Traitement du tremblement essentiel


Abstract

Le tremblement essentiel est un tremblement d’action, asymétrique, qui se manifeste le plus souvent chez la personne âgée. Dans les cas invalidants, un traitement médicamenteux peut être envisagé mais la réponse thérapeutique est très variable. Bien qu’il n’existe pas de recommandations précises, la primidone et le propranolol sont en général considérés comme traitements de premier choix. La gabapentine et les benzodiazépines sont parfois utilisées en deuxième intention. L’approche chirurgicale peut être envisagée en dernier recours.

Le tremblement essentiel est une affection héréditaire qui se manifeste, le plus souvent après 65 ans mais parfois aussi chez le sujet jeune, par un tremblement d’action, généralement asymétrique, affectant surtout les mains, et parfois aussi la tête, le tronc, les jambes ou la voix. Le diagnostic repose sur l’anamnèse et l’examen clinique; il n’existe pas de tests biologiques ou radiologiques, ni de marqueurs pathologiques. Il convient de faire la différence entre le tremblement essentiel et l’exacerbation du tremblement physiologique par ex. suite à la consommation de caféine, au tabagisme, à l’éthylisme, à la prise de médicaments (par ex. lithium, prednisone, lévothyroxine, (â2 mimétiques, acide valproïque, inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine), ou à certaines affections (par ex. l’hyperthyroïdie). Le diagnostic différentiel doit aussi être fait avec d’autres affections pouvant être responsables d’un tremblement d’action, telles la maladie de Parkinson, ou la maladie de Wilson qui survient généralement chez le sujet plus jeune.

Un traitement médicamenteux n’est indiqué que dans les cas où le tremblement est important et invalidant. Chez 25 à 55% des patients, il n’y a cependant pas d’amélioration. Cet article discute, sur base des résultats des études randomisées contrôlées en double aveugle avec placebo, pour la plupart cependant de petite taille, des différents traitements proposés.


Traitements de premier choix

  • Plusieurs études contrôlées par placebo ont montré que le propranolol (à une dose d’au moins 120 mg p.j.) entraîne une diminution significative de l’intensité du tremblement [n.d.l.r.: dans un certain nombre de cas, une dose moindre s’avère suffisante]. Les préparations à libération prolongée sont aussi efficaces que celles à libération normale. Le propranolol est plus efficace que les â1 -bloquants dits cardiosélectifs tels l’aténolol et le métoprolol. Il convient cependant de tenir compte de ses effets indésirables et contre-indications telles l’asthme, l’insuffisance cardiaque, le diabète et les blocs auriculo-ventriculaires. [N.d.l.r.: en Belgique, le tremblement essentiel figure comme indication dans la notice pour les spécialités INDERAL, PROPRANOLOL EG et PROPRAPHAR, à base de propranolol.]
  • Dans plusieurs études, la primidone, un antiépileptique apparenté aux barbituriques, a été, à des doses pouvant atteindre 750 mg p.j., plus efficace qu’un placebo. Il est recommandé de commencer par une faible dose (62,5 mg p.j.) et d’augmenter celle-ci progressivement. Même avec des doses initiales faibles, de la sédation, des nausées et vomissements ainsi que de l’ataxie peuvent survenir et conduire à l’arrêt du traitement.

Dans une étude contrôlée par placebo ayant comparé la primidone (750 mg p.j.) et le propranolol (120 mg p.j.), la réduction moyenne de l’intensité du tremblement a été de 76% chez les patients traités par la primidone, et de 60% chez les patients traités par le propranolol, différence qui n’est pas statistiquement significative; la primidone semblait toutefois mieux tolérée à long terme que le propranolol.


Traitements de deuxième choix

  • Dans deux études, l’antiépileptique gabapentine , à des doses élevées (de 1,2 à 3,6 g p.j.), a diminué de manière significative les tremblements, et dans une de celles-ci, l’effet était comparable au propranolol. La gabapentine est en général bien tolérée. [N.d.l.r.: d’autres études à petite échelle ont également montré un effet favorable avec l’antiépileptique tiagabine; il convient toutefois de tenir compte du coût élevé de ces médicaments].
  • Il a été suggéré que les benzodiazépines peuvent avoir un effet bénéfique sur le tremblement essentiel. Dans une étude randomisée contrôlée, l’alprazolam (à raison de 0,75 à 2,75 mg p.j.) a entraîné une diminution significative du tremblement. Comme toutes les benzodiazépines, l’alprazolam présente un risque de vertiges, de sédation et de dépendance.
  • D’autres médicaments tels certains antagonistes du calcium ou la théophylline , ont aussi été proposés dans le traitement du tremblement essentiel. Leurs effets sont cependant très variables, et les données disponibles proviennent d’études de petite taille dans lesquelles l’existence de biais ne peut être exclue.

L’approche chirurgicale, par ex. thalamotomie ou stimulation électrique au niveau du cerveau, peut être une alternative dans certains cas.


Conclusion

Sur base des données disponibles, la primidone et le propranolol apparaissent comme les traitements de premier choix du tremblement essentiel. La gabapentine et les benzodiazépines sont des traitements de deuxième choix. Les données relatives aux antagonistes du calcium et à la théophylline sont insuffisantes.

D’après

  • E. Louis: Essential tremor. N Engl J Med 345 : 887-891(2001)