• Certains médicaments, tels que le finastéride et les ISRS, peuvent altérer la qualité du sperme. Cet effet est généralement réversible après l’arrêt du traitement.

  • Il ressort d’études limitées que le risque tératogène n’est pas majoré par les médicaments pris par le père peu avant la conception, à l’exception peut-être du valproate. Des études récentes suggèrent un risque accru de troubles neurodéveloppementaux en cas d’exposition paternelle au valproate.

  • En cas d’exposition paternelle à des médicaments tératogènes connus en période post-conceptionnelle, aucun impact n’est à prévoir sur la grossesse ou l’enfant à naître, la quantité de médicament dans le sperme étant négligeable.

L’exposition maternelle aux médicaments pendant la grossesse et les effets sur la mère et l’enfant à naître sont assez bien documentés. En revanche, on dispose de beaucoup moins d’informations sur l’exposition paternelle aux médicaments en cas de projet de grossesse. Dans cet article, nous examinons les médicaments couramment utilisés (à l’exception des médicaments cytotoxiques) susceptibles d’influencer la fertilité masculine ou le risque tératogène en cas d’exposition paternelle en pré- et post-conceptionnel. Pour ce faire, nous nous appuyons sur un récapitulatif de l’une de nos sources habituelles en matière de grossesse, à savoir, le centre Lareb1.
 

Impact sur la qualité du sperme

Des études ont montré qu’un nombre limité de médicaments pouvait affecter la spermatogenèse. Dans cet aperçu, nous n’abordons que les spécialités qui sont également mentionnées dans le récapitulatif du Lareb1.

Finastéride et dutastéride

L’utilisation prolongée de finastéride (même aux faibles doses utilisées off-label dans l’alopécie) et de dutastéride (RCP) est associée à une réduction de la quantité et de la mobilité des spermatozoïdes. La prise de finastéride et de dutastéride pourrait donc être associée à une réduction de la fertilité chez les hommes dont la qualité du sperme est déjà altérée. Aucune étude n’a toutefois examiné la fertilité en tant que critère d’évaluation. Ces effets sont réversibles après l’arrêt du médicament2.

ISRS

La prise d’ISRS est associée à des effets néfastes sur la qualité du sperme (concentration, mobilité et morphologie des spermatozoïdes). Ces effets sont réversibles après l’arrêt du médicament. Certaines sources conseillent de surveiller la qualité du sperme en cas de troubles de la fertilité et d’arrêter la prise d’ISRS si possible3.

Médicaments du TDAH

Même si certaines données indiquent que les amphétamines peuvent avoir un impact négatif sur la qualité du sperme, ceci n’a pas été documenté pour la dexamphétamine. Pour le méthylphénidate, les données sont rassurantes4.

Inhibiteurs du TNF

L’infliximab, l’adalimumab, le certolizumab pégol, l’étanercept et le golimumab sont des inhibiteurs du TNF. Les inhibiteurs du TNF régulent plusieurs processus essentiels à la spermatogenèse, de sorte qu’un effet négatif sur la spermatogenèse pourrait théoriquement être suspecté. Jusqu’à présent, les données cliniques ne suggèrent pas d’effet sur la qualité des spermatozoïdes suite à la prise d’inhibiteurs du TNF5.

Sulfasalazine

Une oligospermie et une infertilité peuvent se manifester chez les hommes traités par sulfasalazine. Ces effets sont réversibles dans les 2 à 3 mois qui suivent l’arrêt du traitement (RCP).

Sirolimus

La prise de sirolimus est associée à des effets néfastes sur la qualité du sperme. Dans la plupart des cas, ces effets sont réversibles après l’arrêt du médicament (RCP).
 

Risque tératogène en pré-conception

Peu d’études ont évalué le risque tératogène des médicaments utilisés par le père peu avant la conception. Bien que la plupart des études présentent des résultats rassurants, une étude récente montre que le valproate pourrait être associé à un effet tératogène (voir ci-dessous).
L’impact limité du sperme sur le risque tératogène peut s’expliquer par le fait que seuls les spermatozoïdes sains sont capables d’engendrer une grossesse. En cas de fécondation avec un spermatozoïde altéré, il est probable que cela conduise à une fausse couche précoce. Notons aussi que le cycle de développement d’un spermatozoïde jusqu’à l’éjaculation dure moins de 3 mois : l’exposition à des substances nocives il y a plus de 3 mois sera donc moins significative. Le centre Lareb remarque toutefois qu’il existe certains signaux d’effets indésirables qui méritent d’être surveillés1.

Méthotrexate

Les études chez l’animal ont mis en évidence une génotoxicité du méthotrexate. Les études chez l’humain ne montrent cependant aucun risque accru d’effets néfastes sur la grossesse et l’enfant à naître en cas d’exposition paternelle au méthotrexate trois mois avant la conception. Néanmoins, la notice et le RCP mentionnent des mesures de précaution, notamment l’utilisation d’un moyen de contraception pendant et jusqu’à 3 mois après le traitement6.

Azathioprine et analogues des purines

Plusieurs études ne montrent pas de risque accru d’effets néfastes sur la grossesse et l’enfant à naître en cas d’exposition paternelle à l’azathioprine ou à la mercaptopurine trois mois avant la conception. Néanmoins, la notice et le RCP conseillent d’utiliser un moyen de contraception pendant et jusqu’à 3 mois après le traitement, par mesure de précaution7.

Valproate

Une étude du fabricant a mis en évidence une possible augmentation du risque de troubles neurodéveloppementaux chez les enfants de pères traités par valproate 3 mois avant la conception. Ce risque s’élèverait à 5%, contre 3% chez les enfants dont les pères avaient pris de la lamotrigine ou du lévétiracétam. Cette étude ne permet pas de déterminer l’existence d’une relation causale. Ces données ont toutefois incité le Comité européen de pharmacovigilance (PRAC) à formuler quelques mesures de minimisation des risques (voir Folia de mai 2024).

Acide mycophénolique

Le mycophénolate s’est révélé génotoxique chez l’animal. Par conséquent, le RCP recommande des mesures de précaution pendant le traitement : les patients masculins sexuellement actifs ou leurs partenaires féminines doivent utiliser une contraception pendant le traitement du patient masculin et pendant au moins 90 jours après l’arrêt du traitement par mycophénolate mofétil.
 

Impact sur les le risque de malformations congénitales en post-conception

Concernant les médicaments ayant un effet tératogène prouvé chez la femme : la quantité détectée dans le sperme est très faible. Par conséquent, la concentration susceptible d’atteindre l’enfant lors du coït est si faible qu’aucun effet tératogène ou toxique n’est à craindre.
Pour la plupart des médicaments, il n’est pas nécessaire d’utiliser un préservatif en cas d’exposition post-conceptionnelle. Toutefois, pour les inhibiteurs de la 5-alpha réductase (finastéride et dutastéride), le RCP recommande de prendre des précautions et de minimiser l’exposition de la femme enceinte en utilisant un préservatif. Ici aussi, la concentration dans le sperme est si faible qu’aucun effet tératogène ou toxique n’est attendu1,2.

 

Sources

Lareb. Achtergrond informatie over geneesmiddelgebruik door de man met kinderwens. Dernière consultation le 12/03/2024
Lareb. Finesteride gebruik door de man met kinderwens. Dernière consultation le 12/03/2024
3 Lareb. SSRI gebruik door de man met kinderwens. Dernière consultation le 12/03/2024
4 Lareb. Methylfenidaat en dexamfetamine gebruik door de man met kinderwens. Dernière consultation le 12/03/2024
5 Lareb. TNF alfablokker gebruik door de man met kinderwens. Dernière consultation le 12/03/2024

6 Lareb. Methotrexaat gebruik door de man met kinderwens. Dernière consultation le 12/03/2024
Lareb. Thiopurine gebruik door de man met kinderwens. Dernière consultation le 12/03/2024