Traitement en première ligne de la constipation chronique fonctionnelle
La constipation chronique fonctionnelle est une plainte fréquente, surtout chez les femmes et les personnes âgées. Il est important de rappeler que toute modification dans les habitudes de défécation chez un adulte doit faire envisager l’existence d’un cancer colo-rectal ou une autre cause organique. La constipation est le plus souvent fonctionnelle (c.-à-d. sans cause pathologique sous-jacente). De nombreux mécanismes physiopathologiques (transit lent, dyssynergie recto-anale ), seuls ou intriqués, peuvent causer une constipation fonctionnelle chronique. Certaines classes de médicaments tels des opiacés, des médicaments avec des propriétés anticholinergiques, des antagonistes du calcium, des antihypertenseurs à action centrale, des diurétiques, des préparations à base de fer ou de calcium peuvent aussi déclencher ou aggraver une constipation. Mesures hygiénodiététiquesDes mesures hygiénodiététiques simples telles un régime alimentaire riche en céréales complètes, en légumes et en fruits, des boissons abondantes, de l’exercice physique, et une présentation régulière à la selle doivent être encouragées. La relation entre une alimentation pauvre en fibres végétales et la constipation chez l’adulte est bien démontrée. Lorsque l’apport en fibres est faible, il peut être utile de l’augmenter par des suppléments (p. ex. sous forme de son de blé, environ 20 g par jour), et ce en association à une prise suffisante de liquides. Les fibres étant parfois mal supportées (douleur abdominale, flatulence), la dose doit être augmentée progressivement selon les besoins et la tolérance. Traitement médicamenteuxOn distingue 5 classes de laxatifs en fonction de leur mode et de leur rapidité d’action. En ce qui concerne les effets indésirables des laxatifs, nous renvoyons au Répertoire Commenté des Médicaments 2006. Il existe peu d’études comparatives rigoureuses entre les différentes classes de laxatifs. Lorsqu’un traitement médicamenteux s’avère nécessaire, le choix se fera dès lors en fonction de la rapidité d’action souhaitée, de l’évaluation du rapport bénéfice/risque et du coût. Les associations à base de plusieurs laxatifs sont en principe à déconseiller. Laxatifs de lestLes laxatifs de lest sont constitués de fibres ou de mucilages présents dans des graines, des gommes ou des algues hydrophiles non digestibles. Leur mode d’action est comparable à celui des fibres végétales: ils augmentent le volume des selles et leur teneur en eau. Les laxatifs de lest, en association à une prise suffisante de liquides, représentent le traitement de premier choix lorsque les mesures diététiques sont insuffisantes ou difficiles à suivre. Leur effet se manifeste dans un délai de 1 à 3 jours. Laxatifs osmotiques
LubrifiantsLes laxatifs lubrifiants, telle la paraffine par voie orale, ramollissent les selles et en facilitent l’expulsion. Ils sont surtout utilisés pour traiter ou prévenir la formation d’un fécalome. Leur délai d’action est de 6 à 8 heures. L’huile de paraffine est à éviter chez les patients présentant un risque de troubles de la déglutition (risque de pneumonie graisseuse en cas de fausse déglutition). Une utilisation prolongée est déconseillée en raison de la diminution de l’absorption des vitamines liposolubles. Laxatifs de contactLes laxatifs de contact (aussi appelés laxatifs stimulants ou irritants) comportent des dérivés anthraquinoniques d’origine végétale ou synthétique et des dérivés du diphénylméthane tels le bisacodyl et le picosulfate de sodium. Ils agissent en augmentant la sécrétion colique d’eau et d’électrolytes, et en stimulant la motricité colique par une action directe sur la muqueuse, ce qui entraîne rapidement l’évacuation du contenu colique (délai d’action de 5 à 10 heures). Les laxatifs de contact peuvent provoquer des troubles électrolytiques parfois graves pouvant s’accompagner de torsades de pointes chez des patients traités par d’autres médicaments hypokaliémants ou pouvant favoriser l’apparition de torsades de pointes. L’utilisation prolongée de dérivés anthraquinoniques expose aussi à un risque de mélanose colique. Un lien entre l’utilisation chronique de ces dérivés et l’apparition à long terme de certains cancers recto-coliques a été évoqué mais n’a pas été démontré. Il est classiquement admis que l’utilisation chronique de laxatifs de contact peut provoquer des lésions des plexus mésentériques (côlon cathartique), mais cela est mis en doute par certains. Par ailleurs, des cas de dépendance et d’usage abusif de laxatifs de contact sont décrits, notamment en présence de troubles psychiques tels l’anorexie mentale ou la boulimie. L’usage des laxatifs de contact doit en tout cas rester occasionnelle et limitée dans le temps. [N.d.l.r.: plusieurs produits à base de plantes, non enregistrés comme médicaments, ont le même mécanisme d’action et les mêmes effets indésirables que les laxatifs de contact.] Laxatifs à usage rectalLes laxatifs utilisés par voie rectale peuvent agir par différents mécanismes: effet osmotique, stimulant ou lubrifiant. L’intérêt de cette voie d’administration est sa rapidité d’action (5 à 30 minutes); elle est utilisée pendant une courte période en cas d’obstruction rectale par un fécalome. Constipation pendant la grossesseLa constipation est fréquente pendant la grossesse, principalement au cours du premier et du troisième trimestres. Des mesures hygiénodiététiques sont certainement recommandées chez la femme enceinte. La prise de fer pendant la grossesse peut aussi avoir un effet constipant, et il peut être utile de réévaluer la posologie en cas de constipation gênante. Il existe très peu de données concernant l’utilisation de laxatifs pendant la grossesse. Lorsqu’un laxatif s’avère vraiment nécessaire, on optera de préférence pour un laxatif de lest ou un laxatif osmotique non salin (lactulose, lactitol, sorbitol ou macrogol). L’administration d’un laxatif de contact pendant une courte période paraît efficace et sûre, mais la prudence s’impose, notamment au cours du troisième trimestre de la grossesse, étant donné le risque possible de provoquer des contractions utérines. Les laxatifs osmotiques salins sont à déconseiller en raison du risque de rétention sodée; les laxatifs lubrifiants peuvent entraîner une diminution de l’absorption des vitamines liposolubles. Constipation chez l’enfantLa constipation est un problème très fréquent chez l’enfant. Elle est souvent passagère mais elle peut aussi évoluer progressivement vers une constipation chronique. En raison de l’absence d’études suffisantes sur l’utilisation des laxatifs chez l’enfant, le traitement de la constipation dans cette tranche d’âge repose essentiellement sur l’expérience clinique.
Références principales
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