Nouveautés 2008, état de la question 5 ans plus tard: aliskirène, busserole, exénatide et sitagliptine, fésotérodine, mélatonine, nabumétone, rétapamuline, rimonabant, natalizumabLe présent article propose une mise à jour des connaissances, 5 ans après leur commercialisation, d’un certain nombre de médicaments mis sur le marché en 2008. Comme dans l’article " Nouveautés 2007 : état de la question 5 ans plus tard " paru dans les Folia de janvier 2013 , nous discutons ici d’une sélection de médicaments, notamment ceux ayant un impact dans la pratique générale. Aliskirène
L’aliskirène (Rasilez®) est le premier représentant des inhibiteurs directs de la rénine agissant, tout comme les inhibiteurs de l'enzyme de conversion de l'angiotensine (IECA) et les sartans, sur le système rénine-angiotensine. L’aliskirène est proposé en monothérapie ou en association à d’autres antihypertenseurs dans le traitement de l’hypertension artérielle [voir Folia de mai 2008 ]. L’efficacité de l’aliskirène sur les chiffres tensionnels est comparable à celle des IECA et des sartans, mais contrairement à ceux-ci, on ne dispose pas de données avec l’aliskirène sur la morbidité ou la mortalité. L’aliskirène n’est pas indiqué dans le traitement de l’insuffisance cardiaque chronique ni en cas de néphropathie chronique. Le profil d’effets indésirables de l’aliskirène et les précautions d’usage en ce qui concerne le risque d’hypotension, d’hyperkaliémie et d’insuffisance rénale sont comparables à ceux des IECA et des sartans. Des cas d’angioedème ont aussi été rapportés avec l’aliskirène, et la prudence s’impose chez les patients ayant déjà présenté un angioedème sous IECA ou sartan. L’association d’aliskirène à un IECA ou un sartan (double inhibition du système rénine- angiotensine) a été discutée dans les Folia de septembre 2013 et ne se justifie pas. Une telle association n’apporte aucun bénéfice thérapeutique en termes de cardio- et néphroprotection chez des patients à risque ni en ce qui concerne la mortalité, et est de plus associée à un risque accru d’effets indésirables cardio-vasculaires et rénaux. [ Folia de mars 2011 , juin 2012 et septembre 2013 ; Australian Prescriber 2009; 32: 132-5 ; Cochrane Database Syst Rev 2011; 9 . CD007066 (DOI:10.1002/14651858. CD007066.pub2); Farmacotherapeutisch Kompas via www.fk.cvz.nl ; La Revue Prescrire 2012; 341: 173; 349: 820; 350: 85] BusseroleMême 5 ans après l’introduction de cet extrait de feuillesd’Arctostaphylos uva-ursi (syn. busserole; Urocystil®), des preuves d’efficacité et d’innocuité manquent toujours, et il n’y a pas d’arguments en faveur de ce produit dans la prise en charge des symptômes de cystite non compliquée. Exénatide et sitagliptine
L’exénatide (Byetta®) et la sitagliptine (Januvia®) sont les premiers représentants d’une nouvelle classe d’antidiabétiques agissant sur l’hormone incrétine glucagon-like peptide-1 (GLP-1); il s’agit d’une hormone intestinale qui assure le contrôle glycémique en ralentissant la vidange gastrique, en diminuant la libération du glucagon et en stimulant la libération d’insuline glucosedépendant par le pancréas [voir Folia de février 2008 ]. On distingue d’une part les analogues du GLP-1(exénatide, liraglutide et lixisénatide), qui sont administrés en injection souscutanée, et d’autre part les inhibiteurs de la DPP-4 ou gliptines (sitagliptine, saxagliptine, vildagliptine, linagliptine), qui sont administrés par voie orale. La question qui se pose est de savoir quelle est la place de ces classes d’antidiabétiques dans la prise en charge du diabète de type 2. Selon les recommandations de l’American Diabetes Association (ADA) et l’European Association for the Study of Diabetes (EASD) discutées dans les Folia de mai 2013 , les analogues du GLP-1 et les inhibiteurs de la DPP-4 y sont des antidiabétiques de deuxième choix, c.-à-d. en cas d’efficacité insuffisante de la metformine, ou de contre-indication ou d’intolérance à celle-ci, en particulier chez les patients chez qui les hypoglycémies ou la prise de poids constituent une préoccupation majeure. Par rapport aux autres antidiabétiques, les médicaments agissant sur l’hormone incrétine n’entraînent pas de prise de poids et provoquent moins d’hypoglycémies, mais 5 ans après leur commercialisation, on ne dispose pas de données suffisantes quant à leur effet sur la mortalité ou sur les complications à long terme du diabète. Deux études parues récemment, réalisées dans le cadre de l’évaluation de l’innocuité cardio-vasculaire des antidiabétiques, exigée par la FDA, n’ont pas montré de diminution ni d’augmentation des évènements cardio-vasculaires avec les inhibiteurs de la DPP-4 saxagliptine et alogliptine (non disponible en Belgique) sur une période de 1,5 à 2 ans [voir Folia de novembre 2013 ]. Des études de plus longue durée sont en cours. Il convient également de tenir compte du coût plus élevé des nouveaux antidiabétiques par rapport aux médicaments plus anciens, de leurs effets indésirables (surtout des troubles gastrointestinaux; voir 5.1.6. et 5.1.7. dans le Répertoire) et des incertitudes quant à leur innocuité à long terme. L’EMA a procédé récemment à une évaluation du risque potentiel de pancréatite et de cancer du pancréas avec les médicaments augmentant l’effet incrétine et a conclu qu’un lien de causalité n’est pas prouvé. La prudence reste toutefois de mise chez les patients avec des antécédents de pancréatite ou d’abus d’alcool. [ Folia de septembre 2013 ; www.ema.europa.eu/docs/en_GB/document_library/Press_release/2013/07/WC500146619.pdf ] Fésotérodine
La fésotérodine (Toviaz®) est un spasmolytique anticholinergique proposé dans le Résumé des Caractéristiques du Produit (RCP) pour le traitement de l’incontinence urinaire d’urgence [voir Folia de décembre 2008 ]. Elle est rapidement hydrolysée en un métabolite actif identique à celui de la toltérodine. A l’instar des autres anticholinergiques, l’efficacité de la fésotérodine dans la prise en charge de l’incontinence urinaire est limitée, et aucune plus-value n’a été démontrée par rapport à la toltérodine ou aux autres anticholinergiques. Le choix du traitement se fera en fonction de la tolérance du patient aux effets indésirables et du coût. [Fiche de transparence "Incontinence urinaire "; Cochrane Database Syst Rev 2012; ; CD005429 (doi:10.1002/14651858.CD005429.pub2.; La Revue Prescrire 2012; 349: 812] Mélatonine
La mélatonine est enregistrée sous le nom de spécialité Circadin® pour le traitement à court terme de l’insomnie primaire (c.-à-d. sans cause sous-jacente) chez les patients de 55 ans ou plus [voir Folia de février 2008 ]. L’efficacité de la mélatonine dans les troubles du sommeil est cependant peu étayée, et on ne dispose pas d’études comparatives entre la mélatonine et les benzodiazépines ou les Z-drugs; dans une comparaison indirecte, la mélatonine est apparue moins efficace que le zolpidem. Bien que la mélatonine semble inoffensive à court terme, son efficacité et son innocuité à long terme ne sont pas connues; un risque de dépendance à long terme ne peut donc être exclu. La mélatonine expose à un risque d’interactions pharmacodynamiques, entre autres avec l’alcool et les médicaments à effet sédatif, et d’interactions pharmacocinétiques avec entre autres une augmentation des taux de mélatonine avec les inhibiteurs du CYP1A2 (tels que la fluvoxamine, la cimétidine, les estrogènes et estroprogestatifs, les quinolones). [Fiche de transparence " Insomnie "; Farmacotherapeutisch Kompas via www.fk.cvz.nl ; La Revue Prescrire 2012; 32: 413] NabumétoneLa nabumétone (Gambaran®) est un anti-inflammatoire non stéroïdien (AINS) commercialisé en Belgique depuis mai 2008, mais qui existe depuis une vingtaine d’années dans d’autres pays. Il s’agit d’une prodrogue qui est rapidement métabolisée en un métabolite actif proche du naproxène. La nabumétone n’est indiquée que dans le traitement symptomatique des maladies musculo-squelettiques. Selon une Revue Cochrane, la nabumétone n’a pas de place dans la prise en charge de la douleur postopératoire vu l’absence de preuves d’efficacité. Il n’est pas prouvé que la nabumétone ait un avantage en termes d’effets indésirables par rapport à d’ autres AINS tels que l’ibuprofène ou les AINS COX-2 sélectifs. [ Cochrane Database Syst Rev 2010; 12 . CD007548 (DOI:10.1002/14651858. CD007548.pub2); Farmacotherapeutisch Kompas via www.fk.cvz.nl ] Rétapamuline
La rétapamuline (Altargo®) est un antibiotique à usage topique proposé depuis juin 2008 dans le traitement de courte durée (5 jours) des infections superficielles de la peau (telles que impétigo, plaies infectées) chez l’adulte et l’enfant à partir de l'âge de 9 mois. Il s’agit du premier dérivé de la pleuromutiline à usage humain; cette classe d’antibiotiques est utilisée depuis longtemps en médecine vétérinaire. Les données disponibles indiquent que la rétapamuline est aussi efficace dans les infections superficielles de la peau par des germes tels que Staphylococcus aureus et Streptococcus pyogenes que les autres antibiotiques à usage topique (acide fusidique, mupirocine) et que la céfalexine par voie orale. La rétapamuline n’est pas indiquée en cas d’infection due ou pouvant être due à un Staphylococcus aureus méticillino-résistant (MRSA); la mupirocine est ici le traitement de premier choix. En raison de son mode d’action, la rétapamuline expose à un faible risque de résistance croisée avec d’autres antibiotiques à usage topique. Ses effets indésirables sont rares et consistent essentiellement en des réactions locales dues à la présence de l’excipient butylhydroxytoluène. [ Cochrane Database Syst Rev 2012; 1 . CD003261 (DOI:10.1002/14651858. CD003261.pub3); Martindale The Complete Drug Reference] RimonabantLe rimonabant (Acomplia®) est un antagoniste des récepteurs cannabinoïdes de type 1 qui a été enregistré et commercialisé en janvier 2008 pour le traitement de l’obésité, et retiré du marché en décembre 2008 en raison de ses effets indésirables neurologiques et psychiatriques (incluant dépression et tendances suicidaires). [ Folia de février et décembre 2008 ; Pharma Selecta 2010; 20] NatalizumabLe natalizumab (Tysabri®) est un anticorps monoclonal proposé, à raison d’une injection intraveineuse par mois, dans le traitement des formes très actives de sclérose en plaques avec alternance de poussées et de rémissions en cas d’échec des autres traitements [voir Folia de février 2008 ]. Il n’est toutefois pas prouvé que le natalizumab soit plus efficace que les interférons β, et il expose à des effets indésirables parfois graves tels qu’une leucoencéphalite ou des réactions d’hypersensibilité. [ Folia de mars 2009 ; La Revue Prescrire 2013; 352: 141] |