Réaction du CBIP à une publication de La Revue Prescrire
La revue indépendante française La Revue Prescrire a publié début 2013, sous le titre " Pour mieux soigner: des médicaments à écarter ", une liste1 de médicaments disponibles en France qui, selon la rédaction de Prescrire, devraient être retirés du marché. Il s'agit de médicaments dont le rapport bénéfice/risque est négatif, avec pour chacun de ces médicaments un commentaire précis sur leurs avantages et inconvénients. Ce document a été rendu public et a suscité un grand intérêt au sein de la presse grand public en France.
Bien que le CBIP soutienne pleinement La Revue Prescrire dans ses efforts pour diffuser une information indépendante sur les médicaments, la rédaction du CBIP émet toutefois quelques réserves vis-à-vis de cette " liste noire ". Elle en a fait part dans un courrier des lecteurs, signé par les rédacteurs en chef du CBIP, qui a été publié dans le numéro d’octobre 2013 de La Revue Prescrire2, et dont nous résumons ci-dessous les principaux points.
- Le CBIP partage entièrement l’avis que les médicaments obsolètes, dont le rapport bénéfice/risque est négatif, doivent être retirés du marché sans délai.
- De même, pour certains produits plus récents dont les risques supplémentaires paraissent évidents (comme pour le fénofibrate ou le nimésulide) et pour lesquels il existe des alternatives plus sûres, ou pour des médicaments dont l’effet n’a pas été suffisamment prouvé (comme l’aliskirène), le CBIP partage aussi l’avis de la rédaction de Prescrire, à savoir qu’il est préférable de ne pas les utiliser.
- Le CBIP estime toutefois, contrairement à la rédaction de Prescrire, que des médicaments de deuxième choix peuvent parfois avoir une place dans certains cas spécifiques, comme par exemple en cas d’intolérance ou de contre-indication au traitement standard qui est en principe à privilégier.
- Etant donné que l’enregistrement de nombreux médicaments récents ne repose que sur des études contrôlées par placebo, sans que l’on dispose d’études comparatives ou d’études menées dans la pratique journalière, il est souvent difficile de déterminer leur place par rapport au traitement standard utilisé depuis longtemps. De plus, les données disponibles sur ces médicaments ne concernent généralement que des critères d’évaluation intermédiaires, et non des critères d’évaluation cliniquement pertinents: c’est le cas, par exemple, de certains antidiabétiques récents, dont l’effet sur le contrôle de la glycémie a été prouvé mais dont l’impact sur les complications liées au diabète n’a pas été étudié. Le CBIP ne partage toutefois pas l’avis de la rédaction de Prescrire selon laquelle les médicaments pour lesquels on ne dispose pas de telles données devraient être immédiatement retirés du marché. En l’absence de preuves d’ infériorité de ces médicaments, et tant qu’il n’y a pas de preuves de leur supériorité, ces médicaments ne doivent être utilisés qu’avec la prudence requise et seulement dans certains cas sélectionnés. S’il apparaît, lors d’études ultérieures, que ces nouveaux médicaments ont une plus-value sur des critères d’évaluation cliniquement pertinents, ils peuvent devenir de précieuses options dans l’arsenal thérapeutique.
En résumé, on peut dire que le CBIP soutient pleinement la rigueur méthodologique avec laquelle La Revue Prescrire rédige ses dossiers depuis des décennies. La rédaction du CBIP estime toutefois que, dans certains cas, les conclusions formulées par notre organisation- soeur méritent d’être plus nuancées.
1Document pouvant être téléchargé librement, sous forme de fichier pdf, sur
www.prescrire.org/fr/3/31/48400/0/NewsDetails.aspx
2
La Revue Prescrire 2013; 33 (360): 792-5
|