict de la tension artérielle (valeur cible < 135/85 mmHg, voire moins) par rapport à un contrôle moins strict de la tension artérielle (valeur cible < 140/90 mmHg), et ce tant dans la population générale de patients hypertendus que parmi les patients avec hypertension et maladie cardiovasculaire existante3,4.
Population générale de patients hypertendus
La revue portant sur la population générale de patients hypertendus trouve des bénéfices limités, statistiquement significatifs, d’un contrôle strict de la tension artérielle en termes d’incidence d’infarctus aigu du myocarde et d’insuffisance cardiaque congestive (et un bénéfice tout juste non significatif en termes d’AVC). Aucun bénéfice n’est observé sur le plan de la mortalité cardiovasculaire et totale (voir « + plus d’infos »)3. Les résultats de l’étude SPRINT pèsent lourd dans l’analyse de la morbidité cardiovasculaire (infarctus aigu du myocarde, AVC et insuffisance cardiaque congestive) et les auteurs considèrent ces résultats comme des « données probantes de faible certitude » en raison principalement de l’absence de procédure en aveugle. Les résultats de l’analyse de la mortalité cardiovasculaire sont en revanche considérés comme des « données probantes de certitude élevée ».
Les auteurs ont également effectué une analyse de « tous les événements indésirables graves ». Ce groupe reprend tous les événements fatals ou menaçant le pronostic vital, ainsi que tous les événements nécessitant une intervention ou une hospitalisation (ou une prolongation de l’hospitalisation) ou entraînant des limitations durables du fonctionnement; cette notion couvre donc à la fois les événements cardiovasculaires graves et les effets indésirables graves. Cette analyse ne révèle pas de différence entre les deux stratégies (voir « + plus d’infos »). Voilà qui semble indiquer que les éventuels bénéfices d’un contrôle strict de la tension artérielle en termes de morbidité cardiovasculaire sont annulés par une augmentation d’effets indésirables graves (hypotension, syncope, bradycardie, troubles du rythme, hyperkaliémie, angio-œdème et insuffisance rénale aiguë ou chronique).
Patients avec hypertension et maladie cardiovasculaire existante
La revue qui se limitait aux patients atteints d’hypertension et de maladie cardiovasculaire existante (antécédent d’infarctus aigu du myocarde, d’AVC, d’artériopathie périphérique ou d’angor) n’observe pas non plus de bénéfice sur la mortalité cardiovasculaire et totale avec un contrôle strict de la tension artérielle4. En ce qui concerne les événements cardiovasculaires, les auteurs observent un bénéfice limité, mais statistiquement significatif, en faveur d’un contrôle strict de la tension artérielle. En revanche, ils n’observent pas de différence entre les deux stratégies en ce qui concerne les « événements indésirables graves » (décès, survenue d’événements cardiovasculaires ou effets indésirables graves) (voir « + plus d’infos »).
Patients hypertendus (Cochrane Arguedas, N = 11; n = 38 688) |
Patients avec hypertension et maladie cardiovasculaire existante (Cochrane Saiz, N = 6; n = 9 484) |
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Mortalité totale | 4,0% vs 4,2% RR: 0,95 IC95%: 0,86 à 1,05 |
72/1000 vs 68/1000 RR: 1,06 IC95%: 0,91 à 1,23 |
Mortalité cardiovasculaire | aucun risque absolu non rapporté RR: 0,90 IC95%: 0,75 à 1,06 |
32/1000 vs 31/1000 RR: 1,03 IC95%: 0,82 à 1,29 |
Infarctus aigu du myocarde | 2,1% vs 2,5% RR: 0,84 IC95%: 0,73 à 0,96 |
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AVC | 2,2% vs 2,5% RR: 0,88 IC95%: 0,77 à 1,01 |
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Insuffisance cardiaque congestive | 1,9% vs 2,5% RR: 0,75 IC95%: 0,60 à 0,92 |
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Nombre total d’événements cardiovasculaires | - | 113/1000 vs 127/1000 RR: 0,89 IC95%: 0,80 à 1,00 |
Événements indésirables graves | 30,3% vs 29,1% RR: 1,04 IC95%: 0,99 à 1,08 |
255/1000 vs 252/1000 RR: 1,01 IC95%: 0,94 à 1,08 |
Quelques réflexions
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D’une part, les résultats de la revue Cochrane dans la population générale de patients hypertendus concordent avec ceux d’un certain nombre de revues antérieures. D’autre part, ils contrastent avec les résultats de certaines autres revues, ainsi qu’avec les directives susmentionnées1,2. Les auteurs avancent plusieurs explications à cela.
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Les auteurs des revues Cochrane ont choisi d’inclure uniquement des études qui appliquaient, dans les deux groupes, les actuelles valeurs cibles préconisées pour un contrôle tensionnel strict et moins strict, tandis que d’autres revues ont également inclus des études plus anciennes appliquant des cibles aujourd’hui dépassées dans au moins un des deux groupes.
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De plus, certaines autres revues ont effectué leurs analyses sur la base des valeurs tensionnelles effectivement atteintes, et non sur les valeurs tensionnelles cibles, ce qui annulait la randomisation.
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D’autres revues encore ont inclus des études comparant des doses standard d’antihypertenseurs à des doses élevées, qui n’étaient pas ajustées en fonction de valeurs cibles.
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Enfin, un dernier groupe de revues a également recouru à des comparaisons indirectes (méta-analyse en réseau).
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Souvent, les effets négatifs d’un contrôle strict de la tension artérielle n’étaient pas (suffisamment) pris en compte.
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Les auteurs de la revue Cochrane ont par ailleurs exclu quelques études qui n’exprimaient pas les valeurs cibles en tension systolique et/ou diastolique (mais, par exemple, en tension artérielle moyenne sur 24 heures).
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Les patients de la revue Cochrane dans la population générale de patients hypertendus étaient relativement âgés (63 ans en moyenne) et étaient exposés à un risque cardiovasculaire modéré à élevé ; les résultats ne peuvent donc pas être simplement extrapolés à d’autres populations. Les auteurs n’excluent pas qu’un contrôle strict de la tension artérielle puisse représenter un bénéfice pour certains sous-groupes, mais des recherches supplémentaires sont nécessaires pour définir les sous-groupes concernés.
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Selon les résultats de la revue Cochrane portant sur les patients avec hypertension et maladie cardiovasculaire existante, cela ne semble pas être le cas pour ces patients. Néanmoins, aucune des études reprises n’avait exclusivement inclus des patients atteints d’une maladie cardiovasculaire existante, ce qui est une limite: seuls des sous-groupes d’études (beaucoup) plus vastes ont été utilisés dans les analyses. Les auteurs signalent que 3 études de grande envergure sont actuellement en cours dans cette population spécifique. Peut-être celles-ci pourront-elles apporter plus de clarté.
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Le critère d’évaluation « événements indésirables graves » n’était un critère d’évaluation que dans une minorité des études incluses ; pour les autres études, les auteurs de la revue ont fait leurs calculs sur la base des données disponibles (données en rapport avec d’autres critères d’évaluation et effets indésirables), ce qui n’a pas été toujours simple, voire qui a parfois été impossible. Les auteurs admettent qu’il peut s’agir d’une source de biais.
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Les auteurs déplorent le rapportage insuffisant des effets indésirables dans les études incluses, qui a compliqué l’évaluation du rapport bénéfice/risque.
La méta-analyse de la Blood Pressure Lowering Treatment Trialists’ Collaboration (BPLTTC) et l’étude STEP
Deux études, publiées dans le courant de 2021, semblent à première vue fournir des preuves supplémentaires, issues d’études randomisées, pour étayer les objectifs tensionnels plus stricts avancés dans certaines directives. Ce n’est toutefois pas le cas quand on y regarde de plus près.
La méta-analyse de la Blood Pressure Lowering Treatment Trialists’ Collaboration (BPLTTC)
Nous avons d’une part la vaste méta-analyse5 (48 études, 344 716 participants) de la Blood Pressure Lowering Treatment Trialists’ Collaboration (BPLTTC), selon laquelle toute baisse de 5 mmHg de la tension artérielle systolique s’accompagnerait d’une diminution de 10% du nombre d’événements cardiovasculaires, et ce indépendamment des valeurs tensionnelles initiales du patient ou de la présence/absence d’affections cardiovasculaires. Or, la diminution du nombre d’événements cardiovasculaires n’était pas associée à une régression de la mortalité totale. Sur la base de leurs constatations, les auteurs plaident en faveur d’un traitement antihypertenseur pour tous les patients exposés à un risque cardiovasculaire modéré à élevé, y compris si leurs valeurs tensionnelles se situent déjà dans l’intervalle actuellement considéré comme normal.
Cette méta-analyse n’inclut toutefois pas uniquement des études qui comparent un contrôle tensionnel strict à un contrôle tensionnel moins strict (seulement 8 des 48 études incluses). Elle comprend également des études contrôlées contre placebo et des études comparant différents types d’antihypertenseurs entre eux (sans qu’il soit effectivement question de groupes sous traitement plus ou moins intensif). Cette méta-analyse ne doit donc en aucun cas être considérée comme une étude ayant comparé des cibles tensionnelles strictes à des cibles moins strictes. Il n'est pas certain que les résultats de cette méta-analyse puissent être extrapolés à la population générale, surtout en ce qui concerne les personnes dont les valeurs tensionnelles sont jugées normales selon les directives actuelles. Par ailleurs, cette analyse n’a pas accordé la moindre attention aux effets indésirables, ce qui empêche d’évaluer le rapport entre les bénéfices éventuels de cibles tensionnelles plus strictes et les risques qui pourraient y être associés.
344 716 participants. Parmi les études incluses, on retrouve aussi bien des études contrôlées contre placebo que des études comparant un ou plusieurs traitements antihypertenseurs ou des études comparant un traitement antihypertenseur intensif à un traitement antihypertenseur moins intensif. Le critère d’évaluation primaire était composé d’AVC fatal et non fatal, de cardiopathie ischémique fatale et non fatale et d’insuffisance cardiaque menant au décès ou à une hospitalisation.
Après un suivi moyen d’un peu plus de 4 années, le critère d’évaluation primaire était significativement moins fréquent dans le groupe interventionnel que dans le groupe comparateur. Le rapport de risque (Hazard Ratio, HR), normalisé à une différence de tension systolique de 5 mmHg entre les deux groupes, se montait à
0,90 (IC95%: 0,88 à 0,92). Dans les analyses de sous-groupes préplanifiées, ce résultat s’est révélé indépendant des valeurs tensionnelles initiales et de la présence ou de l’absence d’atteinte cardiovasculaire au début de l’étude. Au niveau de la mortalité cardiovasculaire, les auteurs ont noté une différence limitée, mais statistiquement significative, en faveur du groupe interventionnel (HR: 0,95; IC95%: 0,92 à 0,99), mais aucun avantage n’a été constaté sur le plan de la mortalité globale (critères d’évaluation secondaires).
Sur la base de leurs constatations, les auteurs plaident en faveur d’un traitement antihypertenseur pour tous les patients exposés à un risque cardiovasculaire modéré à élevé, y compris si leurs valeurs tensionnelles se situent déjà dans l’intervalle actuellement considéré comme normal.
Quelques observations :
- Cette méta-analyse ne doit en aucun cas être considérée comme une étude ayant comparé des cibles strictes à des cibles moins strictes. Sur les 48 études incluses, 8 seulement ont comparé un traitement intensif à un traitement moins intensif. Trois d’entre elles ont en outre été exclues par les auteurs des revues Cochrane ci-dessus, car les valeurs cibles utilisées dans au moins un des deux groupes ne correspondent pas aux valeurs cibles actuelles.
- Il est étrange que, dans cette méta-analyse, les auteurs analysent d’un seul tenant des études contrôlées contre placebo, des études comparatives et des études comparant des traitements intensifs et moins intensifs. L’attribution des différents groupes des études comparatives entre groupe interventionnel et groupe comparateur est très contestable (le groupe qui obtenait la plus grande baisse tensionnelle était considéré comme le groupe interventionnel, le ou les autres groupes étant considéré(s) comme groupe comparateur; dans certains cas, les différences de tension entre les deux groupes étaient minimes, ce qui donne un aspect assez arbitraire à l’attribution aux différents groupes). Il se peut ainsi qu’un traitement déterminé soit considéré tantôt comme une intervention, tantôt comme un comparateur, en fonction de son objet de comparaison.
- Les auteurs avaient initialement identifié 100 études potentiellement intéressantes, mais ils n’ont pu obtenir de données de patients individuels pour la moitié environ d’entre elles, qui n’ont dès lors pas été intégrées dans l’analyse. Notamment 2 études de relativement grande envergure, portant sur un traitement intensif vs moins intensif, qui ont bel et bien été incluses dans les revues Cochrane ci-dessus.
- Les sujets ayant une tension artérielle systolique inférieure ou égale à 130 mmHg au début de l’étude ne représentent qu’une petite portion de la population et ce groupe comprend proportionnellement plus de patients atteints d’une maladie cardiovasculaire existante. La question de l’extrapolation des résultats de cette étude, et particulièrement ceux des sujets normotendus, à la population générale est sujette à caution.
- Cette méta-analyse n’a ni recueilli ni analysé de données relatives aux effets indésirables. Nous ignorons donc si les avantages observés au niveau des critères cardiovasculaires s’accompagnent d’une augmentation d’effets indésirables et il est impossible, sur la base de cette étude, d’évaluer le rapport entre les avantages et les inconvénients d’un contrôle tensionnel plus strict.
L’étude STEP
D’autre part, nous avons l’étude STEP, une vaste étude (8 511 participants) chinoise publiée à l’automne 2021, qui a trouvé un large écho à l’échelle internationale6. Dans cette étude randomisée auprès de patients âgés hypertendus ou déjà sous traitement antihypertenseur, les investigateurs ont noté significativement moins d’événements cardiovasculaires dans le groupe associé à une cible tensionnelle plus stricte (110-130 mmHg de tension systolique) que dans le groupe associé à une cible tensionnelle moins stricte (130-150 mmHg de tension systolique). Il n’y a pas eu de différence significative entre les deux groupes en ce qui concerne la mortalité cardiovasculaire ou globale. En revanche, une hypotension est survenue significativement plus souvent chez les patients du groupe soumis à une cible tensionnelle plus stricte.
L’étude a été conduite dans une population exclusivement chinoise. La physiopathologie et les facteurs de risque d’hypertension et d’affections cardiovasculaires diffèrent fortement entre la population orientale et la population occidentale, si bien que ces résultats ne peuvent être aisément extrapolés à d’autres populations. Par ailleurs, la limite supérieure des valeurs cibles appliquées dans le groupe sous traitement moins intensif se situait au-delà des valeurs cibles préconisées dans les directives actuelles.
Quelques observations :
- La limite supérieure des valeurs cibles dans le groupe sous traitement moins intensif était de 150 mmHg, ce qui est au-delà à la valeur cible généralement admise, y compris chez les seniors, de 140 mmHg. La question du sous-traitement peut donc se poser pour une partie, au moins, des patients du groupe sous traitement moins intensif.
- L’étude a été conduite dans une population exclusivement chinoise. La physiopathologie et les facteurs de risque d’hypertension et d’affections cardiovasculaires diffèrent fortement entre la population orientale et la population occidentale, si bien que ces résultats ne peuvent être aisément extrapolés à d’autres populations.
- Le NNT sur la durée médiane du suivi de 3,34 ans s’élève à 91. Pour prévenir 1 événement cardiovasculaire, il faudrait donc soumettre 91 patients à un contrôle tensionnel plus strict, moyennant une valeur cible de 110-130 mmHg de tension systolique, pendant 3,34 ans et les exposer aux effets indésirables associés à ce contrôle tensionnel strict.
Conclusion
Si nous voulons évaluer l’efficacité de cibles tensionnelles plus strictes, la méthode la plus correcte serait de se fonder sur des études randomisées qui se penchent effectivement sur une stratégie d’ajustement du traitement sur la base des cibles tensionnelles actuelles. En ce sens, les résultats des revues Cochrane sont plus pertinents pour répondre à cette question que ceux de la méta-analyse de la BPLTTC, qui a aussi inclus des études contrôlées versus placebo et des études comparant différents médicaments antihypertenseurs (sans délimitation claire entre les groupes sous traitement intensif et moins intensif).
Les auteurs des revues Cochrane concluent que, partant des données d’études randomisées, il n’est pas établi que les bénéfices d’un contrôle plus strict de la tension artérielle l’emportent sur les risques qui y sont associés. Avec sa limite supérieure de 150 mmHg de tension artérielle systolique dans le groupe sous traitement moins intensif, l’étude STEP ne satisfait peut-être pas aux critères d’inclusion des revues Cochrane et n’en modifiera donc pas les conclusions.
Le CBIP voit ainsi son point de vue conforté, à savoir que les recommandations formulées dans les récentes directives américaine et européenne sur l’hypertension, en faveur d’un objectif tensionnel plus strict, n’étaient pas suffisamment étayées, et qu’elles ne le sont toujours pas à ce jour. Même une légère diminution des seuils définissant une hypertension, ou des cibles tensionnelles, a un impact très important sur le nombre de patients concernés. Les résultats des études randomisées ne permettent pas de déterminer si un objectif tensionnel plus strict peut représenter une plus-value, ni chez quels patients.
Sources
1 2017 ACC/AHA/AAPA/ABC/ACPM/AGS/APhA/ASH/ASPC/NMA/PCNA Guideline for the Prevention, Detection, Evaluation, and Management of High Blood Pressure in Adults. Via https://www.ahajournals.org/lookup/doi/10.1161/HYP.0000000000000065
2 2018 ESC/ESH Guidelines for the management of arterial hypertension. Via: https://www.escardio.org/Guidelines/Clinical-Practice-Guidelines/Arterial-Hypertension-Management-of. (doi: 10.1093/eurheartj/ehy339)
3 Arguedas JA, Leiva V, Wright JM. Blood pressure targets in adults with hypertension. Cochrane Database Syst Rev. 2020, Issue 12. Art. No.: CD004349. DOI: 10.1002/14651858.CD004349.pub3.
4 Saiz LS, Gorricho J, Garjon J, Celaya MC, Erviti J, Leache L. Blood pressure targets for the treatment of people with hypertension and cardiovascular disease. Cochrane Database Syst Rev. 2020, Issue 9. Art. No.: CD010315. DOI: 10.1002/14651858.CD010315.pub4
5 The Blood Pressure Lowering Treatment Trialists’ Collaboration. Pharmacological blood pressure lowering for primary and secondary prevention of cardiovascular disease across different levels of blood pressure: an individual participant-level data meta-analysis. Lancet. 2021; 397: 1625-36. doi: 10.1016/s0140-6736(21)00590-0
6 Zhang W, Zhang S, Deng Y, Wu S, Ren J et al. Trial of intensive blood-pressure control in older patients with hypertension. New Engl J Med. 2021; 385: 1268-79. doi: 10.1056/NEJMoa2111437