L’ amfébutone (bupropion) pour faciliter l’arrêt du tabagisme

La substitution nicotinique, associée à un accompagnement comportemental, favorise l’arrêt du tabagisme [voir Folia d’avril 2000]. Récemment, l’amfébutamone (bupropion) a été mis sur le marché pour cette même indication, également en association à un accompagnement. L’amfébutamone, développé au départ comme antidépresseur, inhibe la recapture de la noradrénaline et de la dopamine. Il n’est pas apparenté chimiquement aux autres antidépresseurs, mais bien à l’amfépramone (diéthylpropion), un stimulant central. Son mécanisme d’action dans l’arrêt du tabagisme reste incertain.

Jusqu’à présent, les résultats de deux études cliniques ont été publiés. Dans ces études, l’efficacité de l’amfébutamone a été étudiée chez des volontaires motivés; ces personnes ont reçu en plus du médicament une forme d’accompagnement individuel de courte durée. La prise de l’amfébutamone, administré par voie orale sous forme d’une préparation à libération prolongée, à débuté 8 jours avant la date fixée pour arrêter de fumer.

  • Dans la première étude publiée en 1997, l’amfébutamone a été comparé à un placebo pendant 7 semaines chez 615 fumeurs. Le pourcentage d’arrêt du tagabisme après un an était de
    • 12,4% dans le groupe placebo,
    • 19,6% chez ceux qui avaient reçu 100 mg p.j. d’amfébutamone,
    • 22,9% chez ceux qui avaient reçu 150 mg p.j. d’amfébutamone,
    • 23,1% chez ceux qui avaient reçu 300 mg p.j.
  • Les résultats des groupes ayant reçu 150 et 300 mg étaient significativement différents de ceux du groupe placebo.
  • Dans la deuxième étude publiée en 1999, l’amfébutamone a été administré pendant 9 semaines: à raison de 150 mg p.j. pendant les trois premiers jours, puis de 300 mg par jour. L’amfébutamone a été comparé chez 893 patients à un placebo, à la nicotine par voie transdermique et à l’association de celle-ci et de l’amfébutamone. Le pourcentage d’arrêt du tabagisme après un an était de
    • 15,6% dans le groupe placebo,
    • 16,4% dans le groupe sous nicotine,
    • 30,3% dans le groupe sous amfébutamone,
    • 35,5% dans le groupe recevant l’association amfébutamone-nicotine.
    • Dans cette étude, l’amfébutamone était significativement plus efficace que le placebo ou que la nicotine seule; la différence d’efficacité entre le groupe sous amfébutamone et le groupe recevant l’association amfébutamone-nicotine n’était pas statistiquement significative. Suite à la publication de ces résultats, une lettre d’un lecteur publiée dans le New England Journal of Medicine fait remarquer que l’efficacité du patch de nicotine rapportée dans cette étude est moindre par rapport à ce qui est classiquement décrit. L’auteur de cette lettre ne remet pas en question l’efficacité de l’amfébutamone, mais il estime que, sur base des résultats de cette étude comparative, il est trop tôt pour se prononcer quant à la valeur comparative du patch de nicotine et de l’amfébutamone.

    Dans ces deux études, la prise de poids qui survient à l’arrêt du tabagisme a été moins marquée avec l’amfébutamone que dans le groupe placebo; cet effet était cependant limité à la durée du traitement et disparaissait à l’arrêt de l’amfébutamone. A l’instar de la nicotine, l’amfébutamone a influencé favorablement les manifestations de sevrage mais ne les a pas complètement supprimées.

Les effets indésirables les plus fréquents de l’amfébutamone dans ces études ont été la sécheresse de la bouche, l’insomnie et les céphalées. On ne dispose pas (encore) d’études sur l’efficacité et l’innocuité de l’amfébutamone chez des personnes à risque tels des fumeurs atteints d’affections coronariennes, d’hypertension ou de bronchopneumopathie chronique obstructive, ou chez les femmes enceintes. L’amfébutamone à des doses trop élevées, mais aussi rarement à des doses thérapeutiques, peut provoquer de l’angoisse, de l’hypertension et des convulsions. Le risque de convulsions semble accru chez les personnes atteintes d’épilepsie et chez les patients atteints d’anorexie nerveuse ou de boulimie [n.d.l.r.: d’après la notice, l’amfébutamone est contre-indiqué chez ces patients].

D’après

  • R.D. Hurt et al.: A comparison of sustained release bupropion and placebo for smoking cessation. N Engl J Med 337 ,: 1195-1202(1997)
  • N.L. Benowitz:: Treating tobacco addiction - nicotine or no nicotine (editorial). N Engl J Med 337 : 1230-1231(1997)
  • D.E. Jorenby et al.: A controlled trial of sustained-release bupropion, a nicotine patch, or both for smoking cessation. N Engl J Med 340 : 685-691(1999)
  • J. R. Hughes:: Smoking cessation (to the editor). N Engl J Med 341 : 610-611(1999)
  • J. Britton et M.J. Jarvis: Bupropion: a new treatment for smokers (editorial). Brit Med J 321 : 65-66(2000)

Noms de spécialités


Amfébutamone: Zyban

  • Un article sur l’amfébutamone a également été publié dans Minerva [2 (7) : 294- 296(1999)],un supplément de Huisarts Nu ( mensuel de la Wetenschappelijke Vereniging van Vlaamse Huisartsen). La conclusion de la rédaction de Minerva est que l’amfébutamone semble être une nouveauté prometteuse dans le traitement de la dépendance tabagique chez des personnes motivées, mais que des études ultérieures sont nécessaires pour préciser l’efficacité, l’innocuité et la place de l’amfébutamone dans le traitement de la dépendance tabagique.
  • L’amfébutamone est un inhibiteur du cytochrome P450 2D6; il peut dès lors entraîner une augmentation de la concentration plasmatique de médicaments métabolisés par cette enzyme (par ex. certains antidépresseurs, des β-bloquants et des neuroleptiques; pour les substrats du CYP2D6, voir aussi Folia d’ août 1999).
  • Un médecin nous a demandé récemment dans quelle mesure il faut s’attendre avec l’amfébutamone, qui est apparenté à l’amfépramone (diéthylpropion), aux problèmes rencontrés avec les amphétamines. Certains des effets indésirables nerveux centraux rencontrés font en effet penser aux amphétamines, mais on ne parle nulle part d’un risque de mauvais usage chronique.