Voyages et médicaments: mise à jour


Abstract

Plusieurs sujets, tels les vaccinations, la prévention de la malaria, la diarrhée du voyageur, le risque de complications thrombotiques lors d’un voyage, le mal d’altitude, les réactions cutanées dues à des piqûres d’insectes ou à l’exposition au soleil, la pharmacie de voyage ont été discutés dans le numéro thématique des Folia "Voyages et médicaments" [voir Folia de mai 2001 ]. L’objectif de cet article n’est pas de reprendre en détail ces différents points mais de proposer, le cas échéant, une actualisation des recommandations.


Vaccinations

Les recommandations mentionnées dans les Folia de mai 2001 concernant les vaccinations sont toujours d’application (voir aussi http://www.itg.be ). Les informations suivantes peuvent toutefois être ajoutées.

  • En ce qui concerne les vaccinations de base, outre la vaccination contre le tétanos, la diphtérie, la poliomyélite, la vaccination contre la rougeole (une seule injection) est également recommandée, et ce avant un voyage dans un pays du tiers monde chez les personnes non vaccinées, nées après 1980, et n’ayant pas présenté de rougeole clinique.
  • Les vaccinations contre l’hépatite A et contre l’hépatite B nécessitent plusieurs injections, et il n’est pas rare que les patients oublient certaines de celles-ci. Il est actuellement admis qu’en principe "toute injection compte" (même après plusieurs années) et que le schéma de vaccination peut donc être poursuivi là où il a été interrompu.
  • Il faut également signaler que le fait d’être déjà vacciné contre les méningocoques du groupe C – ce qui fait maintenant partie du calendrier des vaccinations en Belgique – ne constitue pas une contre-indication pour la vaccination par le vaccin tétravalent contre les méningocoques des groupes A, C, W et/ou Y lorsque celle-ci est indiquée.

Prévention de la malaria

Comme mentionné dans les Folia de mai 2001, éviter les piqûres de moustiques, entre autres au moyen de produits répulsifs à base de DEET (voir plus loin), est la première mesure à prendre pour la prévention de la malaria. Quant à la prophylaxie médicamenteuse, il faut rappeler qu’aucun médicament n’est efficace à 100% et que le choix de l’antimalarique dépend du risque de contamination, de la résistance du parasite et du risque d’effets indésirables du traitement. Les médicaments actuellement indiqués pour la prévention de la malaria sont les suivants.

  • Chloroquine: 300 mg par semaine en 1 prise en zone A; 300 mg par semaine en 1 prise en association au proguanil en zone B; 100 mg par jour en association au proguanil en zone C.
  • Proguanil: 200 mg par jour, toujours en association à la chloroquine.
  • Méfloquine: 250 mg par semaine.
  • L’association d’atovaquone et de proguanil: 1 comprimé par jour.
  • Doxycycline: 100 mg par jour.

[Voir http://www.itg.be/itg/Uploads/MedServ/malaria2003.jpg ].

L’association d’atovaquone et de proguanil (MALARONE), disponible depuis quelques années en Belgique, est aussi efficace que la méfloquine et est en outre très bien supportée. Son coût élevé limite toutefois son utilisation, surtout en cas de voyages prolongés. Etant donné que le traitement doit être débuté un jour avant l’arrivée dans la zone endémique et doit être poursuivi jusqu’à 7 jours après le départ, cette association peut être proposée comme prophylaxie en cas de séjours courts dans une zone à haut risque ou en cas de changement inattendu d’itinéraire. L’association d’atovaquone et de proguanil est également une alternative en cas d’intolérance à la méfloquine.

Il ressort d’une étude randomisée, contrôlée, en double aveugle que, parmi les antimalariques utilisés en prophylaxie, l’association d’atovaquone et de proguanil, et la doxycycline sont les mieux supportés [ Brit Med J 327 : 1078(2003) ]. Pour les effets indésirables des antimalariques, nous renvoyons au Folia de mai 2001 .


Eviter les piqûres d’insectes

Outre la malaria, d’autres maladies telles l’encéphalite japonaise, l’encéphalite à tiques, la maladie de Lyme (voir ailleurs dans ce numéro), la dengue, sont transmises par des piqûres de moustiques ou de tiques. Il est dès lors recommandé aux voyageurs de se protéger des piqûres d’insectes par le port de vêtements clairs couvrant les bras et les jambes, l’utilisation de moustiquaires (éventuellement imprégnées de perméthrine ou de deltaméthrine) et l’application toutes les 6 heures de produits répulsifs à base de DEET (N,N-diéthyl-3- méthylbenzamide) à 20-50% (20-30% chez les enfants et les femmes enceintes). Les produits répulsifs à base de DEET offrent une protection plus longue et plus efficace que les autres produits répulsifs synthétiques ou ceux à base de plantes [ N Engl J Med 347 : 13-18(2002) ].


Protection de la peau par des crèmes solaires

L’utilisation régulière d’une quantité suffisante (2 mg/cm2) d’un écran solaire à indice élevé de protection tant vis-à-vis des rayons UVA que des UVB est recommandée en prévention des coups de soleil et des cancers cutanés [voir Folia de juin 2000 et mai 2001 ]. L’efficacité des crèmes solaires peut être diminuée par le vent, la chaleur, l’humidité, la sudation et l’altitude, ainsi que lors de l’usage simultané de produits répulsifs à base de DEET. Il est dès lors conseillé de mettre le répulsif au moins 1 à 2 heures après la crème solaire, et de prévoir dans ces cas des mesures de protection supplémentaires contre les UV. Par ailleurs, il ressort d’une méta-analyse récente que l’utilisation de crèmes solaires en soi ne semble pas augmenter le risque de mélanome, comme cela a parfois été suggéré [Ann. Ann Intern Med 139 : 966-978(2003) ].


Risque de complications thrombotiques lors d’un voyage

Dans les Folia de mai 2001 et février 2002 , on mentionne que le risque de complications thrombotiques lors d’un voyage ne peut être exclu, surtout chez les personnes avec des facteurs de risque (par ex. obésité, thrombophilie, usage de contraceptifs oraux). Plusieurs études récentes confirment une association entre les vols de longue distance et les affections thrombo-emboliques, même chez les patients avec un risque faible à modéré [ Arch Intern Med 163 : 2674-2767, : 2759-2764, : 2766-2774(2003); Lancet 362 : 2039-2044(2003) ]. Bien que l’augmentation de risque thrombo-embolique observée soit statistiquement significative, le risque absolu reste toutefois faible.

Une hydratation suffisante, le port éventuel de bas de contention et la réalisation de mouvements autant que possible sont des mesures préventives utiles. D’autres études s’avèrent nécessaires pour préciser la place d’autres mesures préventives telles l’administration d’acide acétylslicylique ou d’une héparine de faible poids moléculaire. Dans le commentaire du Comité d’Evaluation des Pratiques Médicales en Matière de Médicaments sur les conclusions du jury de la réunion de consensus du 5 novembre 2002 [joint aux Folia de février 2004], il est écrit: "Bien que l’efficacité d’un traitement préventif ne soit actuellement pas prouvée, on peut prendre en considération l’administration d’une HBPM chez les patients à haut risque."


Prévention du mal d’altitude

Outre les mesures générales d’acclimatisation, une prophylaxie médicamenteuse peut être envisagée en présence de facteurs de risque (antécédents de mal d’altitude, affection cardio-vasculaire) ou lorsqu’une ascension rapide est inévitable. L’acétazolamide (125 à 250 mg 2 x p.j.) est dans ce cas le médicament de premier choix. Le traitement doit être débuté au moins un jour avant l’ascension et poursuivi jusqu’à ce que l’acclimatisation soit jugée suffisante. Les effets indésirables les plus fréquents de l’acétazolamide sont des paresthésies et une augmentation de la diurèse; des réactions allergiques sont possibles. L’administration de dexaméthasone (4 mg toutes les 6 heures) n’est pas un premier choix en raison de ses effets indésirables, et est à réserver pour les patients intolérants ou allergiques à l’acétazolamide. On ne dispose pas de preuves suffisantes quant à l’effet préventif de médicaments tels l’acide acétysalicylique, le Ginkgo biloba, la spironolactone, le furosémide, la nifédipine [ Brit Med J 326 : 915-919(2003) ]. Dans une étude récente, le Ginkgo biloba n’a pas été plus efficace à cette fin qu’un placebo [ Brit Med J 328 : 797-799(2004) ].

D’après

  • Rapport de la réunion de consensus du Groupe d’Etude Scientifique de la Médecine des Voyages, sous l’auspice du Conseil Supérieur d’Hygiène – section vaccinations (version juillet 2003), via http://www.itg.be ou directement via http://www.itg.be/itg/Uploads/MedServ/fcmedinf.pdf
  • A. Spira: Preparing the traveller. Lancet 361 : 1368-1381(2003)