Hormonothérapie en prévention primaire du cancer du sein

L’hormonothérapie est un traitement standard après une chirurgie du cancer du sein, visant à réduire le nombre de récidives en cas de tumeur hormonosensible. En prévention primaire également, chez les femmes présentant un risque accru de cancer du sein, l’hormonothérapie réduit pendant 5 ans l'incidence du cancer du sein. Ce risque reste réduit plusieurs années après l’arrêt du traitement. Aucun effet sur la mortalité n'a toutefois été démontré. La prévention primaire du cancer du sein ne figure pas comme indication dans les RCP belges (utilisation off-label). Nous nous contentons donc ici de fournir quelques informations générales et de souligner les incertitudes qui existent à ce sujet.
Si l’on décide d’initier une hormonothérapie, le choix du médicament dépendra du statut ménopausique et du profil des effets indésirables. Pour le tamoxifène, il existe surtout un risque accru de cancer de l'endomètre et de thromboembolie veineuse pendant le traitement. Le raloxifène est plus sûr que le tamoxifène mais également moins efficace. Pour les inhibiteurs de l'aromatase, il existe principalement un risque accru de douleurs musculo-squelettiques et d'ostéoporose. Le rapport bénéfice/risque doit être discuté chez toute femme présentant un risque accru de cancer du sein.

La chirurgie prophylactique a une place dans la prévention primaire du cancer du sein chez les femmes à risque élevé de cancer du sein (pour la définition donnée dans le guideline du NICE, voir plus loin), en particulier chez les femmes porteuses d'une mutation BRCA 1/2 dont le risque est fortement accru. Une surveillance préventive étroite et une hormonothérapie constituent des alternatives pour les femmes qui ne choisissent pas la chirurgie ou ne sont pas éligibles pour la chirurgie.

Dans d’autres pays, des guidelines recommandent le recours aux médicaments antihormonaux pour la prévention primaire du cancer du sein chez les femmes présentant un risque accru de cancer du sein, mais en Belgique, il s’agit d’une utilisation off-label1,2. Les hormonothérapies suivantes ont été étudiées dans ce cadre : les modulateurs sélectifs des récepteurs aux œstrogènes (SERM) tamoxifène et raloxifène, et les inhibiteurs de l'aromatase anastrozole et exémestane. Dans le présent article, nous examinons leur rapport bénéfice/risque.

Critères d’éligibilité

Les études sur la prévention primaire du cancer du sein ayant utilisé des critères d'inclusion différents, il est difficile de définir une population cible du traitement. Dans ces études, qui ont débuté il y a une vingtaine d'années, le dépistage des mutations génétiques associées à un risque fortement accru de cancer du sein (p.ex. BRCA 1/2) était encore peu pratiqué. L'âge optimal pour l’identification des femmes à risque dans la pratique clinique n’est pas clairement déterminé, ni à quelle fréquence le risque devrait idéalement être évalué3. Le niveau de risque à partir duquel une femme est éligible à l’hormonothérapie doit être évalué sur une base individuelle, en prenant en compte à la fois les aspects médicaux et personnels.

Un guideline du NICE sur la prise en charge du cancer du sein familial recommande une hormonothérapie chez les femmes qui ne sont pas éligibles ou refusent une chirurgie prophylactique1. Cette recommandation s'applique aux femmes à risque élevé de cancer du sein, défini comme un risque à vie de cancer du sein supérieur à 30 % ou un risque à 10 ans supérieur à 8 % pour les femmes de 40 ans et plus. Une hormonothérapie peut être envisagée à partir d'un risque modéré de cancer du sein.

  • Le guideline du NICE définit un risque élevé de cancer du sein comme un risque à vie de cancer du sein supérieur à 30 % pour les femmes de 20 ans ou plus, ou un risque à 10 ans supérieur à 8 % pour les femmes entre 40 et 50 ans. La chirurgie pour réduire le risque de cancer du sein est considérée à partir d’un risque à vie de 30 %.
    Un risque modéré est défini comme un risque à vie de cancer du sein compris entre 17 % et 30 % ou un risque à 10 ans compris entre 3 et 8 % pour les femmes entre 40 et 50 ans. Note de la rédaction : il est évident que la détermination de ces seuils est purement consensuelle.
  • Un rapport du KCE de 2011 sur le dépistage du cancer du sein utilise les mêmes pourcentages que le guideline du NICE pour définir les niveaux de risque (le risque élevé étant qualifié de « risque fortement accru » dans le rapport du KCE, et le risque modéré de « risque accru »)4. Les femmes peuvent être classées dans ces groupes à risque sur la base d’une anamnèse familiale. Le rapport du KCE (lien direct vers le rapport complet en PDF) fournit une liste des situations possibles en fonction des facteurs de risque (p.ex. nombre de membres de la famille du premier ou du deuxième degré ayant reçu un diagnostic de cancer du sein, âge auquel le diagnostic a été posé, origine juive, etc.). Les femmes qui présentent un risque fortement accru d’après l’anamnèse familiale doivent se voir proposer une évaluation individuelle du risque, suivie d'une concertation sur la stratégie de dépistage, et éventuellement de tests génétiques ou de mesures prophylactiques. Note de la rédaction : les chiffres absolus (voir plus loin) donnent une image plus objective du bénéfice que les réductions relatives du risque.

Le guideline de l'USPTSF (US Preventive Services Task Force) recommande une hormonothérapie chez les femmes asymptomatiques âgées de ≥ 35 ans présentant un risque accru de cancer du sein et un faible risque d'effets indésirables2. Ce guideline ne précise pas de seuil d’éligibilité mais indique que le rapport bénéfice/risque de l’hormonothérapie est probablement favorable chez les femmes présentant des risques plus élevés, tels qu’un risque à 5 ans de cancer du sein invasif d'au moins 3 %.

  • Cette recommandation s'applique également aux femmes asymptomatiques de ≥ 35 ans ayant des antécédents de lésions mammaires bénignes telles qu’une hyperplasie canalaire ou lobulaire atypique et un carcinome lobulaire in situ (CLIS). La recommandation ne s'applique pas aux femmes ayant ou ayant eu un cancer du sein ou un carcinome canalaire in situ (CCIS).
  • L'USPTF n'a pas de préférence parmi plusieurs outils disponibles pour calculer le risque de cancer du sein : voir par exemple le calculateur de risque du NIH ou du BCSC. Ces outils ne fixent pas de seuil pour le niveau de risque à partir duquel les femmes sont éligibles à une hormonothérapie. La capacité de ces modèles de calcul à prédire les femmes qui vont développer un cancer du sein est faible à modérée. Par ailleurs, ces outils n'ont pas été validés dans une population belge.
    Les cliniciens peuvent aussi identifier les femmes à risque accru en combinant les facteurs de risque. Le guideline fournit quelques exemples, tels qu'une femme âgée de ≥ 40 ans ayant un parent du premier degré atteint d'un cancer du sein bilatéral ; une femme âgée de ≥ 45 ans ayant plus d'un parent du premier degré atteint d'un cancer du sein ou 1 parent du premier degré diagnostiqué avec un cancer du sein avant l'âge de 50 ans.

Hormonothérapie: choix, durée de traitement et durée d’efficacité

Chez les femmes à « risque élevé » (voir ci-dessus) de cancer du sein, le rapport bénéfice/risque de l’hormonothérapie est favorable1,2. Pour quelques chiffres sur l'efficacité dans la prévention du cancer du sein et les principaux risques (exprimés en nombre de cas pour 1.000 femmes après 5 ans de traitement), voir plus loin. La durée de traitement recommandée est de 5 ans1. Un effet protecteur subsiste après l'arrêt du traitement. Pour le tamoxifène et l'anastrozole, des données montrent qu’un effet protecteur subsiste jusqu'à respectivement 16 ans et 10,9 ans après le début du traitement. L’hormonothérapie en prévention primaire n'a cependant pas de bénéfice prouvé sur la mortalité par cancer du sein ni sur la mortalité totale. La puissance statistique des études était toutefois trop faible, et leur durée de suivi trop courte, pour pouvoir démontrer une différence en termes de mortalité. D’autre part, on ne peut exclure une augmentation du taux de mortalité suite à l’hormonothérapie, due par exemple au cancer de l'endomètre dans le cas du tamoxifène.

Le choix de l’hormonothérapie dépend en premier lieu du statut ménopausique. Ensuite, il sera principalement déterminé par le profil des effets indésirables du tamoxifène (thromboembolie veineuse (TEV), cancer de l'endomètre) et des inhibiteurs de l'aromotase (ostéoporose). Certaines données suggèrent que le risque accru de TEV et de cancer de l'endomètre associé au tamoxifène est plus prononcé chez les femmes de plus de 50 ans et que le risque se normalise après l'arrêt du traitement3. Le raloxifène est moins efficace que le tamoxifène mais présente un risque plus faible de TEV et aucune augmentation du risque de cancer de l'endomètre. Voir plus loin pour plus de détails.

Chez les femmes en préménopause, seul le tamoxifène est recommandé, vu l'absence d'études avec le raloxifène dans cette population et le mécanisme d'action des inhibiteurs de l'aromatase (voir Folia de janvier 2021).
Chez les femmes en postménopause, l'anastrozole est recommandé en l'absence d'ostéoporose sévère. En présence d'une ostéoporose sévère ou lorsque la patiente ne souhaite pas recevoir d'anastrozole, le tamoxifène est recommandé à condition qu'il n'y ait pas d'antécédents ou de risque accru de TEV ou de cancer de l'endomètre. Lorsque le tamoxifène n'est pas souhaitable, le raloxifène peut être envisagé chez les femmes non hystérectomisées qui n'ont pas d'antécédents ou de risque accru de TEV1.


Quelques données issues d'études en prévention primaire

Modulateurs sélectifs des récepteurs aux œstrogènes (SERM)

Tamoxifène versus placebo

Dans une méta-analyse de l'agence américaine AHRQ (Agency for Healthcare Research and Quality), on conclut que le nombre de cas de cancer du sein invasif diminue de 7 (IC à 95 % 4-12) pour 1.000 femmes après 5 ans de traitement au tamoxifène, par rapport au placebo3. Le tamoxifène augmente le risque de cancer de l'endomètre, de thromboembolie veineuse (TEV) et de cataracte, le nombre de cas ayant augmenté respectivement de 4 (1-8), 5 (2-9) et 26 (5-50) cas pour 1.000 femmes après 5 ans de traitement. Les SERM sont associés à un risque plus faible d'ostéoporose. Dans le cas du tamoxifène, on compte 3 (0,2-5) fractures non vertébrales de moins sur 1.000 femmes. En ce qui concerne le nombre de fractures vertébrales, on n’observe pas de différence avec le placebo.
Certaines données suggèrent que des doses inférieures à la dose standard de 20 mg de tamoxifène/jour réduisent le risque d'effets indésirables tout en restant efficaces. Ceci doit toutefois faire l’objet d’études plus approfondies.

  • La méta-analyse de l'AHRQ, sur laquelle est basé le guideline de l'USPSTF, incluait 4 études contrôlées randomisées (randomized controlled trials ou RCT) (n = 48.168) ayant évalué le tamoxifène par rapport au placebo chez des femmes en préménopause et en postménopause3. Des critères d'inclusion différents ont été utilisés, avec également des différences au niveau du risque de cancer du sein. Certaines études ont notamment utilisé comme critère d’inclusion un risque à 5 ans de cancer du sein ≥ 1,66 % (modèle de Gail). Dans une étude, seules les femmes ayant subi une hystérectomie totale ont été incluses. L'âge moyen variait de 47 à 53 ans et la durée médiane du suivi était de 7 à 16 ans. Des symptômes vasomoteurs (tels que des bouffées de chaleur) et des plaintes vaginales étaient les effets indésirables les plus fréquemment observés par rapport au placebo.
  • Après l'arrêt du tamoxifène, un effet protecteur subsiste. Parmi les 4 RCT sur le tamoxifène, l'étude IBIS-I assure le plus long suivi, avec une durée médiane de suivi de 16 ans5. Le risque de cancer du sein après 16 ans de suivi était de 7,0 % dans le groupe tamoxifène (n = 3.575) et de 9,8 % dans le groupe placebo (n = 3.579) (RH 0,71 (IC à 95% 0,60-0,83))
  • Sur la base de 2 études, la méta-analyse de l'AHRQ conclut que le risque de TEV retourne à son niveau initial au moins 3 mois après l'arrêt du traitement. Dans 1 étude, on constate que le risque accru de cancer de l'endomètre diminue après l'arrêt du traitement, les auteurs rapportant une différence non significative, par rapport au placebo, après 5 à 10 ans de suivi et après ≥ 10 ans de suivi3.

Raloxifène versus placebo

La méta-analyse de l'AHRQ conclut que le raloxifène permet de prévenir 9 (3-15) cas de cancer du sein invasif pour 1.000 femmes après 5 ans de traitement3. On compte en outre 7 (0,3-17) cas supplémentaires de TEV et 7 (5-9) fractures vertébrales de moins pour 1.000 femmes. En ce qui concerne le nombre de fractures non vertébrales et de cas de cataracte, aucune différence n’est observée par rapport au placebo.

Cette méta-analyse sur le raloxifène est basée sur 2 RCT menées chez des femmes ménopausées (n = 17.806). Des symptômes vasomoteurs et des crampes dans les jambes étaient les effets indésirables les plus fréquemment observés, par rapport au placebo.​
  • L'étude RUTH (âge moyen 67,5 ans), dont la durée médiane de suivi était de 5,6 ans, a été menée auprès de femmes souffrant d’une coronaropathie ou présentant un risque accru de coronaropathie. L'incidence du cancer du sein constituait l'un des deux critères d'évaluation primaires.
  • L'étude MORE (âge moyen 67 ans) a évalué l'effet préventif du raloxifène sur les fractures chez des femmes atteintes d’ostéoporose, et comptait comme critère d’évaluation secondaire, l'incidence du cancer du sein. L'étude CORE a assuré un suivi plus long d’un sous-groupe de l'étude MORE pour évaluer l'incidence du cancer du sein. La durée médiane de suivi de l'étude MORE/CORE était de 5 à 8 ans.

Tamoxifène versus raloxifène

Dans 1 RCT, le tamoxifène a été directement comparé au raloxifène chez des femmes ménopausées. Dans cette étude, le tamoxifène s'est révélé plus efficace, après une durée médiane de suivi de 6,7 ans : on a compté 5 (1-9) cas de cancer du sein invasif de moins sur 1.000 femmes, par rapport au raloxifène, après 5 ans de traitement. En revanche, le raloxifène n'a pas majoré le risque de cancer de l'endomètre et était associé à un risque moins élevé de TEV par rapport au tamoxifène. On a dénombré 4 (1-7) cas de TEV en moins pour 1.000 femmes.

  • Dans l'étude STAR (n = 19.747, âge moyen 58,5 ans), après 4 ans de suivi, on n’a pas observé de différence entre le tamoxifène et le raloxifène en ce qui concerne le cancer du sein invasif, chez des femmes ménopausées6. Après un suivi d’une durée médiane de 6,7 ans, les données indiquent toutefois une meilleure protection avec le tamoxifène7. Le raloxifène était associé à davantage de problèmes musculo-squelettiques, de dyspareunie et de prise de poids, par rapport au tamoxifène. Tandis que le tamoxifène était associé à davantage de symptômes gynécologiques, de symptômes vasomoteurs, de crampes dans les jambes et de troubles de la fonction vésicale, par rapport au raloxifène.
  • Une analyse effectuée après une durée médiane de suivi de 9,7 ans, publiée uniquement sous forme d’abstract, rapporte pour le raloxifène un risque moins élevé en termes de mortalité totale : RR 0,87 (IC à 95 % 0,75-1,00)8. Une différence qui était à la limite du seuil de signification.

Inhibiteurs de l’aromatase versus placebo

Parmi les inhibiteurs de l'aromatase utilisés dans la prévention primaire du cancer du sein, l'exémestane et l'anastrozole ont chacune fait l’objet d’une RCT (études MAP 3 et IBIS-II)9,10. Les études prévoyaient une durée de traitement de 5 ans. La méta-analyse de l'AHRQ rapporte, pour le groupe des inhibiteurs de l'aromatase, 16 (8-24) cas de moins de cancer du sein invasif sur 1.000 femmes ménopausées après 5 ans de traitement, en comparaison avec le placebo.
Les données à long terme de l'étude IBIS-II sur l'anastrozole ont été publiées après la méta-analyse de l'AHRQ11. Dans l'étude IBIS-II, après une durée médiane de suivi de 10,9 ans (incluant les 5 années de traitement), le nombre de sujets à traiter (NST) était de 29 (voir « plus d'infos »).
Les inhibiteurs de l'aromatase sont associés à des douleurs musculo-squelettiques et de l'ostéoporose, et pourraient être associés à un risque accru de maladies cardiovasculaires. Des RCT menées dans le cadre de la prévention primaire du cancer du sein n'ont toutefois montré aucune augmentation du risque de fractures ou de maladies cardiovasculaires par rapport au placebo.

  • Les effets indésirables suivants ont été le plus fréquemment observés avec les inhibiteurs de l'aromatase, en comparaison avec le placebo : arthralgies, syndrome du canal carpien, raideurs articulaires, symptômes vasomoteurs, sécheresse des yeux et hypertension.
  • Études incluses dans la méta-analyse de l'AHRQ.
    • Dans l'étude MAP 3 (n = 4.560, âge moyen 62,5 ans) sur l'exémestane, la durée médiane de suivi était de 2,9 ans : le nombre de sujets à traiter (NST) pour prévenir un cancer du sein invasif était de 949. La mise en aveugle ayant été levée après cette analyse, une évaluation à plus long terme n'est pas possible.
    • Dans l'étude IBIS-II (n = 3.864, âge moyen 59,5 ans) sur l'anastrozole, la durée médiane de suivi était de 5 ans : le NST pour prévenir un cancer du sein (invasif et non invasif) était de 4310.
  • Les données à long terme de l'étude IBIS-II (publiées après la méta-analyse de l'AHRQ) indiquent un NST de 29, après une durée médiane de suivi de 10,9 ans11. Après 5 ans, le suivi du profil d’innocuité se limitait aux effets indésirables graves, tels que fractures, infarctus du myocarde, TEV et accidents cardiovasculaires. Aucune différence n'a été observée pour ces effets indésirables. Les femmes du groupe traité par anastrozole présentaient un risque plus faible de cancer de la peau non-mélanome.

Tamoxifène versus inhibiteurs de l’aromatase

Il n'existe pas de RCT ayant comparé directement les SERM aux inhibiteurs de l'aromatase. D’après une comparaison indirecte (via une méta-analyse en réseau) dans une Cochrane Review, les inhibiteurs de l'aromatase semblent conférer une plus grande protection contre la survenue d’un cancer du sein12. Les preuves sont cependant de faible qualité.


Commentaire

  • L’hormonothérapie est rarement prescrite en prévention primaire chez les femmes présentant un risque accru de cancer du sein, même aux États-Unis où le tamoxifène et le raloxifène sont approuvés par la FDA (Food and Drug Administration) dans cette indication. Le risque d'effets indésirables graves, en particulier avec le tamoxifène, dans une population en bonne santé, reste une préoccupation majeure, surtout en l'absence d'un bénéfice démontré sur la mortalité. Il existe d’autres obstacles à la mise en place d’un tel traitement préventif, notamment les incertitudes quant aux critères d’éligibilité. La décision doit être prise au cas par cas, après une discussion approfondie et une évaluation du rapport bénéfice/risque individuel.

  • Tous les médicaments antihormonaux peuvent provoquer des effets indésirables (tels que des bouffées de chaleur, des sueurs nocturnes et, pour les inhibiteurs de l'aromatase, également des problèmes articulaires), qui affectent la qualité de vie. La faible observance qui en résulte est un problème bien connu (pas seulement en prévention primaire). Pour une bonne observance, il est important de bien surveiller ces effets indésirables, d’en discuter avec le patient, et de les prendre en charge. On peut parfois opter pour une rotation de médicaments antihormonaux (p.ex. entre le tamoxifène et l'anastrozole). Notons que dans les études, les effets indésirables de type arthralgies et symptômes vasomoteurs survenaient aussi de manière fréquente dans le groupe placebo.


Conclusion

L'effet protecteur de l’hormonothérapie dans la prévention primaire du cancer du sein doit être évalué individuellement, pour chaque patiente, en tenant compte des différents effets indésirables possibles et du fait qu'aucun effet sur la mortalité n'a pu être démontré dans les études disponibles. Cette évaluation doit s’appuyer sur un processus de décision partagée, de façon à ce que la patiente soit pleinement impliquée et bien informée.


Sources

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US Preventive Services Task Force. Medication Use to Reduce Risk of Breast Cancer: US Preventive Services Task Force Recommendation Statement. JAMA. 2019;322(9):857–867.
3 Nelson HD, Fu R, Zakher B, McDonagh M, Pappas M, Stillman L. Medication Use for the Risk Reduction of Primary Breast Cancer in Women: A Systematic Review for the U.S. Preventive Services Task Force [Internet]. Rockville (MD): Agency for Healthcare Research and Quality (US); 2019 Sep. Report No.: 19-05249-EF-1.

4 Verleye L, Desomer A, Gailly J, Robays J. Dépistage du cancer du sein: comment identifier les femmes exposées à un risque accru – Quelles techniques d’imagerie utiliser? Good Clinical Practice (GCP). Bruxelles: Centre fédéral d’expertise des soins de santé (KCE). 2011.KCE Reports 172B. D/2011/10.273/91
5 Cuzick J, Sestak I, Cawthorn S, et al. Tamoxifen for prevention of breast cancer: extended long-term follow-up of the IBIS-I breast cancer prevention trial. Lancet Oncol. 2015 Jan;16(1):67-75.
6 Vogel VG, Costantino JP, Wickerham DL, et al. Effects of tamoxifen vs raloxifene on the risk of developing invasive breast cancer and other disease outcomes: the NSABP Study of Tamoxifen and Raloxifene (STAR) P-2 trial. JAMA. 2006 Jun 21;295(23):2727-41.
7 Vogel VG, Costantino JP, Wickerham DL, et al. Update of the National Surgical Adjuvant Breast and Bowel Project Study of Tamoxifen and Raloxifene (STAR) P-2 Trial: Preventing breast cancer. Cancer Prev Res (Phila). 2010 Jun;3(6):696-706.
8 Wickerham DL, Cecchini RS, Vogel VG, et al. Final updated results of the NRG Oncology/NSABP Protocol P-2: Study of Tamoxifen and Raloxifene (STAR) in preventing breast cancer. Journal of Clinical Oncology 2015;33:1500-.
9 Goss PE, Ingle JN, Alés-Martínez JE, et al. Exemestane for breast-cancer prevention in postmenopausal women. N Engl J Med. 2011 Jun 23;364(25):2381-91.
10 Cuzick J, Sestak I, Forbes JF, et al. Anastrozole for prevention of breast cancer in high-risk postmenopausal women (IBIS-II): an international, double-blind, randomised placebo-controlled trial. Lancet. 2014 Mar 22;383(9922):1041-8.
11 Cuzick J, Sestak I, Forbes JF, et al. Use of anastrozole for breast cancer prevention (IBIS-II): long-term results of a randomised controlled trial. Lancet. 2020 Jan 11;395(10218):117-122.
12 Mocellin S, Goodwin A, Pasquali S. Risk-reducing medications for primary breast cancer: a network meta-analysis. Cochrane Database Syst Rev. 2019 Apr 29;4(4):CD012191.