Corticothérapie dans les infections aiguës de la sphère ORL
Abstract |
Dans la plupart des infections aiguës de la sphère ORL, l’administration d’une corticothérapie par voie générale ne paraît pas justifiée. Dans la laryngite sous-glottique aiguë chez l’enfant, l’administration d’une dose unique de corticostéroïdes par voie intramusculaire ou orale ou en inhalation diminue la gravité des symptômes à court terme ainsi que la durée de l’hospitalisation mais il n’est pas prouvé qu’un tel traitement réduise le risque de complication grave. Il convient en outre de tenir compte du risque d’effets indésirables des corticostéroïdes, notamment en cas d’administrations répétées.
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Les infections aiguës de la sphère otorhinolaryngologique (ORL) telles rhinite, sinusite, otite, pharyngite, laryngite et épiglottite, se manifestent généralement par des symptômes (douleur, obstruction) dus à l’inflammation, ce qui conduit certains praticiens à utiliser des corticostéroïdes par voie générale. Cet article discute des preuves disponibles quant à l’efficacité de la corticothérapie par voie générale dans ces différentes indications.
- Dans la rhinite non allergique, la sinusite et l’otite moyenne aiguës, on ne dispose d’aucune étude sur l’effet des corticostéroïdes par voie générale. Leur utilisation par voie locale est controversée et a donné des résultats contradictoires. [N.d.l.r.: une étude récente [
JAMA 286 : 3097-3105(2001) ] rapporte toutefois un effet du fluticasone par voie nasale chez des patients présentant une rhinite chronique ou une sinusite récidivante, et des symptômes de rhinosinusite aiguë.]
- Dans la pharyngite aiguë, deux études randomisées contrôlées par placebo en double aveugle ont montré un effet modéré de la corticothérapie par voie générale sur l’intensité et la durée de la douleur. Les conséquences pratiques de ces résultats sont toutefois limitées en l’absence d’études comparatives avec un analgésique, tel le paracétamol ou l’ibuprofène, fréquemment utilisé dans cette situation. En cas de pharyngite aiguë due à une mononucléose infectieuse, il n’est pas non plus recommandé d’administrer des corticostéroïdes sauf lorsque l’hypertrophie des amygdales est telle qu’elle risque d’entraîner une obstruction des voies respiratoires.
- Dans l’épiglottite aiguë (ou laryngite supraglottique aiguë), une corticothérapie par voie générale est parfois administrée dans le but de réduire l’oedème et le risque d’arrêt respiratoire par asphyxie. Ce traitement d’urgence n’a cependant pas fait l’objet d’études randomisées comparatives et on ne dispose pas de preuve quant à un bénéfice de la corticothérapie en terme de survie et de pronostic [n.d. l.r.: l’administration de corticostéroïdes ne se justifie donc pas]. Chez l’enfant, l’épiglottite aiguë est une affection grave dont la prise en charge nécessite une hospitalisation immédiate, l’administration d’un antibiotique par voie intraveineuse ainsi qu’une intubation et l’administration éventuelle d’oxygène. [N.d.l.r.: en cas de suspicion d’épiglotitte, il convient de veiller à ce que l’environnement soit calme, et d’éviter toute manipulation au niveau de la gorge en l’absence d’un anesthésiste].
- Dans la laryngite sous-glottique aiguë (ou faux croup) chez l’enfant, une méta-analyse récente de 24 études randomisées réalisée par la Cochrane Collaboration, a montré que l’administration d’une dose unique d’un corticostéroïde (0,6 mg/kg de dexaméthasone par voie orale ou intramusculaire, ou 2 mg de budésonide en aérosol) est associée à une diminution statistiquement significative de la gravité des symptômes après 6 heures d’évolution ainsi que de la durée passée dans le service d’urgence. Cet effet favorable n’était cependant plus statistiquement significatif après 24 heures d’évolution. Les résultats de cette méta-analyse n’ont pas montré de différence statistiquement significative d’efficacité entre les différentes voies d’administration et entre les doses de dexaméthasone utilisées (0,15 mg/kg, 0,30 mg/kg ou 0,60 mg/kg) [n.d.l.r.: en Belgique, il n’existe cependant pas de suspension orale de dexaméthasone pour l’administration chez l’enfant]. On ne dispose pas de données justifiant l’administration de corticostéroïdes dans les formes mineures de laryngite comportant seulement une voix rauque et une toux. [N.d.l.r.: le traitement de la laryngite sous-glottique en général a été discuté dans les
Folia de mai 1999 ].
Les effets indésirables des corticostéroïdes paraissent rares en cas de prise unique ou de traitement de courte durée. Lors de l’administration de doses élevées de corticostéroïdes pendant une courte période, de rares cas de varicelle grave et d’ostéonécrose de la hanche ont toutefois été rapportés. Des réactions d’hypersensibilité telles crises d’asthme, urticaire, choc anaphylactique ont aussi été décrites dans de rares cas, en particulier avec certaines spécialités injectables contenant des agents conservateurs. L’utilisation répétée de corticostéroïdes lors d’infections fréquentes peut exposer le patient aux risques d’une corticothérapie de longue durée, par ex. l’inhibition de l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénal.
D’après:
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Corticothérapie dans les infections aiguës de la sphère ORL.,
La Revue Prescrire 21 : 531-534(2001)
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Laryngite aiguë de l’enfant: les corticosteroïdes peu efficaces.
La Revue Prescrire 20 : 780(2000)
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