Tiotropium: aussi dans l’asthme ?


Abstract

Le tiotropium, un anticholinergique à longue durée d'action, est utilisé dans la BPCO. On s'intéresse à l'usage du tiotropium comme traitement adjuvant dans l'asthme sévère. Deux études ont été publiées récemment à ce sujet. Des études complémentaires s'avèrent toutefois nécessaires avant de pouvoir déterminer la place exacte du tiotropium dans l'asthme.

Le tiotropium, un anticholinergique à longue durée d’action, est utilisé depuis plusieurs années déjà dans la BPCO. Un traitement d’entretien par le tiotropium ou par un autre bronchodilatateur à longue durée d’action est recommandé chez les patients atteints de BPCO moyennement sévère à très sévère (stade II à IV), lorsqu’une dyspnée se manifeste lors des activités quotidiennes malgré l’utilisation selon les besoins (c.-à-d. lorsque les symptômes l’exigent) d’un bronchodilatateur à courte durée d’action [Recommandations de GOLD 2011 (via www.goldcopd.org ) et Répertoire Commenté des Médicaments, chapitre 4.1.]

On s’intéresse actuellement aussi à l’usage du tiotropium comme traitement adjuvant (" add-on ") chez les patients atteints d’asthme sévère. Les résultats de deux études randomisées en double aveugle, de méthodologie identique, ont été publiées récemment. Ces études ont évalué le tiotropium chez des patients asthmatiques (âge moyen 53 ans) qui présentaient une obstruction persistante des voies aériennes malgré un traitement par un corticostéroïde inhalé + un β2-mimétique à longue durée d’action [ NEJM 2012; 367: 1198-207 (doi:10.1056/NEJMoa1208606)]. Le tiotropium sous forme d’aérosol doseur (Spiriva Respimat®), associé à un corticostéroïde inhalé + un β2-mimétique à longue durée d’action, a retardé l’apparition d’une première exacerbation sévère, par rapport à un traitement uniquement par un corticostéroïde inhalé + un β2-mimétique à longue durée d’action (délai de 282 jours contre 226 jours), et a exercé de plus un effet favorable modeste sur le VEMS.

L’auteur d’un éditorial à ce sujet [ NEJM 2012; 367: 1257-9 (doi:10.1056/NEJMe1209381)] attire l’attention sur un certain nombre de limites de ces études. Les études concernaient des patients atteints d’une obstruction persistante des voies aériennes. Or, il n’est pas facile de distinguer les patients asthmatiques présentant une obstruction persistante des voies aériennes et les patients atteints de BPCO, ce qui pourrait expliquer la bonne réponse aux anticholinergiques dans ces études. Les résultats ne peuvent donc pas être simplement généralisés aux patients présentant un asthme réversible.

Par ailleurs, dans le cadre de la BPCO, il existe des suspicions d’une mortalité accrue avec le tiotropium sous forme d’aérosol doseur (Spiriva Respimat®); la prudence est donc de rigueur, surtout chez les patients atteints de troubles du rythme cardiaque [voir Folia de janvier 2012 et Brit Med J 2012; 345: e7390 (doi:10.1136/bmj.e7390)]. Les deux études sur le tiotropium dans l’asthme ne révèlent pas d’augmentation de la mortalité, mais les patients qui avaient des antécédents de maladies cardiaques en étaient exclus. L’usage du tiotropium dans l’asthme n’est pas repris comme indication dans le Résumé des Caractéristiques du Produit (RCP) de Spiriva® et n’est pas mentionné non plus dans les dernières recommandations de GINA concernant l’asthme ( www.ginasthma.org ) ou de la British Thoracic Society (sur www.sign.ac.uk ). Des études complémentaires s’avèrent nécessaires avant de pouvoir déterminer la place exacte du tiotropium dans l’asthme, et dans l’attente de celles-ci, l’usage de tiotropium dans l’asthme n’est pas conseillé.