Usage thérapeutique du cannabis


Abstract

Un intérêt se porte sur l’utilisation de dérivés du cannabis à des fins thérapeutiques. Sur base des données disponibles, leur utilisation dans le traitement de la douleur et dans celui des nausées et vomissements induits par la chimiothérapie, ne se justifie pas étant donné leur faible efficacité et le risque d’effets indésirables. Leur utilisation à des fins thérapeutiques ne devrait être envisagée que dans le cadre d’études cliniques contrôlées.

Le British Medical Journal a publié récemment les résultats de deux revues systématiques d’études randomisées contrôlées concernant l’utilisation de dérivés du cannabis (nabilone, dronabinol ou tétrahydrocannabinol, par voie orale; levonantradol par voie intramusculaire). La première étude concerne l’utilisation du cannabis dans la prise en charge de la douleur, et la seconde étude concerne l’utilisation du cannabis dans le traitement des nausées et vomissements induits par une chimiothérapie.

  • Dans la première revue systématique, l’efficacité de dérivés du cannabis a été analysée dans la douleur: la douleur aiguë postopératoire, la douleur chronique non-cancéreuse et la douleur cancéreuse. Les résultats montrent que les dérivés du cannabis, administrés par voie intramusculaire ou orale, sont plus efficaces qu’un placebo mais ne sont pas plus efficaces que la codéine à une dose d’environ 60 à 120 mg par voie orale. Aucune étude n’a été réalisée avec le cannabis inhalé. Etant donné ce faible effet antalgique et le risque élevé d’effets indésirables tels sédation, somnolence, euphorie, dysphorie, dépression, hallucinations, vertiges, et hypotension artérielle, les auteurs concluent que les dérivés du cannabis n’ont pas de place dans le traitement de la douleur. Des études rigoureuses s’avèrent nécessaires pour préciser la place des dérivés du cannabis dans les affections spastiques et les douleurs neuropathiques.
  • Dans la seconde revue systématique, l’effet antiémétique de dérivés du cannabis a été analysé dans les nausées et vomissements induits par une chimiothérapie Les résultats montrent qu’en cas de chimiothérapie modérément émétisante, les dérivés du cannabis, administrés par voie intramusculaire ou orale, sont légèrement plus efficaces que les antiémétiques classiques (alizapride, dompéridone, métoclopramide), et que d’autres susbtances telles l’halopéridol ou certaines phénothiazines. En cas de chimiothérapie fortement émétisante, ils sont cependant moins efficaces que les antiémétiques classiques, et il n’existe pas d’études comparatives avec les antagonistes des récepteurs 5HT3. On ne dispose pas non plus d’études avec le cannabis inhalé. Les dérivés du cannabis sont associés à un risque élevé d’effets indésirables, notamment au niveau du système nerveux central, même lorsqu’ils sont utilisés à court terme par voie orale ou intramusculaire. Les auteurs concluent que la place des dérivés du cannabis est limitée par le risque d’effets indésirables parfois graves.

L’auteur d’un éditorial paru dans le même numéro conclut que, sur base des données actuelles, le rapport bénéfice/risques des dérivés du cannabis est défavorable, et que leur utilisation à des fins thérapeutiques ne devrait être envisagée que dans le cadre d’études cliniques contrôlées.

D’après:

  • E. Kalso: Cannabinoids 323 : 2-3(2001)
  • F. Campbel et al: Are cannabinoids an effective and safe treatment option in the management of pain? A qualitative 323 : 13-16(2001)
  • M. Tramer et al.: Cannabinoids for control of chemotherapy induced nausea and vomiting: quantitative systematic 323 : 16-21(2001)

Note de la rédaction

Ces revues systématiques ont fait l’objet de plusieurs lettres de lecteurs dans un numéro ultérieur du Brit Med J [323 : 1249-1251(2001)]. Il y est écrit entre autres qu’on ne dispose que de peu d’études randomisées contrôlées rigoureuses et qu’il est dès lors difficile de tirer des conclusions précises.