Traitement par l’hormone de croissance


Abstract

Chez l’enfant, le rapport coût/efficacité d’un traitement par l’hormone de croissance est favorable en cas de déficience en cette hormone, de syndrome de Turner, d’insuffisance rénale chronique et dans le syndrome de Prader-Willi. En dehors de ces indications, l’utilisation de cette hormone ne devrait se faire que dans le cadre d’études cliniques.

Chez l’adulte, l’administration d’hormone de croissance peut améliorer certaines manifestations cliniques de la déficience en cette hormone, mais ses effets à long terme sur la morbidité, la mortalité et la qualité de vie ne sont pas connus. Un tel traitement ne peut être envisagé qu’en présence d’une insuffisance sévère.


Le traitement par l’hormone de croissance (somatropine) chez l’enfant et chez l’adulte a fait l’objet de plusieurs articles récents. La déficience en hormone de croissance est une affection qui a d’abord été décrite chez l’enfant, et le traitement substitutif a été pendant longtemps réservé aux enfants qui présentaient un retard de croissance dû à une déficience en cette hormone. Actuellement, l’hormone de croissance est également utilisée dans d’autres indications chez l’enfant, et elle est aussi utilisée chez l’adulte [voir aussi Folia de mai et de novembre 1999 ].


Traitement chez l’enfant

Les indications dans lesquelles un traitement par l’hormone de croissance se justifie chez l’enfant sont actuellement les suivantes.

  • Déficience en hormone de croissance. L’ intérêt de l’hormone de croissance a été clairement démontré dans plusieurs études randomisées contrôlées. L’ hormone de croissance doit être administrée le plus rapidement possible après le diagnostic; environ 90% des enfants ainsi traités atteindront la taille adulte prévue. Une fois la taille adulte atteinte, le traitement est arrêté.
  • Syndrome de Turner. L’effet de l’hormone de croissance sur l’augmentation de la taille finale est plus faible que dans la déficience en hormone de croissance et requiert des doses plus élevées. [N.d.l.r.: Dans une étude de cohorte réalisée en Belgique chez des enfants avec un syndrome de Turner traités par des doses supraphysiologiques d’hormone de croissance, un gain de 7,9 cm en ce qui concerne la taille finale a été obtenu par rapport à ce qui était attendu dans le syndrome de Turner.]
  • Insuffisance rénale chronique. Il ressort d’une méta-analyse que le traitement par l’hormone de croissance accélère la croissance au cours de la première année, mais la durée optimale d’un tel traitement et son effet sur la taille finale ne sont pas connus.
  • Syndrome de Prader-Willi (associant petite taille, obésité, hypotonie et difficultés d’apprentissage). Un effet bénéfique à court terme sur l’hypotonie, la composition corporelle et la croissance a été observé dans des études non randomisées, mais l’effet sur la taille adulte n’est pas connu.

En cas de petite taille idiopathique, ou accompagnant un retard de croissance intra-utérine ou une dysplasie squelettique, l’effet de l’hormone de croissance sur la taille adulte finale est faible ou méconnu, et les bénéfices psychologiques et relatifs à la qualité de vie ne sont pas clairs. Une telle utilisation ne devrait être envisagée que dans le cadre d’études cliniques contrôlées.


Traitement chez l’adulte

Depuis quelques années, il a été constaté que la déficience en hormone de croissance chez l’adulte pouvait être à l’origine d’une série de manifestations cliniques regroupées sous le nom de &quot syndrome de déficience en hormone de croissance &quot. Ce syndrome se caractérise essentiellement par une obésité abdominale et viscérale, une diminution de la masse musculaire et de la force musculaire, une ostéopénie, une intolérance au glucose associée à une résistance à l’insuline, des troubles lipidiques, une diminution de la résistance à l’effort ainsi qu’une diminution de la qualité de vie. Un traitement substitutif par l’hormone de croissance a dès lors aussi été proposé chez l’adulte, à des doses toutefois plus faibles que chez l’enfant (de 200 à 1.000 μg p.j.), mais son efficacité et son innocuité sont controversées.

  • Les défenseurs du traitement par l’hormone de croissance s’appuient sur des résultats favorables observés sur la composition corporelle, la masse osseuse, la mortalité cardio-vasculaire, la force musculaire et la qualité de vie, ainsi que sur le risque faible d’effets indésirables avec les doses faibles d’hormone de croissance actuellement utilisées chez l’adulte.
  • Les opposants à ce traitement estiment qu’il n’est pas clairement prouvé que la déficience en hormone de croissance soit responsable d’une augmentation de la mortalité cardio-vasculaire et des divers symptômes décrits ci-dessus. Bien que des effets favorables aient été observés, ceux-ci sont souvent modestes, et on ne dispose pas d’étude sur les bénéfices et les risques à long terme. Ils attirent également l’attention sur le fait que d’autres médicaments, par ex. les diphosphonates ou les statines, peuvent être aussi efficaces, plus faciles d’utilisation et moins onéreux dans la prise en charge de certaines manifestations du syndrome de déficience en cette hormone.

L’ auteur d’un éditorial paru à ce sujet souligne la complexité tant du diagnostic que du traitement de la déficience en hormone de croissance chez l’adulte. Il conclut que, dans l’attente de données à long terme, notamment sur la mortalité, le traitement par l’hormone de croissance chez l’adulte devrait être réservé aux patients avec une déficience sévère en cette hormone. [N.d.l.r.: celle-ci se définit comme une déficience prononcée en hormone de croissance associée à une déficience d’au moins une autre hormone hypophysaire (à l’exclusion de la prolactine), secondaire à une affection hypothalamo-hypophysaire, et démontrée par au moins un test de stimulation.] Dans les autres cas, les troubles cardio-vasculaires et l’ostéopénie peuvent être mieux traités par d’autres médicaments.


Effets indésirables

Les effets indésirables de l’hormone de croissance biosynthétique consistent le plus souvent en des réactions locales transitoires au site d’injection. Un oedème périphérique, des arthralgies et des myalgies ont été rapportés. Une hypertension intracrânienne bénigne, bien que rare, doit être suspectée en cas de céphalées, nausées, vomissements ou troubles visuels [voir aussi Folia de mai 1998]. L’hormone de croissance peut provoquer une résistance à l’insuline [voir aussi Folia d’ avril 2001 ]. A long terme, elle pourrait, surtout à doses élevées, augmenter le risque de cancer mais des études de suivi s’avèrent nécessaires.

D’après

  • Why give a child growth hormone? Drug Ther Bull 40 : 17-20(2002)
  • Why start an adult on growth hormone? Drug Ther Bull 40 : 75-78(2002)
  • W. Isley: : Growth hormone therapy for adults: not ready for prime time? Ann Intern Med 137 : 190-196(2002)
  • D. Cook: Shouldn’t adults with growth hormone deficiency be offered growth hormone replacement therapy? Ann Intern Med 137 : 197-201(2002)
  • L. Frohman: Controversy about treatment of growth hormone-deficient adults: a commentary (éditorial). Ann Intern Med 137 : 202-203(2002)

Noms de spécialités


Hormone de croissance biosynthétique: Genotonorm, Humatrope Norditropin Saizen Zomacton

  • Dans une étude de cohorte ayant inclus 1.848 patients au Royaume-Uni, une augmentation statistiquement significative du risque de cancer colorectal et de maladie de Hodgkin a été observée après traitement par l’hormone de croissance [ Lancet 360 : 273-277(2002) ]. Ces résultats reposent toutefois sur un très faible nombre de cas et ne permettent dès lors pas de tirer des conclusions définitives. D’autres études s’avèrent indispensables pour évaluer le risque de cancer lié à un traitement par l’hormone de croissance.
  • Le Belgian Study Group for Pediatric Endocrinolgy (BSGPE) a également publié récemment un article de synthèse sur le traitement par l’hormone de croissance chez l’enfant dans le Tijdschr voor Geneeskd [58 : 1463-1469(2002)].