Traitement médicamenteux de l’endométriose

Le traitement médicamenteux de l' endométriose a déjà fait l' objet d' un article dans les Folia d’août 1994. Cette mise à jour est basée entre autres sur une publication parue dans Drug and Therapeutics Bulletin. Les posologies mentionnées sont celles qui figurent dans les notices belges.


Introduction

Les estimations de l' incidence de l' endométriose varient de 6 à 44% des femmes en âge de procréer. L' endométriose peut se présenter sous diverses formes cliniques dont les plus fréquentes sont: dysménorrhée, dyspareunie, douleur cyclique au niveau de l' abdomen ou du bassin, et sous-fertilité. En l' absence de traitement, l' endométriose évolue chez environ un tiers des patientes, mais reste stable ou régresse chez les autres patientes.

La nature et la durée du traitement dépendent des plaintes de la patiente, ainsi que de la localisation et de l' étendue de l' endométriose. L' objectif du traitement est de supprimer les symptômes en réduisant ou en faisant disparaître l' endomètre ectopique. Le traitement peut être chirurgical, hormonal ou associer ces deux approches. La chirurgie (principalement par voie endoscopique ces dernières années) est surtout indiquée dans l' endométriose tumorale (endométriomes ovariens et endométriose profonde infiltrante). Le traitement hormonal consiste en principe à induire une aménorrhée et une atrophie de l' endomètre ectopique. Cela peut se faire par inhibition de l' hypophyse et dès lors de la production ovarienne d' estrogènes, et/ou par un effet hormonal direct sur l' endomètre ectopique. Un traitement médicamenteux peut parfois s' avérer nécessaire pendant plusieurs années. Il ne fait qu' arrêter le processus de la maladie mais ne fait pas disparaître l' endométriose.


Quels médicaments?

Les médicaments les plus utilisés sont: le danazol, la gestrinone, les analogues de la gonadoréline, les progestatifs et les contraceptifs estroprogestatifs.

Le danazol et la gestrinone inhibent la sécrétion des gonadotrophines au niveau de l' hypophyse, et ont aussi des effets androgéniques, antiestrogéniques et antiprogestatifs généralement responsables d' une aménorrhée. Les effets indésirables les plus gênants sont dus aux effets androgéniques et consistent entre autres en une prise de poids, de l' hirsutisme, de l' acné, des troubles de l' humeur, et rarement une modification de la voix. Pour le danazol, la posologie est de 200 à 800 mg par jour par voie orale en 2 à 4 prises, généralement pendant 6 mois. Pour la gestrinone, la posologie est de 2,5 mg deux fois par semaine par voie orale, généralement pendant 6 mois.

Les analogues de la gonadoréline comportent la buséréline (en spray nasal), la goséréline (en préparation dépôt sous-cutanée), la leuproréline (en injection intra- musculaire), la nafaréline ( en spray nasal) et la triptoréline (en injection intra- musculaire). Ces médicaments inhibent, après une courte période de stimulation, la sécrétion des gonadotrophines hypophysaires. Ils sont à l' origine d' une anovulation, d' une diminution des taux d' estrogènes et, généralement, d' une aménorrhée. Pendant la phase initiale de stimulation, des kystes ovariens peuvent apparaître et nécessiter l' arrêt du traitement [n.d.l.r.: ces kystes disparaissent le plus souvent spontanément]. Les effets indésirables des analogues de la gonadoréline sont dus aux faibles taux d' estrogènes et comprennent des bouffées de chaleur, une atrophie vaginale et, à long terme, une diminution de la densité osseuse; celle-ci diminue en effet de 4 à 6% au niveau des vertèbres dorsales après un traitement de 6 mois par un analogue de la gonadoréline. La durée du traitement de l' endométriose est généralement limitée à 6 mois. Les analogues de la gonadoréline sont parfois utilisés pendant une plus longue période en association à un traitement &quotadd-back&quot [n.d.l.r.: un progestatif, à faibles doses, est ajouté en continu, en association ou non a un estrogène]. Ce traitement permet de réduire de moitié la perte de densité osseuse [n.d.l.r.: et prévient aussi l' atrophie génitale en cas d' association à un estrogène]. Le traitement &quotadd- back&quot diminue aussi les bouffées de chaleur lors d' un traitement par un analogue de la gonadoréline, mais est sans effet sur la douleur. Six mois après l' arrêt du traitement, la densité osseuse ne diffère pas entre les patientes ayant suivi ou non le traitement &quotadd-back&quot.

Parmi les progestatifs, l' acétate de médroxyprogestérone, la dydrogestérone, la noréthistérone [n.d.l.r.: ainsi que le lynestréno1] sont utilisés. Les effets indésirables consistent en des saignements irréguliers, une sensation de gonflement et, avec l' acétate de médroxyprogestérone [n.d.l.r.: ainsi qu' avec la noréthistérone et le lynestrénol], en une prise de poids. Des effets androgéniques peuvent survenir surtout avec la noréthistérone [n.d.l.r.: et le lynestrénol].Les posologies recommandées sont les suivantes:

  • acétate de médroxyprogestérone: 30 mg p.j. per os en 3 prises pendant 90 jours consécutifs,
  • dydrogestérone: 20 à 40 mg par jour en continu;
  • noréthistérone: 10 à 20 mg p.j. per os pendant 4 à 6 mois ou plus.
  • [N.d.l.r.: lynestrénol: 5 à 10 mg p.j. pendant au moins 6 mois.]

La prise cyclique de contraceptifs estroprogestatif (généralement 20 à 35 μg d' éthinylestradiol par jour en association à un progestatif) peut diminuer les menstruations, et atténuer ainsi les symptômes d' endométriose. Une prise continue est parfois aussi recommandée pour éviter les menstruations. [N.d.l.r.: les contraceptifs oraux ne sont cependant pas des médicaments de premier choix dans le traitement de l' endométriose étant donné que les estrogènes stimulent la prolifération de l' endomètre et donc aussi de l' endométriose, voir aussi Folia d’août 1994.]

Lors d' un traitement par la gestrinone [n.d.l.r.: ainsi que par certains progestatifs, et dans certains cas, avec le danazol], une contraception non-hormonale doit être assurée.


Efficacité


Soulagement de la douleur

Des études contrôlées par placebo ont montré un soulagement de la douleur avec l' acétate de médroxyprogestérone, le danazol, la leuproréline et la dydrogestérone. Dans des études comparatives (analogues de la gonadoréline versus danazol, contraceptifs oraux ou gestrinone; danazol versus contraceptifs oraux ou gestrinone), aucune différence d' efficacité n' a été observée en ce qui concerne le soulagement de la dysménorrhée, de la dyspareunie et de la douleur au niveau du bassin.


Réduction du volume des endométriomes

Dans des études randomisées pendant 6 mois, le danazol fût aussi efficace que la triptoréline et la buséréline en ce qui concerne la réduction du diamètre des kystes: une réduction d' un peu plus de 50% a été observée avec les différents médicaments.


Influence sur la fertilité

Chez les femmes présentant une sous-fertilité et une endométriose avérée, un traitement de 6 mois par le danazol, la buséréline, l' acétate de médroxyprogestérone ou la gestrinone n' était pas plus efficace qu' un placebo quant au nombre de grossesses. Dans des études comparant le danazol à un autre médicament inhibant la fonction ovarienne (buséréline, gestrinone, nafaréline, goséréline ou un contraceptif estroprogestatif), aucune différence quant au nombre de grossesses ne fut observée entre les différents traitements.

D' après

  • Managing Endometriosis. Drug Ther Bull 37 : 25-29(1999)

Noms de spécialités

Analogues de la gonadoréline


buséréline: Suprefact

goséréline: Zoladex

leuproréline: Lucrin Dépôt

nafaréline: Synarel

triptoréline: Decapeptyl

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Danazol: Danatrol


Gestrinone: Dimetrose

Progestatifs


acétate de médroxyprogestérone: Farlutal Provera

dydrogestérone: Duphaston

lynestrénol: Orgametril

noréthistérone: Primolut-Nor

Dans les Folia d’ août 1994, il est mentionné que les progestatifs sont un premier choix dans le traitement des formes légères à modérées d' endométriose. A ce propos, il faut signaler qu' une distinction doit être faite en fonction de la durée du traitement et des symptômes que l' on souhaite traiter. En cas de traitement intensif d' une endométriose grave, soit primaire, soit après une intervention chirurgicale, un traitement par un des médicaments cités plus haut à la dose mentionnée est indiqué. Lors d' un traitement chronique en raison de douleurs ou d' autres symptômes (sauf la sous-fertilité) attribuables à l' endométriose, le choix se portera plutôt sur les progestatifs classiques à faibles doses; celles-ci peuvent être adaptées en fonction des résultats et des effets indésirables éventuels. Les posologies recommandées sont par exemple: 5 à 10 mg p.j. d' acétate de médroxyprogestérone, 10 mg p.j. de dydrogestérone, 5 mg p.j. de noréthistérone, 5 mg p.j. de lynestrénol.