Traitement de fond de l’asthme
Revue de littérature jusque mai 2020.
Adapté le 11 novembre 2020.
Un glossaire est repris en fin de texte.
- Cet article fait le point sur le traitement de fond de l’asthme, et accorde une attention particulière aux modifications importantes apportées dans la recommandation GINA (Global Initiative for Asthma de 2019, mise à jour en 2020).
Points d’attention
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Avant toute majoration de traitement, il faut s’assurer que le patient prend correctement ses médicaments, qu’il utilise adéquatement son dispositif à inhaler et qu’il n’est pas exposé à des facteurs d’aggravation.
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Dans l’asthme, un β2-mimétique à longue durée d’action (long-acting β2-agonist : LABA) ne peut jamais être donné sans CSI.
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Après plusieurs mois de stabilisation, une réduction du traitement (step-down) peut être envisagée.
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Étape 1 : en cas de symptômes occasionnels sans facteurs de risque d’exacerbations, GINA préconise, à partir de l’âge de 12 ans, de donner d’emblée un « CSI + formotérol » à la demande, et déconseille l’utilisation des SABA à la demande (ils restent le 1er choix chez les enfants de moins de 12 ans). Le CBIP estime que les SABA restent le 1er choix quel que soit l’âge et que cette recommandation, trop peu étayée, est prématurée. Aucune étude n’a à l’heure actuelle comparé un « CSI + formotérol » à la demande versus SABA dans ce groupe de patients.
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Étape 2 : en présence de facteurs de risque d’exacerbations, un traitement continu par CSI à faible dose doit être initié (+ SABA à la demande). GINA propose comme option chez l’adulte et l’adolescent à partir de 12 ans un « CSI + formotérol » à la demande uniquement. Cependant, avec une telle association, le contrôle des symptômes est moins bon qu’avec un CSI à faible dose en continu et un SABA à la demande.
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Étape 3 : chez l’adulte et l’adolescent à partir de 12 ans, en cas d’efficacité insuffisante, une association « CSI + LABA » à faible dose en continu est préconisée (+ SABA à la demande). L’alternative est une stratégie « SMART » (Single Maintenance And Rescue Therapy) à faible dose consistant en l’utilisation d’un « CSI + formotérol » à la fois comme traitement en continu et à la demande. La place ici d’un anticholinergique à longue durée d’action (long-acting muscarinic antagonist : LAMA) n’est pas claire. Il pourrait être une option si un LABA est contre-indiqué. Chez l’enfant de moins de 12 ans, le premier choix est un CSI à dose moyenne en continu + un SABA à la demande.
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Étape 4 : à partir de l’âge de 6 ans, en cas d’efficacité insuffisante, on peut proposer une dose moyenne de « CSI + LABA » en continu + un SABA à la demande. Une stratégie SMART à dose faible ou moyenne est une option, sauf pour les enfants de moins de 12 ans. L’avantage d’une trithérapie (CSI + LABA + LAMA) n’est toujours pas clair. Les enfants de moins de 6 ans doivent être référés au spécialiste.
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Étape 5 : un avis spécialisé est conseillé pour envisager des traitements adjuvants : anticorps monoclonaux, désensibilisation, néomacrolides. La balance bénéfice-risque de ces options n’est pas toujours clairement établie.
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Pour la prise en charge des exacerbations, nous renvoyons au chapitre 4.1. du Répertoire.
Diagnostic et évaluation de la sévérité de l’asthme
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L’asthme est une maladie hétérogène, définie par une histoire de symptômes respiratoires variables et réversibles dans le temps tels que wheezing, dyspnée, oppression thoracique et/ou toux. Des exacerbations peuvent survenir, ainsi qu’une limitation du flux respiratoire qui peut devenir permanente.
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Le diagnostic repose sur l’anamnèse et la mesure de la fonction pulmonaire par des épreuves fonctionnelles respiratoires (EFR). Ces mesures sont essentielles à réaliser puisqu’aussi bien le sous que le sur-diagnostic sont fréquents si on ne se base que sur les symptômes1.
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L’asthme chez l’enfant de moins de 5 ans est difficile à diagnostiquer, notamment parce que les EFR ne sont pas réalisables chez de si jeunes enfants. De plus, beaucoup de jeunes enfants présentent des épisodes de wheezing, particulièrement lors d’infections virales des voies respiratoires supérieures (voir Folia février 2017).
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L’évaluation de la sévérité de l’asthme ne peut se faire qu’a posteriori par le niveau de traitement ayant dû être mis en place pour contrôler les symptômes et les exacerbations.
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Des critères symptomatiques et éventuellement la mesure de la fonction pulmonaire permettent d’évaluer si l’asthme est contrôlé.
L’asthme est dit non contrôlé à partir de 3 critères positifs.- Symptômes diurnes plus de 2 fois par semaine
- Médication d’appoint (à la demande) plus de 2 fois par semaine
- Limitation dans les activités quotidiennes
- Toux ou réveil nocturnes dus à l’asthme.
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Il est important d’identifier les facteurs de risque d’exacerbations, même en cas de symptômes occasionnels, afin d’en limiter la survenue et le risque de décès (voir Étape 2).
Traitement de fond par étapes
Introduction
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Cet article aborde le traitement de fond de l’asthme, sur base principalement de GINA (voir rapport complet GINA 2020), complété par une analyse des publications récentes à ce sujet.
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Le traitement de l’asthme léger en particulier a fait l’objet de changements importants dans les recommandations GINA.
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Pour plus d’informations concernant les effets indésirables, interactions, précautions particulières et les critères de remboursement des médicaments de l’asthme, nous renvoyons au Répertoire Commenté des Médicaments, chapitre 4.1. Asthme et BPCO.
Principes généraux
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Le traitement de fond de l’asthme vise à limiter les symptômes, les exacerbations et la détérioration de la fonction pulmonaire tout en minimisant le risque d’effets indésirables.
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La base du traitement reste l’approche non médicamenteuse : arrêt du tabagisme (y compris passif), maintenir un poids sain, pratiquer une activité physique, éviter les facteurs déclenchants.
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Une approche médicamenteuse par étapes est conseillée. Cependant, il est nécessaire de prendre aussi en compte le mode de présentation initial de l’asthme (s’il est d’emblée sévère par exemple) et les préférences du patient afin d’obtenir une observance thérapeutique optimale.
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En cas de mauvais contrôle des symptômes, ou d’exacerbations, et avant tout passage à une étape supérieure, il est important de s’assurer que le patient suit correctement son traitement, qu’il n’est pas exposé à des éléments déclencheurs (tabac, allergènes…), et qu’il utilise correctement ses médicaments à inhaler (voir aussi films d’instruction de la Société Belge de Pneumologie). L’éducation du patient à l’utilisation de son traitement à inhaler peut aussi être dispensée par le pharmacien, sans nécessité de prescription médicale. Cet accompagnement est gratuit pour le patient, et le pharmacien reçoit une rémunération ( "l’entretien d’accompagnement de bon usage des médicaments", BUM, voir site INAMI).
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Chez les jeunes enfants et les personnes âgées, l’usage d’un aérosol-doseur + chambre d’expansion (+ masque jusque l’âge de 3 ans) est fortement conseillé et est nettement préférable à la nébulisation (voir Folia février 2017).
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Lors d’une adaptation de traitement, une amélioration est en général rapidement constatée, mais il est conseillé d’attendre 2-3 mois pour évaluer l’efficacité de la stratégie.
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En cas d’asthme bien contrôlé pendant 3 mois, et si la fonction pulmonaire est stable, un step-down peut être envisagé (retour à l’étape antérieure). Les CSI restent la base du traitement et doivent être maintenus, à la plus petite dose efficace.
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Dans l’asthme, un LABA ne peut jamais être donné sans CSI.
Étape 1 : symptômes moins de 2 fois par mois sans facteur de risque d’exacerbation
Pour les patients à partir de 12 ans présentant des symptômes moins de 2 fois par mois sans facteurs de risque d’exacerbations, GINA déconseille maintenant un SABA à la demande et propose de donner d’emblée une faible dose de « CSI + formotérol » à la demande.
Le CBIP estime que cette recommandation est prématurée, aucune étude n’ayant à l’heure actuelle évalué un « CSI + formotérol » à la demande versus SABA à la demande dans ce groupe de patients. Il semble raisonnable de garder pour l’instant la prise de SABA à la demande comme 1er choix pour les patients à l’étape 1, quel que soit l’âge.
Pour les enfants de moins de 12 ans, un SABA à la demande reste la base du traitement.
Adultes et adolescents à partir de 12 ans
GINA
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Les patients présentant des symptômes moins de 2 fois par mois, sans facteurs de risque d’exacerbations, peuvent recevoir uniquement un traitement à la demande.
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La recommandation GINA 2019 a bouleversé les bases du traitement de l’asthme léger, établi depuis des décennies, en déconseillant maintenant les SABA à la demande chez l’adulte et l’enfant à partir de 12 ans. Son premier choix est une faible de dose de « CSI + formotérol » à la demande. Le formotérol est le seul LABA qui peut être utilisé à la demande : son délai d’action est de 1 à 3 minutes, contre 10 à 20 minutes pour les autres LABA ayant l’asthme comme indication.
- Parmi les patients avec un asthme léger, environ un tiers présentera une exacerbation sévère, dont certaines mettant en jeu leur pronostic vital. Il est important de prévenir autant que possible ce risque. Le National Institute of Clinical Excellence (NICE) affirme quant à lui que le risque absolu d’exacerbations sévères est faible chez les patient présentant un asthme léger qui utilisent uniquement un traitement par SABA à la demande2.
- Des études chez des patients présentant un asthme léger à risque d’exacerbations (voir étape 2) montrent que la prise d’un « CSI + formotérol » à la demande est plus efficace que la prise d’un SABA à la demande pour prévenir les exacerbations.
- Les patients utilisant très fréquemment leur SABA (>1,5 dispositif/mois, c’est-à-dire > 300 doses/mois) sont plus à risque de décès lié à l’asthme.
- Le fait d’introduire dès le départ un CSI dans le traitement, ne fût-ce qu’à la demande, simplifierait le message pour le patient en affirmant dès le départ que les CSI sont la base du traitement. L’accent serait ainsi mis aussi sur la prévention des exacerbations, et pas uniquement le contrôle des symptômes.
Commentaire du CBIP
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Il existe des patients sans facteurs de risque d’exacerbations qui peuvent être suffisamment contrôlés à long terme avec uniquement un SABA à la demande. Il ne semble pas justifié d’exposer ces patients au risque d’effets indésirables des CSI.
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De plus, il n’existe pas d’études comparant les deux stratégies de traitement (« CSI + formotérol » versus SABA) pour les patients à l’étape 1. Pour appuyer sa proposition, GINA se base sur des études réalisées chez des patients correspondant à l’étape 2 de traitement où un CSI en continu est indiqué. Des études comparant l’efficacité et la sécurité de ces 2 propositions de traitement sont nécessaires.
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Le coût de ces associations « CSI + formotérol » est plus élevé que celui d’un SABA.
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La British Thoracic Association (BTS), le National Institute for Clinical Excellence anglais (NICE) et La Revue Prescrire dans leurs recommandations de 2019 et 2020 pour l’asthme, gardent également les SABA en étape 1 comme traitement à la demande2-4.
Enfants de moins de 12 ans
Chez les enfants de moins de 12 ans, un SABA à la demande reste la base du traitement.
Étape 2: symptômes moins de 2 fois par mois avec facteurs de risque d’exacerbations
Pour les patients à partir de 12 ans présentant des symptômes moins de deux fois par mois avec des facteurs de risque d’exacerbations, un CSI doit être initié. GINA propose 2 options de traitement : un CSI à faible dose en continu + un SABA à la demande, ou une faible dose de « CSI + formotérol » à la demande.
Pour les enfants de moins de 12 ans, le traitement de choix reste un CSI à faible dose en continu + un SABA à la demande.
Le CBIP estime que le premier choix de traitement à l’étape 2, quel que soit l’âge, reste un CSI à faible dose en continu + un SABA à la demande. Dans les études, le contrôle des symptômes avec un CSI en continu + un SABA à la demande est meilleur. Les données concernant les « CSI + formotérol » à la demande, bien qu’intéressantes sur le risque d’exacerbations, doivent être confirmées.
Adultes et adolescents à partir de 12 ans
GINA
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Les patients éligibles pour l’étape 2 sont des patients avec un asthme léger, mais à risque d’exacerbations.
- Asthme mal contrôlé
- Y compris chez les patients peu symptomatiques :
- Utilisation fréquente de SABA
- Prise inadéquate de CSI : non prescrit, non pris ou technique d’inhalation non correcte
- VEMS < 60% de la valeur prédite
- Réversibilité élevée sous bronchodilatateurs
- Problèmes psycho-sociaux
- Exposition au tabac, allergènes
- Comorbidités : obésité, rhinite chronique, allergie alimentaire, reflux gastro-oesophagien
- Éosinophilie sanguine ou dans les expectorations, FENO (fractional exhaled nitric oxide) élevé
- Grossesse
- ≥ 1 exacerbation sévère dans les 12 mois.
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GINA rappelle que les CSI devraient être la base du traitement pour ces patients. Cependant, dans la pratique, on constate une mauvaise observance du traitement continu par CSI chez les patients avec des symptômes peu fréquents, ce qui augmente leur risque d’exacerbation. L’observance du traitement continu par CSI pour ces patients est estimée à 25-35%5.
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Pour les adultes et adolescents à partir de 12 ans, GINA propose comme premier choix une faible dose de
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CSI en continu + un SABA à la demande ou
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un « CSI + formotérol » à la demande.
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Cette recommandation est basée sur plusieurs études parues en 2018 et 2019.
- pour prévenir les exacerbations : est plus efficace qu’un SABA à la demande et aussi efficace qu’un CSI en continu ;
- pour le contrôle des symptômes : est moins efficace qu’un CSI en continu;
- permet de diminuer fortement la dose totale de CSI administrée (réduction de 75 à 83% suivant les études)6-9.
- Une étude parue en septembre 2019 (PRACTICAL), réalisée en open-label, a montré que la prise de « CSI + formotérol » à la demande chez des patients auparavant majoritairement (70%) traités par CSI en continu est plus efficace que la prise de CSI en continu + SABA à la demande pour réduire le risque d’exacerbations sévères nécessitant au moins 3 jours de corticostéroïdes oraux (CSO) (réduction du risque de 30%). Le fait que, dans cette étude, le traitement par « CSI + formotérol » à la demande soit plus efficace illustre probablement la mauvaise observance du traitement par CSI en continu dans la pratique réelle. Dans cette étude-ci, l’observance thérapeutique est estimée à 76%12-13.
Commentaire du CBIP
Le CBIP estime que le premier choix de traitement à l’étape 2 reste pour l’instant un CSI à faible dose en continu et un SABA à la demande. La prise de « CSI + formotérol » à la demande est une option.
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L’observance du traitement pour la prévention des exacerbations est un problème important. Il est effectivement essentiel que les patients à risque d’exacerbations soient traités par CSI. C’est une tâche essentielle pour les médecins et les pharmaciens.
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Les données disponibles chez des patients présentant un asthme léger à risque d’exacerbations sont ambivalentes. Elles montrent que la prise d’un « CSI + formotérol » à la demande est aussi efficace que la prise de CSI en continu sur le risque d’exacerbations (et plus efficace selon une étude), mais moins efficace sur le contrôle des symptômes.
De plus, nous ne connaissons pas, à l’heure actuelle, l’impact d’une administration moindre de CSI. On peut espérer limiter ainsi leurs effets indésirables, mais avec le risque de perdre une partie du bénéfice de la prise en continu qui a pour but de contrôler l’inflammation et l’évolution de l’asthme, et limiter le risque de décès.
Enfants de moins de 12 ans
Pour les enfants de moins de 12 ans, le traitement de choix reste un CSI à faible dose en continu + un SABA à la demande.
Antagonistes des récepteurs des leukotriènes
Les antagonistes des récepteurs des leucotriènes (LTRA) ne sont pas un premier choix dans le traitement de l’asthme : en monothérapie, les CSI sont supérieurs. Ils peuvent être une alternative en cas d’effets indésirables des CSI14.
Étape 3: contrôle insuffisant sous faible dose de CSI en continu ou faible dose d’un « CSI + formotérol » à la demande
Pour les patients à partir de 12 ans insuffisamment contrôlés avec une faible dose de CSI en continu ou une faible dose d’un « CSI + formotérol » à la demande, GINA propose soit une faible dose de « CSI + LABA » en continu et un SABA à la demande, soit une stratégie SMART : un « CSI + formotérol » à faible dose, à la fois comme traitement continu et à la demande. Le CBIP estime que les deux stratégies peuvent être proposées. La stratégie SMART semble apporter une légère plus-value sur le risque d’exacerbations.
Chez les enfants de 6 à 11 ans, GINA propose soit un CSI à dose moyenne en continu, soit un « CSI + LABA » en continu. Le traitement à la demande reste un SABA. Le CBIP estime que, pour l’instant, le 1er choix reste une dose moyenne de CSI en continu. La place des LABA chez l’enfant n’est pas établie. En ajout à un CSI, ils ne semblent pas apporter de plus-value par rapport au CSI seul.
Chez l’enfant de moins de 6 ans, la dose de CSI en continu peut être doublée (avec un SABA à la demande), mais un avis spécialisé est conseillé.
Pour certains patients, une désensibilisation peut être envisagée (voir traitements adjuvants en fin d’article).
Adultes et adolescents à partir de 12 ans
GINA
Chez l’adulte et l’adolescent à partir de 12 ans, GINA propose
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Une faible dose d’un « CSI + LABA » en continu et un SABA à la demande
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Ou une stratégie SMART (ou MART) qui consiste en la prise d’un « CSI + formotérol » à la fois comme traitement continu et à la demande à faible dose.
Commentaire du CBIP
Les deux stratégies de traitement proposées par GINA sont efficaces. Il semble, selon des données de haute qualité, qu’une stratégie SMART apporte une légère plus-value par rapport à l’utilisation d’un « CSI + LABA » en continu (et un SABA à la demande) pour la prévention des exacerbations. Il n’y a pas de données sur le contrôle des symptômes.
- La stratégie SMART a été étudiée pour la prévention des exacerbations chez des patients présentant un asthme modéré à sévère sous traitement continu. Le LABA utilisé dans les études est quasi exclusivement le formotérol.
- Une méta-analyse publiée dans le JAMA en 2018 a évalué cette approche thérapeutique chez des adultes avec un asthme persistant et a montré que l’approche SMART permet de légèrement diminuer les exacerbations comparée à un « CSI + LABA » en continu + un SABA à la demande. La méthode SMART est aussi plus efficace qu’un CSI seul en continu à haute dose + SABA à la demande. Selon les auteurs, ces preuves sont de haute qualité15-18.
Place du tiotropium
En cas de contre-indications aux LABA, GINA propose de donner une dose moyenne de CSI plutôt que d’ajouter du tiotropium.
Commentaire du CBIP
Le tiotropium semble aussi efficace que le doublement de la dose de CSI ou qu’un LABA pour prévenir les exacerbations. Il pourrait être une option chez les patients qui ne peuvent pas prendre de LABA19-21.
Enfants de 6 à 11 ans
GINA
Chez l’enfant entre 6 et 11 ans, deux stratégies sont proposées en traitement continu avec un SABA à la demande
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une dose moyenne de CSI
-
ou une faible dose de « CSI + LABA »
Commentaire du CBIP
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En attendant plus d’études, le premier choix de traitement chez l’enfant de 6-11 ans est, selon le CBIP, toujours une dose moyenne de CSI en continu. La place des LABA dans cette tranche d’âge n’est pas claire. En ajout aux CSI, ils n’apportent pas de plus-value par rapport aux CSI seuls. L’ajout d’un LABA à une faible dose de CSI pourrait éventuellement constituer une alternative à l’augmentation de dose de CSI chez les patients présentant des effets indésirables sous CSI.
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Pour l’instant, l’efficacité d’une stratégie SMART chez l’enfant n’est pas établie.
- L’ajout d’un LABA à un CSI comme traitement de fond n’apporte pas de plus-value par rapport au CSI seul à la même dose ou à une dose plus élevée pour la prévention des exacerbations nécessitant le recours à un CSO22.
- Une méta-analyse de 2018 a évalué l’efficacité d’une stratégie SMART chez 341 enfants de 4 à 11 ans et montre un bénéfice sur la prévention des exacerbations sévères. Ces résultats sont à prendre avec précaution : selon les auteurs de la méta-analyse, ces preuves sont de faible qualité15.
Enfants de moins de 6 ans
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Chez l’enfant de moins de 6 ans, il est conseillé de doubler la dose du CSI en continu avec un SABA à la demande.
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Un avis spécialisé est conseillé.
Étape 4 : contrôle insuffisant sous « CSI + LABA » en continu à faible dose ou sous SMART à faible dose (ou, chez l’enfant, sous une dose moyenne de CSI en continu).
Pour les patients à partir de l’âge de 12 ans insuffisamment contrôlés à l’étape 3, GINA propose de donner (1) une dose moyenne de « CSI + LABA » en continu + un SABA à la demande (2) ou une stratégie SMART à dose faible ou moyenne (3) ou l’ajout de tiotropium à une faible dose de « CSI + LABA » (trithérapie).
Le CBIP estime que les données concernant les LAMA en trithérapie ne sont toujours pas claires. Certaines études montrent un petit avantage sur les exacerbations par rapport à une faible dose de « CSI + LABA », d’autres pas.
Entre 6 et 12 ans, les mêmes options sont préconisées, sauf la stratégie SMART.
Pour certains patients, une désensibilisation peut être envisagée (voir traitements adjuvants en fin d’article).
Adultes et adolescents à partir de 12 ans
GINA
GINA propose
- une stratégie SMART à dose faible ou moyenne (voir détails étape 3).
- ou une dose moyenne de « CSI + LABA » en continu et un SABA à la demande
- ou une trithérapie (voir « Place des LAMA » plus bas).
Commentaire du CBIP
Avant d’augmenter la dose du CSI, il est important de réévaluer si le patient prend correctement son traitement. Il a été constaté que 80-90% du bénéfice thérapeutique maximal pouvant être obtenu, quelle que soit la gravité de l’asthme, est atteint avec des doses faibles de CSI (200-250 µg de fluticasone propionate ou équivalent, voir aussi Tableau 1. Doses corticostéroïdes inhalés (GINA 2020)23.
Enfants de 6 à 11 ans
GINA propose
-
une dose moyenne de « CSI + LABA » en traitement continu et un SABA à la demande
-
ou une trithérapie (voir « Place des LAMA » plus bas).
Place des LAMA
GINA
GINA propose le tiotropium comme option de traitement, en ajout à une dose faible de CSI + LABA (trithérapie), chez l’adulte et l’enfant à partir de 6 ans.
Commentaire du CBIP
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Les données concernant l’efficacité d’une trithérapie CSI + LABA + LAMA comparée au traitement par CSI + LABA restent peu concluantes, certaines études montrant un petit avantage sur les exacerbations et la fonction pulmonaire, d’autres pas. Aucun effet positif n’a été démontré sur la qualité de vie19-24.
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Deux études parues en 2019 ont comparé l’efficacité sur les exacerbations d’une trithérapie par rapport à une faible dose de CSI + LABA (étude TRIMARAN), et par rapport à une dose moyenne de CSI + LABA (étude TRIGGER). La trithérapie a été plus efficace qu’une bithérapie avec une faible dose de CSI, mais la pertinence clinique de cet avantage est douteuse. La trithérapie ne s’est pas avérée plus efficace que la bithérapie à dose moyenne de CSI. Nous ne disposons pas de données pertinentes sur d’autres critères cliniques tels que les symptômes ou la qualité de vie.
- Les études TRIMARAN et TRIGGER ont évalué l’efficacité d’une trithérapie (béclométhasone + formotérol + glycopyrronium) chez des adultes non contrôlés sous CSI + LABA, ayant présenté au moins une exacerbation dans l’année écoulée. Les durées d’étude étaient de 52 semaines, et les critères primaires identiques : la fonction pulmonaire (VEMS) et le nombre d’exacerbations modérées à sévères. Dans les deux études, les doses de CSI et de formotérol dans la trithérapie étaient identiques aux doses de la bithérapie.
- Dans l’étude TRIMARAN, la trithérapie a été comparée à la prise quotidienne d’une faible dose de CSI (béclométhasone 100 µg) et de formotérol (= étape 3).
- Dans l’étude TRIGGER, la trithérapie a été comparée à la prise quotidienne d’une dose moyenne de CSI (200 µg de béclométhasone) et de formotérol (= étape 4).
- Les résultats sur le nombre d’exacerbations n’ont été statistiquement significatifs en faveur de la trithérapie CSI + LABA + LAMA que dans l’étude TRIMARAN, où les doses de CSI utilisées étaient les plus faibles : taux annuel d’exacerbations modérée à sévère sous trithérapie vs bithérapie : 1,83 vs 2,1625.
Etape 5: contrôle insuffisant sous CSI à dose moyenne + LABA
En cas de contrôle insuffisant sous dose moyenne de « CSI + LABA », il est conseillé de référer au spécialiste. Des doses élevées de « CSI + LABA » pourraient être proposées. La balance bénéfice-risque d’autres traitements adjuvants (anticorps monoclonaux, désensibilisation, néomacrolides) n’est pas toujours claire. GINA note que le risque de réaction anaphylactique et de décès avec la désensibilisation peut survenir quelle que soit la sévérité de l'asthme ; l’utilisation dans les formes sévères de l’asthme est controversée.
Adultes, adolescents et enfants à partir de 6 ans
-
Si, malgré une bonne observance du traitement proposé à l’étape 4, le patient présente toujours des symptômes et des exacerbations, une dose élevée de « CSI + LABA » peut être proposée.
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Il est conseillé de demander l’avis du spécialiste pour envisager un traitement adjuvant : anticorps monoclonaux, désensibilisation, néomacrolides.
- L’omalizumab est un anticorps monoclonal anti Ig-E ayant pour indication l’asthme avec hypersensibilité Ig-E avérée. Les benralizumab, mépolizumab et reslizumab sont des anti-interleukines-5 ayant pour indication l’asthme à éosinophiles. Le dupilumab est dirigé contre l’interleukine-4.
- Chez des adultes et des enfants à partir de 12 ans (6 ans pour l’omalizumab) présentant de l’asthme modéré à sévère, des études versus placebo ont montré un léger avantage de ces molécules sur certains critères cliniques: réduction des exacerbations et diminution des CSI et CSO, hospitalisations, symptômes de l’asthme, qualité de vie26,27.
- Les anticorps monoclonaux n’ont pas été comparés à une corticothérapie orale, ni entre eux, ce qui ne nous permet pas de les positionner clairement dans l’asthme sévère.
- Selon GINA, la désensibilisation par voie sublinguale (SLIT) peut être envisagée chez les adultes avec allergie aux acariens, rhinite allergique et exacerbations malgré un traitement par CSI, mais l’effet est peu important.
- La désensibilisation par voie sous-cutanée (SCIT) ou sublinguale n’est pas plus efficace que l’utilisation de CSI, mais peut permettre de diminuer leur utilisation.
- Les deux voies d’administration exposent à un risque de réaction anaphylactique (surtout documenté pour la voie sous-cutanée). L’inconvénient supplémentaire pour la voie sublinguale est que la prise se fait hors surveillance médicale28, 29.
- Les preuves actuelles sont insuffisantes pour conseiller les néomacrolides en prévention des exacerbations30, 31.
- Une Cochrane Review de 2015 n’a pas montré d’effet positif des néomacrolides en prévention des exacerbartions32.
- Une seule étude de 2017 montre un effet positif de l’ajout d’une faible dose d’azithromycine au traitement chronique (CSI + LABA) en prévention des exacerbations33.
- Les néomacrolides exposent au risque de résistance bactérienne et présentent des effets indésirables.
Conclusion
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La recommandation GINA 2019 a remis en question la base du traitement de l’asthme léger, en déconseillant les SABA à la demande et en proposant d’emblée un « CSI + formotérol » à la demande.
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Il existe cependant des patients sans facteurs de risque d’exacerbations (étape 1) qui peuvent être suffisamment contrôlés avec uniquement un SABA à la demande. Aucune étude évaluant l’efficacité de cette nouvelle stratégie n’a encore été réalisée pour ces patients.
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En cas de facteur de risque d’exacerbations (étape 2), un CSI est essentiel. La prise en continu permet de diminuer ce risque, et assure un meilleur contrôle des symptômes qu’une prise à la demande. Il serait utile que la stratégie proposée par GINA (« CSI + formotérol » à la demande) fasse l’objet de plus d’évaluations sur le contrôle des symptômes et la qualité de vie.
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La stratégie SMART à partir de l’étape 3 semble intéressante et permettrait de diminuer le risque d’exacerbations. Ceci est à confirmer surtout concernant les autres critères d’évaluation clinique (symptômes et qualité de vie).
-
Les autres traitements (LTRA, tiotropium, anticorps monoclonaux, désensibilisation, néomacrolides) ont fait l’objet de moins d’études et ne sont pas des premiers choix. La balance bénéfice-risque de certains de ces traitements n’est pas claire.
Tableau 1. Doses corticostéroïdes inhalés (GINA 2020)
ICS |
Dose journalière (µg) |
||
|
Faible |
Moyenne |
Elevée |
Adultes et enfants ≥ 12 ans |
|||
Béclométhasone dipropionate |
100-200 |
>200-400 |
>400 |
Budésonide |
200-400 |
>400-800 |
>800 |
Fluticasone propionate |
100-250 |
>250-500 |
>500 |
Enfants de 6 à 11 ans |
|||
Béclométhasone dipropionate |
50-100 |
>100-200 |
>200 |
Budésonide |
100-200 |
>200-400 |
>400 |
Fluticasone propionate |
50-100 |
>100-200 |
>200 |
Enfants jusque 5 ans |
|||
Béclométhasone dipropionate aérosol doseur |
50 ≥ 5 jaar |
/ |
/ |
Budésonide en nébulisation |
500 ≥ 1 jaar |
/ |
/ |
Fluticasone propionate aérosol doseur |
50 ≥ 4 jaar |
/ |
/ |
Fluticasone propionate poudre à inhaler |
Pas suffisamment étudié |
Liste des abréviations utilisées/glossaire
CSI : corticostéroïdes inhalés
CSO : corticostéroïdes oraux
EFR : épreuves fonctionnelles respiratoires
LABA : β2-mimétique à longue durée d’action ou long-acting β2-agonist
LAMA : anticholinergique à longue durée d’action ou long-acting muscarinic antagonist
LTRA : antagoniste des récepteurs des leucotriènes
SABA : β2-mimétique à courte durée d’action ou short-acting β2-agonist
SAMA : anticholinergique à courte durée d’action ou short-acting muscarinic antagonist
SCIT : désensibilisation par voie sous-cutanée ou subcutaneaous immunotherapy
SLIT : désensibilisation par voie sub-linguale ou sublingual immunotherapy
SMART : single maintenance and rescue therapy
VEMS (volume expiratoire maximal par seconde) ou FEV₁ (forced expiratory volume in 1 second) : quantité d’air qui peut être expirée avec force en une seconde après une inspiration maximale.
Sources générales
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GINA 2019 Global Strategy for Asthma Management and Prevention https://ginasthma.org/2018-gina-report-global-strategy-for-asthma-management-and-prevention/
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GINA 2020 https://ginasthma.org/wp-content/uploads/2020/04/GINA-2020-full-report_-final-_wms.pdf
Sources spécifiques
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