Pharmacovigilance: isotrétinoïne et effets indésirables psychiatriques

Depuis de nombreuses années, on rapporte régulièrement des cas de troubles psychiatriques (incluant dépression et tendances suicidaires) chez des patients traités par l’isotrétinoïne (Roaccutane® et génériques).

Dans les Folia de mars 2006 , on décrivait 7 cas de dépression avec l’isotrétinoïne dont un suicide, rapportés au Centre de pharmacovigilance entre 1998 et 2005. Depuis, 7 nouveaux cas de dépression, éventuellement accompagnée de tendances suicidaires, ont été rapportés au Centre avec ce médicament. L’évolution a été généralement favorable à l’arrêt du traitement.

La plupart des études épidémiologiques réalisées jusqu’à présent n’ont pourtant pas mis en évidence de relation de causalité entre l’isotrétinoïne et ces troubles psychiatriques, notamment en raison du fait que l’acné sévère constitue elle-même une pathologie pouvant être associée à un risque accru de dépression et de tendances suicidaires.

En revanche, une étude de cohorte rétrospective [ Brit Med J 2010; 341: c5812 , avec un éditorial Brit Med J : c5866 ] montre une augmentation statistiquement significative du risque de tentative de suicide pendant un traitement par l’isotrétinoïne et au cours des 6 mois suivant l’arrêt de ce traitement. Les investigateurs estiment cependant que ces données ne permettent pas d’établir une relation de causalité, notamment en raison de l’observation d’une légère augmentation du risque de tentative de suicide au cours des 3 ans précédant le début du traitement et de l’absence de données quant à l’effet du traitement. Certains cas de tentatives de suicide pourraient en effet être liés à l’absence d’efficacité de l’isotrétinoïne. Ces résultats ne permettent donc pas de tirer des conclusions définitives mais incitent toutefois à surveiller l’apparition éventuelle de signes de dépression chez les patients traités par l’isotrétinoïne, en particulier chez ceux qui ont des antécédents de troubles psychiatriques. Vu les risques liés au traitement, il est important d’en évaluer la balance bénéficesrisques pour chaque patient en particulier, et de réserver l’isotrétinoïne aux cas d’acné sévère résistante aux autres traitements [voir aussi Folia de juillet 2005 ].