• Moyennant une préparation et un suivi, la pratique du Ramadan est parfois possible pour certains patients diabétiques. Pour ce faire, la concertation préalable (quelques semaines avant) entre le patient qui souhaite participer au Ramadan et son médecin est primordiale.
  • La condition principale pour le patient diabétique qui souhaite pratiquer le Ramadan est la stabilité de son diabète et de son traitement au moment d’entamer la phase de jeûne.
  • La metformine, qui reste le premier choix dans le diabète de type 2, permet une adaptation des moments de prises avec un impact minimum sur le contrôle du diabète.
  • Si le patient est insuffisamment contrôlé avec la metformine en monothérapie et qu’il prend d’autres médicaments :
    – Pour les médicaments à risque d’hypoglycémie (insuline, sulfamidés hypoglycémiants et glinides), la dose doit être adaptée et un suivi glycémique rapproché est de rigueur.
    – Les médicaments plus récents peuvent offrir certains avantages (tels que moins de prises nécessaires, un moindre risque d’hypoglycémies, …), mais uniquement pour les patients déjà stabilisés avec ces molécules avant d’entamer la période de jeûne et moyennant certaines précautions. En particulier l’hydratation est importante chez les patients qui reçoivent un inhibiteur du SGLT2.
  • Pour les patients traités par insuline, des protocoles d’adaptation des doses sont disponibles (voir Informations complémentaires). Il est essentiel que le traitement soit stable et que le patient maîtrise bien la gestion de sa maladie et de son traitement.

Introduction

En Belgique, le diabète est plus fréquent au sein de la population musulmane et l’approche du Ramadan, qui débute le 28 février (ou le 1er mars) prochain, soulève des questions de prise en charge. Depuis la publication de notre article dans les Folias d’avril 2016, de nombreux changements ont été réalisés dans le traitement du diabète, rendant une mise à jour particulièrement utile.
La pratique du Ramadan implique une limitation de la prise alimentaire à 2 périodes, la première (Sahur) juste avant le lever du soleil et la seconde (Iftar) après le coucher du soleil, entrecoupées par une longue période de jeûne. D’un point de vue médical, il est généralement conseillé aux patients diabétiques d’éviter le jeûne, en particulier en cas de diabète de type 1, de diabète instable ou mal contrôlé, ainsi que chez les femmes enceintes diabétiques, en raison du risque de complications. De nombreux musulmans atteints de diabète souhaitent tout de même participer au Ramadan, que ce soit pour des raisons spirituelles, par solidarité avec leurs proches, ou parce qu’ils ne se perçoivent pas comme malades. Il est donc important d’être en mesure d’accompagner au mieux les patients diabétiques dans leur démarche.

Evaluation individuelle du risque et préparation du patient

Deux guidelines1, 2 récents offrent des outils précieux aux médecins pour mieux accompagner ces patients souffrant de diabète et désireux de pratiquer le Ramadan.
Une consultation préparatoire plusieurs semaines avant le Ramadan est essentielle pour :

  • Déterminer le risque individuel de complications, en tenant compte des antécédents du patient, des caractéristiques de son diabète et des traitements médicamenteux en cours. Cette évaluation, réalisée dans le cadre d’une décision partagée (shared decision-making), permet de déterminer le degré de risque du patient.

    • s’il est faible, le jeûne est probablement sûr.

    • s’il est modéré, le risque associé au jeûne est incertain et nécessite une surveillance accrue.

    • s’il est élevé, le jeûne est déconseillé.

    • Le jeûne reste fortement déconseillé2 dans certaines situations :

      • Dans le diabète de type 12, notamment en cas d’hypoglycémies fréquentes ou sous schéma insulinique complexe1,

      • Dans le diabète de type 2 avec comorbidités sévères ou complications importantes (telles qu’hypoglycémies fréquentes),

      • Chez les femmes enceintes atteintes de diabète préexistant ou gestationnel, en raison des risques pour la mère et le fœtus.

  • Préparer le patient au jeûne c’est-à-dire :

    • Informer le patient sur les modalités d’adaptations quotidiennes nécessaires de son alimentation, de son activité physique et de son traitement.

    • organiser un suivi de la glycémie.

    • et planifier les ajustements éventuels des médicaments.

Une consultation afin de dresser le bilan après le Ramadan peut être utile pour préparer au mieux les futures périodes de jeûne.

Adaptations thérapeutiques

  • Metformine : Aucune adaptation de dose n’est nécessaire, mais il est conseillé de répartir les prises sur les deux repas quotidiens.

  • Sulfamides hypoglycémiants ou glinides : un changement vers une molécule à moindre risque d’hypoglycémie peut être envisagé, selon les caractéristiques du patient et les critères de remboursement. Si ces traitements sont maintenus, une réduction de dose et un suivi glycémique rapproché sont indispensables.

  • Insuline : pour les patients souhaitant jeûner malgré tout, des protocoles d’adaptation des doses sont disponibles. Il est essentiel que le traitement soit stable au préalable et que le patient maîtrise bien la gestion de sa maladie et de son traitement. Lors de la période du Ramadan, un suivi rigoureux et un protocole clair d’adaptation des doses  doivent être établis en concertation avec le patient (voir Informations complémentaires).

  • Autres traitements :

    • Les autres antidiabétiques ne nécessitent pas d’adaptation de dose, la plupart du temps, mais leur prise, lorsqu’elle est orale, doit être répartie sur les périodes de rupture du jeûne (voir Informations complémentaires).

    • Certains analogues du GLP1 injectables offrent en outre l’avantage d’une administration hebdomadaire (dulaglutide, sémaglutide).

    • Les inhibiteurs du SGLT-2 (gliflozines) ne sont plus déconseillés, mais ils nécessitent une vigilance accrue (éducation du patient et monitoring régulier) en raison du risque de déshydratation et d’acidocétose diabétique.

  • Dans tous les cas, les patients doivent être stables sous leur traitement avant d’envisager le jeûne. Il est déconseillé d’introduire un nouveau médicament juste avant ou durant cette période, d’où l’importance d’une préparation minutieuse.

Informations complémentaires

Pour plus d’informations, notamment sur l’évaluation du risque individuel ou la répartition, selon les classes thérapeutiques, des prises médicamenteuses lors des périodes de rupture de jeûne, ainsi que les protocoles d’adaptation des doses en cas de traitement avec l’insuline, consulter (en libre accès) :

Conclusions

Moyennant une préparation et un suivi adéquats, la pratique du Ramadan est possible pour certains patients diabétiques. Ils doivent bien sûr en discuter au préalable avec leur médecin qui déterminera leur degré de risque individuel de complications. La condition essentielle, pour pouvoir pratiquer le Ramadan, est que leur diabète et leur traitement soient stables au moment de commencer la période de jeûne.

 Sources

International Diabetes Federation and the DAR International Alliance. Hassanein M, Afandi B, Yakoob Ahmedani M, et al. Diabetes and Ramadan: Practical guidelines 2021. Diabetes Res Clin Pract. 2022 Mar;185:109185. doi: 10.1016/j.diabres.2021.109185. Epub 2022 Jan 8. PMID: 35016991.
Ibrahim M, Davies MJ, Ahmad E, et al. Recommendations for management of diabetes during Ramadan: update 2020, applying the principles of the ADA/EASD consensus. BMJ Open Diabetes Res Care. 2020 May;8(1):e001248. doi: 10.1136/bmjdrc-2020-001248. PMID: 32366501; PMCID: PMC7223028.