Le rimégépant appartient à la classe des antagonistes des récepteurs du peptide lié au gène de la calcitonine (CGRP), une nouvelle classe de médicaments pour la migraine appelés « gépants ».
 
Que ce soit en aigu ou en prophylaxie, l’effet du rimégépant est plutôt modeste. Avec le rimégépant, la douleur avait disparu 2 heures après la prise chez 5 à 16% de patients supplémentaires, par rapport au placebo. L’administration prophylactique de rimégépant (tous les deux jours) permet d’éviter moins d’un jour de migraine dans le troisième mois suivant le début du traitement, par rapport au placebo.
 
Des études comparatives directes sont nécessaires entre le rimégépant et les autres traitements médicamenteux utilisés dans la migraine aiguë ou en prophylaxie.
 
Le rimégépant pourrait être une alternative intéressante pour les patients qui ne répondent pas suffisamment aux triptans ou qui présentent des contre-indications aux triptans, mais ce groupe n’a pas encore été étudié.
 
Il n’existe pas non plus d’études randomisées sur l’utilité du rimégépant en traitement de crise chez les patients prenant déjà du rimégépant à titre prophylactique ou recevant un autre traitement prophylactique.

Des recherches supplémentaires sont nécessaires pour évaluer l’efficacité et la sécurité à long terme du rimégépant.

Les antagonistes du récepteur du CGRP : une nouvelle classe d’antimigraineux

  • Le rimégépant est le premier antimigraineux autorisé en Europe d’une nouvelle classe de médicaments antimigraineux : les petites molécules antagonistes (non-peptidiques) des récepteurs du peptide relié au gène de la calcitonine (CGRP), aussi appelées les « gépants ». Le CGRP est un neuropeptide impliqué dans la physiopathologie de la migraine1.

  • Le rimégépant est administré sous forme de lyophilisat oral (à placer sur ou sous la langue) à raison de 75 mg par lyophilisat. La posologie est de 75 mg en cas de crise aiguë (maximum 1x par jour) et de 75 mg tous les deux jours en prophylaxie (maximum 75 mg par jour). Selon le RCP, le rimégépant est indiqué à la fois pour le traitement des crises de migraine avec ou sans aura chez l’adulte et pour la prophylaxie de la migraine épisodique chez les adultes qui présentent au moins 4 crises de migraine par mois. Le rimégépant n’est pas remboursé en Belgique (situation au 01/02/2023, pour le prix actuel voir le Répertoire).

  • Une autre classe d’antimigraineux qui agissent sur le CGRP ou son récepteur sont les anticorps monoclonaux anti-CGRP (uniquement en prophylaxie), dont trois sont actuellement commercialisés en Belgique [voir Folia d’août 2021]. Autre nouveauté qui ne devrait pas tarder à apparaître dans le paysage thérapeutique belge : les agonistes des récepteurs 5HT1F pour le traitement de crise, également appelés les « ditans » 2 (autorisés en Europe mais pas encore commercialisés en Belgique).

  • Outre le rimégépant, deux autres « gépants » ont été autorisés aux Etats-Unis (situation au 01/02/2023) : l’atogépant pour la prophylaxie antimigraineuse et l’ubrogépant pour le traitement de la migraine aiguë.
     

Efficacité du rimégépant dans la migraine aiguë

Selon des études randomisées, entre 19 et 31% des patients ne ressentent plus de douleur deux heures après la prise de rimégépant, soit 5 à 16 % de plus qu’avec un placebo. Les études incluaient principalement des femmes et l’âge moyen des participants était de 40 à 42 ans. Les patients avaient en moyenne 4 à 4,6 crises de migraine par mois au début de l’étude. Les patients souffrant de maladies cardiovasculaires graves ou de troubles psychiatriques ont été exclus.
Des études complémentaires sont nécessaires pour savoir si le rimégépant garde son effet lorsqu’il est utilisé de manière répétée pour des crises de migraine récurrentes.
La place du rimégépant dans l’arsenal thérapeutique de la crise de migraine reste incertaine pour l’instant.

Le rimégépant en traitement de crise comparé au placebo

  • Selon des études randomisées menées sur un total de 4 700 patients (entre 2 et 8 crises de migraine par mois, maximum 15 jours de céphalées par mois), 5 à 16% de patients supplémentaires étaient sans douleur deux heures après la prise de rimégépant 75 mg (entre 19 et 31% sans douleur), par rapport au placebo. Le symptôme le plus invalidant (photophobie, phonophobie, nausées ou vomissements) avait disparu au bout de 2 heures chez environ 1 patient sur 3, contre environ 1 patient sur 4 sous placebo. (voir + Plus d’infos « Le rimégépant en traitement de crise comparé à d’autres médicaments »)

  • Les participants à l’étude étaient principalement des femmes (85 à 89%) et leur âge moyen était de 40 à 42 ans. Les patients pouvaient être sous prophylaxie antimigraineuse stable à condition que la prophylaxie ait été initiée au moins 3 mois avant leur inclusion. Il n’est pas précisé combien de patients étaient effectivement sous régime prophylactique ni quel était le traitement médicamenteux utilisé dans ce cas-là.

  • Les patients souffrant d’une maladie cardiovasculaire non contrôlée, instable ou récemment diagnostiquée n’ont pas été inclus dans les études en raison du risque théorique d’un effet vasoconstricteur avec les inhibiteurs du CGRP. Ce critère d’exclusion coïncide largement avec les contre-indications aux triptans, ce qui explique la faible proportion de sujets présentant des contre-indications aux triptans dans les études sur le rimégépant (0,4 à 1,2 %)3. Autre critère d’exclusion : les patients souffrant d’une maladie hépatique existante et les patients ayant reçu un diagnostic de dépression majeure ou ayant d’autres troubles psychiatriques.

  • Nous n’avons trouvé aucune étude randomisée ayant spécifiquement évalué l’effet du rimégépant en traitement de crise chez les patients prenant déjà du rimégépant à titre prophylactique ou recevant un autre traitement prophylactique. Des rapports de cas suggèrent que le rimégépant permet d’atténuer les crises de migraine chez les patients prenant des anticorps monoclonaux en prophylaxie4-6, mais des recherches supplémentaires sont nécessaires.

Le rimégépant en traitement de crise comparé à d’autres médicaments

  • Les études ayant évalué l’efficacité du rimégépant par rapport aux autres traitements de crise des migraines sont rares :

    • La seule étude RCT comparative directe était une étude de « recherche de dose » ayant évalué une administration unique de rimégépant (à différentes doses), de sumatriptan 100 mg ou d’un placebo4, 6, 7. Par rapport au placebo, le taux de réponse semblait légèrement meilleur avec le sumatriptan 100 mg (35% des patients sans douleur après 2 heures) qu’avec le rimégépant 75 mg (31,4% sans douleur), mais il n’y a pas eu de test statistique pour la comparaison rimégépant versus sumatriptan. Le rimégépant et le sumatriptan étaient tous deux plus efficaces que le placebo (15,3 % de personnes sans douleur après 2 heures) (voir + Plus d’infos).

    • Une méta-analyse en réseau de plusieurs RCT en double aveugle concluait que le rimégépant était moins efficace que la plupart des triptans, mais cette conclusion était seulement basée sur des comparaisons indirectes et, selon les auteurs de la méta-analyse, il y avait un biais de publication2, 8. En outre, les populations ne sont pas tout à fait comparables. (voir + Plus d’infos)

      • Via nos sources, nous avons trouvé les RCT suivantes sur le rimégépant en traitement de crise :
             – Une étude de « recherche de dose » de phase II ayant randomisé les patients sur une
               administration unique de rimégépant (doses de 10 à 600 mg), de sumatriptan 100 mg et un
               placebo7.
             – Trois études de phase III ayant comparé une administration unique de rimégépant 75 mg à
               un placebo3, 9, 10.

             Toutes les études incluaient des adultes souffrant de migraine avec ou sans aura, ayant 2 à 8
             crises de migraine par mois (en moyenne 4 à 4,6) et moins de 15 jours de céphalées par mois.
         
        Critères d’évaluation primaires :
             – Pourcentage de patients sans douleur 2 heures après la prise ;
             – Pourcentage de patients dont le symptôme migraineux le plus invalidant (nausée,
               vomissement, photophobie ou phonophobie) avait disparu 2 heures après la prise du
               médicament.

      Tableau : études randomisées contrôlées par placebo avec le rimégépant en traitement de crise des migraines
       

      Étude Intervention Critères d’évaluation cliniques Résultat
      RCT de « recherche de dose » auprès de 886 adultes présentant 2 à 7 crises de migraine par mois7 Rimégépant 10-600 mg vs.
      sumatriptan 100 mg vs. placebo
      Disparition de la douleur après 2h
      (92% ont terminé l’étude)
      Rimégépant
      75 mg : 31,4%
      150 mg : 32,9%
      300 mg : 29,7%
      (p<0,05 vs. placebo)
       
      Sumatriptan 35%
      (p<0,05 vs. placebo)
       
      Placebo 15,3%
      RCT auprès de 1 186 adultes présentant 2 à 8 crises de migraine par mois9 Rimégépant
      75 mg vs. placebo
      (administration unique)
      Disparition de la douleur après 2h
      (90% ont terminé l’étude)

      Disparition du symptôme le plus invalidant après 2 h

      19,6% contre 12%
      Différence de 7,6% (IC à 95% de 3,3 à 11,9)

      37,6% contre 25,2%
      Différence de 12,4% (IC à 95% de 6,9 à 17,9)

       

      RCT auprès de 1 466 adultes présentant 2 à 8 crises de migraine par mois9 Rimégépant
      75 mg vs. placebo
      Disparition de la douleur après 2 h
      (92% ont terminé l’étude)

      Disparition du symptôme le plus invalidant après 2 h

      21,2% contre 10,9%
      Différence de 10,4% (IC à 95% de 6,5 à 14,2)

      35,1% contre 26,8%
      Différence de 8,3% (IC à 95% de 3,4 à 13,2)

      RCT auprès de 1 162 adultes présentant 2 à 8 crises de migraine par mois3, BHV3000-301
      (pas encore examinée par des pairs)
      Rimégépant
      75 mg vs placebo
      Disparition de la douleur après 2 h
      (93% ont terminé l’étude)

      Disparition du symptôme le plus invalidant après 2 h

      19,2% contre 14,2%
      Différence de 4,9% (IC à 95% de 0,5 à 9,3)

      36,6% contre 27,7%
      Différence de 8,9% (IC à 95% de 3,4 à 14,4)

       

      • Une méta-analyse publiée dans le JAMA11 incluait uniquement des études publiées. Selon cette méta-analyse, la probabilité d’être sans douleur après deux heures était plus grande avec le rimégépant qu’avec le placebo (RR 1,80 (IC à 95% 1,52 à 2,13), différence de risque de 0,09 (IC à 95% de 0,06 à 0,11), niveau de preuve modéré).
      • Un article de synthèse de Cohen6 sur le rimégépant, cité dans le Geneesmiddelenbulletin2, fait référence à une autre méta-analyse12, qui inclut également les données d’une étude non publiée. Les résultats de cette méta-analyse sont comparables aux résultats de la méta-analyse publiée dans le JAMA.
      • Selon une méta-analyse en réseau portant uniquement sur des comparaisons indirectes8, la plupart des triptans sont associés à une plus grande probabilité de disparition des douleurs dans les deux heures que le rimégépant (rapport de cotes (odds ratio) de 1,58 (IC à 95% de 1,07 à 2,33) à 3,13 (IC à 95% de 2,16 à 4,52)). Mais les populations étudiées ne sont pas tout à fait comparables. Une Cochrane Review13 nous apprend par exemple que la plupart des études sur le sumatriptan oral incluaient des patients ayant en moyenne 1 à 6 crises par mois. Dans les études sur le rimégépant, les patients inclus avaient en moyenne 2 à 8 crises de migraine par mois.
  • On ne dispose pas encore d’études publiées sur l’efficacité et la sécurité du rimégépant chez les patients ne répondant pas ou présentant des contre-indications aux autres traitements de crise. Le rimégépant pourrait être une alternative pour les patients ne répondant pas aux triptans. Une étude a toutefois été lancée récemment pour évaluer l’efficacité et la sécurité du rimégépant chez des patients migraineux non éligibles aux triptans [Clinicaltrials.gov].

  • On sait que les triptans et les antalgiques sont susceptibles de provoquer une aggravation de la migraine et des céphalées chroniques quotidiennes en cas de surconsommation14. À l’heure actuelle, ce risque ne peut être exclu pour le rimégépant en raison des données insuffisantes.

Les effets à long terme du rimégépant en traitement de crise

  • Toutes les études randomisées ayant évalué l’effet du rimégépant en traitement de crise portaient sur une administration unique. La question est de savoir si l’effet est maintenu lorsque le rimégépant est utilisé de façon répétée dans les crises de migraine récurrentes2.

  • Selon une analyse a posteriori des données d’une étude de sécurité ouverte, le rimégépant était toujours efficace après un an, utilisé « selon les besoins » 6, 15. L’étude avait toutefois un taux d’abandon élevé (environ 4 patients sur 10, raison non précisée), ce qui complique l’interprétation des résultats. Des recherches supplémentaires sont nécessaires.
     

Efficacité du rimégépant en prophylaxie antimigraineuse

Les patients ayant en moyenne 10 jours de migraine par mois, ont en moyenne 0,8 jours de migraine en moins au cours du troisième mois suivant le début de la prise prophylactique de rimégépant (tous les deux jours), par rapport au placebo.
Près de la moitié des patients rapportent une réduction d’au moins 50% du nombre de jours de migraine modérée à sévère par mois avec le rimégépant, contre 41% patients avec le placebo. On ignore actuellement si le bénéfice est maintenu en cas de traitement durant plus de 3 mois.
​Des études comparatives directes avec d’autres antimigraineux prophylactiques sont nécessaires pour mieux cerner la place du rimégépant au sein de l’arsenal thérapeutique. Des études sont également nécessaires pour évaluer l’utilité d’une prophylaxie au rimégépant chez les patients ayant échoué à d’autres traitements prophylactiques antimigraineux.

Le rimégépant en prophylaxie comparé au placebo

  • Dans une étude randomisée16, la prise prophylactique de rimégépant 75 mg (tous les deux jours) par des patients migraineux (83% de femmes, âge moyen de 41 ans, en moyenne 10 jours de migraine par mois à l’inclusion) a entraîné une diminution des jours de migraine d’en moyenne 0,8 jour dans le troisième mois suivant le début de la prise, par rapport au placebo. Avec le rimégépant, le nombre de jours de migraine avait diminué en moyenne de 4,3, contre 3,5 jours en moyenne avec le placebo. Le nombre de jours de migraine modérée à sévère par mois avait diminué d’au moins la moitié chez 49% des patients, contre 41% des patients sous placebo.

  • L’étude incluait trop peu de patients souffrant de migraine chronique pour pouvoir se prononcer sur l’effet du rimégépant dans ce sous-groupe. C’est pourquoi l’indication dans le RCP a été limitée à la migraine épisodique.

  • Il n’existe pas de données sur l’efficacité du rimégépant utilisé en aigu chez les patients qui en prennent déjà à titre prophylactique. Dans l’étude sur la prophylaxie, le recours au rimégépant en traitement de crise n’était pas autorisé.

  • Récemment, une RCT a été lancée pour évaluer le rimégépant chez des patients n’ayant pas répondu à d’autres traitements prophylactiques antimigraineux par voie orale.

L’étude ayant évalué le rimégépant en prophylaxie incluait des adultes souffrant de migraine avec aura (40%) ou sans aura (60%). 23% des participants avaient des antécédents de migraine chronique.
Les patients devaient avoir au moins 4 et maximum 18 crises de migraine modérées à sévères par mois et avoir connu au moins 6 jours de migraine dans le mois précédant la randomisation.

Tableau : études randomisées avec le rimégépant en prophylaxie antimigraineuse
 

Étude Interventions Critères d’évaluation cliniques Résultats
RCT auprès de 747 adultes ayant en moyenne 10 jours de migraine par mois16 Rimégépant 75 mg tous les deux jours vs. placebo

Durée du traitement: 3 mois (84% ont terminé le traitement, 93% ont été inclus dans l’analyse pour le critère d’évaluation primaire)

Variation du nombre de jours de migraine par mois (critère d’évaluation primaire)

Pourcentage de patients présentant une réduction d’au moins 50% du nombre de jours de migraine modérée à sévère (critère d’évaluation secondaire).

-4,3 contre -3,5 jours
Différence de -0,8 jours (IC à 95% de -1,46 à -0,20)

49% contre 41%
Différence de 8%
(IC à 95% de 0 à 15, p=0,044)

Le rimégépant comparé à d’autres traitements prophylactiques de la migraine

  • L’effet du rimégépant semble être du même ordre de grandeur que celui d’autres traitements prophylactiques de la migraine, mais les populations ne sont pas toujours comparables (notamment en ce qui concerne le nombre de crises de migraine par mois). Des études randomisées comparatives directes sont nécessaires pour définir la place du rimégépant au sein de l’arsenal thérapeutique pour la prophylaxie antimigraineuse. Sa forme d’administration orale pourrait représenter un avantage par rapport aux anticorps monoclonaux, mais ceci n’a pas fait l’objet d’études randomisées comparatives. Une étude comparative avec le galcanézumab est en cours (CHALLENGE-MIG)6.

Les effets à long terme du rimégépant en prophylaxie antimigraineuse

  • L’étude en question ne durait que trois mois, ce qui est très court pour se prononcer sur l’utilité du rimégépant en prophylaxie antimigraineuse. Nous n’avons trouvé aucune étude publiée ayant évalué le rimégépant sur une période de suivi plus longue.
     

Profil d’innocuité du rimégépant

Le rimégépant semble bien toléré dans les études randomisées. Des réactions d’hypersensibilité sévères peuvent survenir lorsqu’il est utilisé en aigu. Il faut attendre les résultats d’études post-commercialisation pour pouvoir évaluer la sécurité d’utilisation à long terme (plus de 3 mois), en particulier chez les patients à risque cardiovasculaire, en raison du risque théorique d’un effet vasoconstricteur associé aux inhibiteurs du CGRP. La co-administration du rimégépant avec d’autres inhibiteurs du CGRP ou avec un triptan doit également être mieux documentée en termes de sécurité.
  • Dans les études randomisées ayant évalué le rimégépant en traitement de crise, le rimégépant était bien toléré : 10,8% des patients ont présenté des effets indésirables suite à une prise unique de rimégépant, contre 8,6% avec le placebo3. Les effets indésirables les plus fréquemment rapportés étaient : nausées (1,2% contre 0,8% avec le placebo) et infections des voies urinaires (0,8% contre 0,3% avec le placebo).

  • La sécurité du traitement prophylactique est encore peu documentée pour l’instant. La seule étude randomisée disponible16 ne durait que 3 mois et n’a montré aucune différence entre le rimégépant et le placebo en ce qui concerne la survenue d’effets indésirables (36% des patients dans les deux groupes).

  • Les données issues des études randomisées sont insuffisantes pour se prononcer sur le risque d’effets indésirables graves avec le rimégépant en traitement de crise17. Dans l’étude ayant évalué le traitement prophylactique16, la fréquence d’apparition des effets indésirables graves était similaire pour le rimégépant et le placebo (1%). Des études à plus grande échelle sont nécessaires pour le confirmer.

  • L’effet après l’arrêt du traitement ou le phénonème de rebond (augmentation du nombre de crises de migraine) en cas d’arrêt brutal n’ont pas été étudiés. Aucun indice de rebond n’a été identifié dans les études disponibles. Aucun signal suggérant une surconsommation ou un mésusage de rimégepant n’a été rapporté lors d’une administration à long terme3. Ces questions doivent faire l’objet d’un suivi plus approfondi dans le cadre d’études post-commercialisation.

  • Des réactions d’hypersensibilité, incluant dyspnée et éruption cutanée sévère, peuvent survenir plusieurs jours après l’administration. Elles sont survenues chez moins de 1% des patients dans les études cliniques18.

  • Contrairement aux triptans, le rimégépant n’est pas contre-indiqué en cas de maladie cardiovasculaire2. Étant donné que les études ont exclu les patients présentant une maladie cardiovasculaire non contrôlée, instable, récemment diagnostiquée ou sévère, la sécurité d’utilisation dans cette population reste toutefois incertaine3.

  • Il n’est pas possible de se prononcer sur la sécurité de l’utilisation combinée de rimégépant et de triptans en raison du manque de données. Dans les études sur le rimégépant en traitement de crise, les triptans n’étaient pas autorisés dans les 48 heures suivant la prise de rimégépant. Dans l’étude sur le rimégépant en prophylaxie antimigraineuse, les triptans étaient autorisés, mais les auteurs ne mentionnent pas à quelle fréquence ils ont été pris (dans le groupe rimégépant, des « médicaments de secours » (rescue) ont été utilisés pendant 3,7 jours au cours du dernier mois de l’étude, contre 4 jours dans le groupe placebo, une différence qui n’était pas statistiquement significative).

  • Concernant l’utilisation concomitante du rimégépant avec des anticorps monoclonaux en prophylaxie antimigraineuse, les données disponibles sont rassurantes mais elles sont trop limitées et de trop courte durée pour pouvoir se prononcer sur la sécurité d’une telle utilisation6. La prudence s’impose car le CGRP est impliqué dans plusieurs processus physiologiques et l’association d’inhibiteurs du CGRP pourrait théoriquement entraîner une hypertension ou des accidents ischémiques. Des études à long terme sur des populations plus importantes sont nécessaires pour déterminer dans quels sous-groupes la thérapie combinée peut représenter un bénéfice et dans quels sous-groupes elle peut au contraire exposer à des risques supplémentaires.19

  • L’utilisation du rimégépant pendant la grossesse n’est pas suffisamment documentée. Par mesure de précaution, le rimégépant est déconseillé.

  • Interactions : le rimégépant est un substrat du CYP3A4 et de la P-gp. La co-administration avec des inhibiteurs puissants du CYP3A4 ou avec des inducteurs puissants ou modérés du CYP3A4 n’est pas recommandée. En cas d’utilisation concomitante d’inhibiteurs modérés du CYP3A4 ou d’inhibiteurs puissants de la P-gp, il faut éviter la prise d’une 2e dose de rimégépant dans les 48 heures (voir Tableau Ic et Tableau Id dans l’Introduction 6.3).

  • Précautions particulières : le rimégépant doit être évité chez les patients présentant une insuffisance hépatique sévère
     

Commentaires du CBIP

  • Nos messages concernant le rimégépant rejoignent en grande partie ceux que nous avions donnés au sujet des anticorps monoclonaux dans la migraine [voir Folia d’août 2021]. Il est probable que ce nouveau médicament aura un intérêt chez certains patients, mais les caractéristiques qui distinguent les « répondeurs » des « non-répondeurs » restent à élucider. Ceci doit être approfondi dans le cadre de recherches futures.

  • Parmi les patients souffrant d’une crise de migraine, 19 à 31% des patients ne ressentent plus de douleur deux heures après la prise de rimégépant, soit 5 à 16% de plus qu’avec le placebo. L’effet semble être du même ordre de grandeur que celui d’autres antimigraineux, mais pour pouvoir en juger, il faudrait des études portant sur des populations comparables. Des études comparatives directes sont nécessaires pour mieux cerner la place du rimégépant au sein de l’arsenal thérapeutique.

  • Le traitement par rimégépant pourrait s’avérer bénéfique chez les patients migraineux qui ne répondent pas à d’autres traitements ou qui présentent des contre-indications à ces traitements, mais ce groupe de patients n’a pas fait l’objet d’études randomisées. Des recherches supplémentaires sont également nécessaires en ce qui concerne les risques et les bénéfices liés à l’utilisation concomitante d’anticorps monoclonaux.

  • Le rimégépant utilisé en prophylaxie permet de diminuer le nombre de jours de migraine de moins d’un jour par mois. Même si pour le patient, chaque jour sans migraine est un jour de gagné, il est important de ne pas créer de faux espoirs. Il n’y a aucune garantie de succès thérapeutique et il ne s’agit pas d’un traitement curatif.

  • La réponse au placebo dans une population de patients souffrant de migraine sévère est importante (les patients avaient en moyenne 4 à 4,6 crises de migraine par mois à l’inclusion dans les études sur la migraine aiguë et en moyenne 10 jours de migraine par mois dans l’étude sur la prophylaxie).

  • On peut se demander si le bénéfice du rimégépant est proportionnel à son prix élevé, qui, à environ 30 € par comprimé, est beaucoup plus élevé que celui de la plupart des autres médicaments antimigraineux (sauf des anticorps monoclonaux). Le coût social de la migraine sévère doit être pris en compte dans cette évaluation.

  • La migraine étant une affection chronique, il est fort probable que le traitement prophylactique sera pris pendant des années. Les études contrôlées par placebo n’ont évalué le rimégépant que sur une durée de tout au plus 3 mois, ce qui laisse de nombreux points d’interrogation quant à son efficacité et sa sécurité d’emploi à long terme. En outre, il n’existe pas d’études de bonne qualité méthodologique sur l’effet après l’arrêt du traitement.

  • Les études cliniques n’ont pas révélé d’effets indésirables graves, mais elles portaient sur une population sélectionnée. Il faut attendre les résultats d’études post-commercialisation pour pouvoir se prononcer sur la sécurité du rimégépant, en particulier chez les patients atteints de maladies cardiovasculaires graves ou de troubles psychiatriques.

  • Il n’est pas possible de se prononcer sur le profil d’efficacité et d’innocuité des antagonistes des récepteurs du CGRP chez les enfants et les adolescents en raison de l’absence d’études randomisées.
     

Sources

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