Thrombopénie induite par l’héparine

L’héparine non fractionnée et les héparines de faible poids moléculaire peuvent être à l’origine de deux types de thrombopénie.

  • La thrombopénie de type I est fréquente, légère (> 50.000 plaquettes/ mm3), dépendante de la dose et généralement transitoire. Elle survient en général dans les 5 premiers jours du traitement et est probablement due à un effet direct sur les plaquettes.
  • La thrombopénie de type II ("heparin-induced thrombocytopenia" ou HIT) est plus rare mais plus grave (< 50.000 plaquettes/mm3, complications thrombotiques fréquentes), et est probablement d’origine immunitaire (présence d’anticorps HIT). L’HIT survient généralement 5 à 10 jours après le début du traitement; elle survient plus rapidement en cas d’exposition à une héparine dans les mois qui précèdent. Le risque est supérieur avec l’héparine non fractionnée qu’avec les héparines de faible poids moléculaire, mais des réactions croisées sont possibles. L’arrêt du traitement s’impose.

Depuis 1990, le Centre Belge de Pharmacovigilance a enregistré 12 cas de thrombopénie après administration d’une héparine. Chez 8 patients, la numération plaquettaire était connue et variait de 11.000 à 77.000/ mm3. Chez 6 patients, le diagnostic d’HIT a été posé. Deux de ces 6 cas d’HIT, publiés dans Acta Clinica Belgica [55 : 176-181(2000)] , font état de complications thrombotiques, et le passage au danaparoïde sodique a permis la remontée du taux des plaquettes. Un des autres cas d’HIT concerne une femme ayant présenté comme complication une nécrose graisseuse du sein; ce cas a aussi été publié [ Eur Radiol 10 : 527-530(2000) ]. Neuf des 12 cas concernaient une héparine de faible poids moléculaire. Les données de pharmacovigilance spontanée ne permettent cependant pas de comparer l’incidence des thrombopénies observées respectivement avec une héparine non fractionnée et avec une héparine de faible poids moléculaire.

Le risque de thrombopénie lors d’un traitement de longue durée par héparine nécessite un contrôle régulier du taux de plaquettes mais les recommandations à ce sujet ne sont pas univoques. Le " College of American Pathologists " [ Arch Pathol Lab Med 126 : 1415-1423(2002) ] recommande de contrôler les plaquettes entre le 4ème et au moins le 10ème jour de traitement selon les modalités suivantes:

  • tous les deux jours chez les patients à haut risque (p.ex. patients sous héparine non fractionnée en postopératoire),
  • moins fréquemment chez les patients avec un risque modéré (p.ex. patients sous faibles doses d’héparine de faible poids moléculaire en postopératoire).

Un contrôle systématique n’est pas recommandé chez les patients à faible risque (p.ex. patients sous héparine de faible poids moléculaire dans un contexte non chirurgical). Chez un patient exposé à l’héparine dans les 100 jours qui précédent, un contrôle des plaquettes débutera 24 heures après la reprise du traitement. En cas d’antécédents d’HIT au cours du traitement par une héparine, une autre héparine ne peut être utilisée qu’après avoir exclu, par un test in vitro, l’agrégation des plaquettes dans le plasma du patient au contact de l’héparine.