Dans cet article, nous discutons de l’avis révisé du Conseil Supérieur de la Santé (CSS) sur la vaccination antipneumococcique des adultes. Nous indiquons le schéma vaccinal pour chaque groupe cible. Dans le Commentaire du CBIP, nous déterminons la place de la vaccination antipneumococcique chez l’adulte.

Le Conseil Supérieur de la Santé a révisé son avis sur la vaccination antipneumococcique des adultes: Avis 9562 (juillet 2020).1 Dans ce qui suit, nous abordons les points suivants.

Pour la vaccination antipneumococcique des adultes, deux types de vaccins sont disponibles: un vaccin polysaccharidique non conjugué à 23 valences (avec polysaccharides de 23 sérotypes pneumococciques): PPV23; Pneumovax 23®) et un vaccin polysaccharidique conjugué à 13 valences (avec polysaccharides de 13 sérotypes pneumococciques, conjugués à une protéine porteuse: PCV13; Prevenar 13®).
 

Les principaux changements apportés à l’avis du CSS

  • Le diabète et les maladies neuromusculaires avec risque de pneumopathie par fausse déglutition (N.D.L.R. : SLA ou maladie de Parkinson p.ex.) sont ajoutés à la liste des maladies chroniques qui constituent une indication pour la vaccination antipneumococcique.

    Voici les groupes cibles actuels pour la vaccination antipneumococcique chez l’adulte:

    • adultes présentant un risque accru d’infection pneumococcique à évolution grave (16-85 ans):
      • patients immunodéprimés (voir Avis CSS 9158 (2019)),
      • patients présentant une asplénie anatomique ou fonctionnelle,
      • patients présentant une drépanocytose ou une hémoglobinopathie,
      • patients présentant une fuite du liquide céphalo-rachidien, ou porteurs d’un implant cochléaire;
    • adultes présentant un risque moins accru que le groupe précité:
      • adultes présentant une comorbidité (50-85 ans):
        • affection chronique cardiaque, pulmonaire, hépatique ou rénale,
        • maladies neuromusculaires chroniques avec risque de pneumopathie par fausse déglutition (N.D.L.R. : SLA ou maladie de Parkinson p.ex.) (nouveau),
        • diabète (nouveau),
        • abus d’alcool, tabagisme;
      • adultes en bonne santé de 65 à 85 ans.
    • Au-delà de l’âge de 85 ans, la vaccination antipneumococcique n’est plus recommandée en principe (manque de données d’efficacité).
  • Modifications du schéma vaccinal pour le groupe cible « adultes en bonne santé de 65 à 85 ans ».

    • L’intervalle entre les injections d’une dose de PCV13 puis d’une dose de PPV23, est maintenant de « minimum 1 an », au lieu de « minimum 8 semaines » auparavant.

      – La prolongation de l’intervalle entre le PCV13 et le PPV23 est argumentée comme suit dans l’avis du CSS : « Un intervalle d’au moins 8 semaines est pris en compte entre la vaccination au moyen du PCV13 et du PPV23. Chez les adultes en bonne santé âgés de 65 ans ou plus, l’intervalle entre le PCV13 et le PPV23 peut être prolongé jusqu’à 1 an au moins, car une meilleure réponse en anticorps secondaires est induite, les effets indésirables locaux sont moins nombreux lors de la deuxième administration du vaccin et le risque d’infections à pneumocoque par rapport à la population à haut risque et/ou atteinte de comorbidités est moindre, de sorte que l’extension au PPV23 peut se faire moins rapidement. »
      – 
      Chez les adultes présentant un risque accru d’infection pneumococcique à évolution grave, et chez les adultes présentant une comorbidité, l’intervalle entre les deux administrations reste de « minimum 8 semaines » avec l’argumentation suivante dans l’avis du CSS: « Afin de générer et d’élargir au mieux et au plus vite la protection des adultes exposés à un risque accru d’infections à pneumocoque et des adultes atteints d’une comorbidité, un intervalle de vaccination d’au moins 8 semaines entre le PCV13 et le PPV23 est recommandé dans ces groupes. »
    • Comme schéma vaccinal alternatif, « 1 dose unique de PPV23 » est proposée.

      – Le schéma alternatif « 1 dose unique de PPV23 » n’est pas un premier choix selon le CSS. Voici ce qu’en dit le CSS: « Si l’on choisit de n’administrer qu’un seul vaccin antipneumococcique, l’utilisation du PPV23 est recommandée afin d’offrir la protection la plus large. »
  • Modifications du schéma vaccinal pour le groupe cible « adultes de 50 à 85 ans présentant une comorbidité ».

    • Une vaccination de rappel est désormais recommandée (1 dose unique de PPV23, 5 ans après la primovaccination). Chez les personnes présentant une comorbidité sous-jacente grave, il est même recommandé de revacciner tous les 5 ans (1 dose de PPV23).

Il n’y a pas de changement dans le schéma vaccinal pour le groupe cible « adultes de 16 à 85 ans présentant un risque accru d’infection pneumococcique à évolution grave ».
 

Les schémas de vaccination, tenant compte de l’avis révisé du CSS

  • Adultes présentant un risque accru d’infection pneumococcique à évolution grave (16-85 ans)

    • Primovaccination: 1 dose de PCV13, suivie après au moins 8 semaines d’une dose de PPV23.

    • Si la personne a déjà été vaccinée avec le PPV23 dans le passé: 1 dose unique de PCV13, au moins 1 an après la dernière dose de PPV23.

    • Vaccination de rappel: 1 dose de PPV23 tous les 5 ans.

  • Adultes présentant une comorbidité (50 à 85 ans):

    • Primovaccination: 1 dose de PCV13, suivie après au moins 8 semaines d’une dose de PPV23.

    • Si la personne a déjà été vaccinée avec le PPV23 dans le passé: 1 dose unique de PCV13, au moins 1 an après la dernière dose de PPV23.

    • Vaccination de rappel:

      • 1 dose unique de PPV23, 5 ans après la primovaccination (nouveau);

      • En cas de comorbidité sous-jacente grave: 1 dose de PPV23 tous les 5 ans (nouveau).

  • Adultes en bonne santé (65 à 85 ans)

    • Primovaccination:

      • schéma préférentiel: 1 dose de PCV13, suivie après au moins 1 an d’une dose de PPV23 (nouveau);

      • schéma alternatif: 1 dose de PPV23 (nouveau).

    • Si la personne a déjà été vaccinée avec le PPV23 dans le passé: 1 dose unique de PCV13, au moins 1 an après la dernière dose de PPV23.

    • Vaccination de rappel: non recommandée.

Commentaire du CBIP

  • La vaccination avec le vaccin antipneumococcique conjugué à 13 valences (PCV13) protège contre la pneumonie acquise en communauté (CAP) et contre les infections invasives à pneumocoques (étude CAPITA, menée chez des plus de 65 ans immunocompétents, voir Folia d’octobre 2015). Les preuves d’un effet protecteur contre la CAP et contre les infections invasives à pneumocoques avec le vaccin polysaccharidique non conjugué à 23 valences (PPV23) sont plus limitées et les résultats sont divergents, en particulier en ce qui concerne la protection contre la CAP.

  • La protection des vaccins antipneumococciques n’est que partielle et uniquement dirigée contre les types de pneumocoques présents dans le vaccin. De plus, aucun bénéfice n’a été démontré en ce qui concerne la mortalité liée aux infections à pneumocoques, ni en ce qui concerne l’incidence de la CAP quelle qu’en soit la cause.

  • On ne dispose toujours pas de preuves rigoureuses en ce qui concerne la protection du PCV13 et du PPV23 chez les patients présentant une comorbidité importante et chez les « patients à risque élevé » (p.ex. les patients immunodéprimés ou présentant une asplénie). Les « patients à risque élevé » restent toutefois le groupe cible prioritaire pour la vaccination, même si la réponse immunitaire et la durée de protection pourraient être moindres. Dans les autres groupes cibles, et en particulier chez les plus de 65 ans en bonne santé, la décision de vacciner doit reposer sur une évaluation du bénéfice en fonction des risques et du coût, mais on ne dispose pas toujours de toutes les données nécessaires pour une telle évaluation.

  • Le PCV13 et le PPV23 couvrent toujours une (grande) partie des souches responsables des infections invasives à pneumocoques chez les adultes de plus de 50 ans en Belgique: respectivement 30% et 74% des cas, selon les chiffres de 2018 (voir Avis du CSS pour les détails). Un suivi épidémiologique reste important étant donné qu’un glissement des souches pathogènes et une augmentation des infections par des sérotypes qui ne sont pas présents dans les vaccins ont été rapportés (« remplacement de sérotype »).

  • Le fait qu’une personne a été vaccinée ne doit jamais être une raison pour ne pas initier un traitement en cas de suspicion d’une infection à pneumocoque.

Note.
  • En Communauté flamande, on prévoit de mettre à disposition gratuitement le vaccin Pneumovax 23®, dans le courant de l’automne 2020, pour la vaccination des résidents de maisons de repos et de soins. Les modalités pratiques ne sont pas encore connues (voir https://www.vaccinnet.be, situation au 12/10/20).

  • Une « indisponibilité temporaire » de Pneumovax 23® a été annoncée par l’Agence belge des médicaments (AFMPS) (depuis le 24/09/20, et prévue jusqu’au 16/11/2020).

Sources spécifiques

1 Vaccination antipneumococcique / adultes. Conseil Supérieur de la Santé (CSS). Avis 9562, juillet 2020. Sur https://www.health.belgium.be/fr/avis-9562-vaccination-antipneumococcique-adultes