Informations récentes janvier 2019: tramadol + dexkétoprofène, bictégravir + emtricitabine + ténofovir alafénamide, dolutégravir + rilpivirine, aciclovir ophtalmique, codéine sirop sans sucre, daclatasvir, érythromycine granules en sachets, glycine max, antiviraux à action directe dans l’hépatite C chronique, dénosumab 18 janvier 2019
dernière mise à jour: 14 février 2023
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    • Antiviraux à action directe dans l’hépatite C chronique

▼: médicaments soumis à une surveillance particulière et pour lesquels la notification d’effets indésirables au Centre Belge de Pharmacovigilance est encouragée (entre autres médicaments contenant un nouveau principe actif, médicaments biologiques).

 Nouveautés en première ligne

Tramadol + dexkétoprofène (Skudexa®, chapitre 8.3.2)

Avis du CBIP. Une telle association fixe est à éviter. La titration du tramadol est difficile et les temps de demi-vie des deux molécules sont très différents. Si un AINS est indiqué, le dexkétoprofène n’est pas un premier choix.

Une nouvelle spécialité associant le tramadol 75 mg au dexkétoprofène 25 mg est mise sur le marché.

Indication selon le RCP. Traitement symptomatique à court terme de douleurs aiguës d'intensité modérée à sévère chez les adultes dont la douleur est considérée comme nécessitant une combinaison de tramadol et de dexkétoprofène.

Efficacité. On ne dispose d’aucune étude en médecine générale. L’association a été comparée à chacune des molécules en monothérapie dans deux études cliniques chez des patients en post-opératoire. Son efficacité était supérieure à chacun des deux composés sur certains critères de douleur mais pas sur la satisfaction globale du patient.

L’association tramadol + dexkétoprofène a été évaluée en post-opératoire chez  606 patientes après une hystérectomie par voie abdominale et chez 641 patients après la pose d’une prothèse de hanche. Le critère d’évaluation principal était la somme pondérée des différences de scores d’intensité de la douleur calculée sur 8h (SPID8), mesurée par une échelle visuelle analogique. Plus le score est élevé, plus le soulagement de la douleur est important. L’association a été plus efficace que le dexkétoprofène 25mg ou le tramadol 100mg (dose supérieure à celle contenue dans l’association): SPID8 moyenne: 242, 185 et 157 (p < 0,001). Par contre, l’association ne s’est pas avérée plus efficace sur la satisfaction globale évaluée par les patients.1

Elle a aussi été comparée à l’association fixe tramadol + paracétamol, avec une supériorité démontrée sur le soulagement des douleurs, mais une interprétation des résultats difficile vu l'absence de seuil clinique validé pour le critère d’évaluation utilisé.

Cette association a été comparée à l’association tramadol + paracétamol chez des patients après extraction dentaire (n=653), dans une étude de non-infériorité. Le critère d’évaluation principal était le soulagement de la douleur au cours des 6h suivant l’administration du médicament (TOTPAR6), évalué à l’aide de l’échelle verbale VRS (Verbal Rating Scale). La non-infériorité, puis la supériorité, de l’association tramadol + dexkétoprofène  sur l’association tramadol + paracétamol ont été démontrées: 13 vs 9 points, différence de 4 points (IC 95% 2,6 à 5,2; p < 0,0001).2

Elimination. Les deux molécules ont des temps de demi-vie d’élimination très différents: 1,65h pour le dexkétoprofène et 6h pour le tramadol (plus long chez les personnes âgées).

Sécurité. Dans les 3 études d’évaluation clinique, les effets indésirables les plus fréquents ont été des troubles gastro-intestinaux, somnolence et vertiges. Les effets indésirables, contre-indications, précautions d’emploi et interactions médicamenteuses attendus sont ceux des deux molécules (voir chapitre 9.1 AINS et 8.3 Opioïdes). Chez les personnes âgées, le risque de saignements digestifs et insuffisance rénale ou cardiaque dus au dexkétoprofène et le risque de constipation, sédation et confusion dues au tramadol sont augmentés. La prise d’opioïdes expose à un risque de dépendance. Lors de l’utilisation de cette association fixe, le patient peut ne pas être conscient de la composition du médicament et prendre de surcroit un AINS.1-5

Prix. 9,76€ pour 15 comprimés, non remboursé.

 Nouveautés en médecine spécialisée

Association fixe bictégravir + emtricitabine + ténofovir alafénamide (Biktarvy®▼ chapitre  11.4.3.6)

Avis du CBIP L’association bictégravir + emtricitabine + ténofovir alafénamide (Biktarvy®) est une option thérapeutique pour les adultes porteurs du VIH-1 n’ayant jamais reçu de traitement antirétroviral ou virologiquement contrôlés par un autre traitement antirétroviral.

Le bictégravir est un nouvel antirétroviral (inhibiteur de l’intégrase) utilisé en association fixe avec l’emtricitabine + le ténofovir alafénamide (inhibiteurs de la transcriptase inverse).

Indication selon le RCP. Cette association a pour indication le traitement des adultes infectés par le VIH-1 sans preuve actuelle ou antérieure de résistance à la classe des inhibiteurs de l’intégrase, à l‘emtricitabine ou au ténofovir.

Efficacité. Chez des patients naïfs de traitement ou virologiquement contrôlés, le Biktarvy® n’est pas inférieur à d’autres traitements antirétroviraux pour obtenir ou maintenir une charge virale inférieure à 50 copies/ml (nombre de copies d’ARN du VIH/ml de plasma).

Sécurité. Les effets indésirables les plus fréquemment rapportés sont les céphalées, diarrhées, nausées, fatigue et rêves anormaux [voir aussi emtricitabine chapitre 11.4.3.1.1 et ténofovir alafénamide chapitre 11.4.3.1.2). Les taux sériques de créatinine et de bilirubine peuvent augmenter légèrement.
Le Biktarvy® n’est pas recommandé en cas d’insuffisance rénale ou hépatique sévère.
Le bictégravir est un substrat du CYP3A4 et la prise concomitante d’inducteur puissant du CYP3A4 peut diminuer son efficacité et provoquer l’apparition de résistances. La prise concomitante de millepertuis ou de rifampicine est donc contre-indiquée. Il est aussi, comme le ténofovir, un substrat de la glycoprotéine p (P-gp).
Comme pour les autres anti-rétroviraux, la prudence est conseillée en cas de co-infection par le virus de l’hépatite B ou C, et en cas de troubles de la fonction hépatique. Pendant le traitement, il est conseillé de surveiller le poids, les paramètres lipidiques et glucidiques, et d’être attentif à l’apparition d’un éventuel syndrome de restauration immunitaire, ostéonécrose, ou néphrotoxicité.

- Le syndrome de restauration immunitaire ou de reconstitution immunitaire est un ensemble de manifestations cliniques inflammatoires survenant quelques semaines après l’instauration d’un traitement antirétroviral chez des patients infectés par le VIH et très immunodéprimés. Plusieurs présentations cliniques sont possibles : aggravation paradoxale d’une infection opportuniste en cours de traitement, infection latente démasquée par le traitement, ou survenue de maladies inflammatoires ou auto-immunes.6
- Une ostéonécrose peut également être constatée chez des patients aux stades avancés de la maladie liée au VIH et/ou ayant été exposés à un traitement antirétroviral au long cours. Les facteurs de risque supplémentaires sont notamment l’usage de corticostéroïdes et l’alcoolisme.

Il n’est pas exclu que le Biktarvy® provoque des troubles hématologiques, métaboliques ou neurologiques chez les enfants exposés in utero.
Le Biktarvy® doit être pris à distance (intervalle de quelques heures) des antiacides contenant du magnésium, de l’aluminium ou du calcium.7-9

Posologie. Un comprimé par jour.

Coût. Le prix est de 907,70€ pour un mois de traitement, remboursé en a (chap. IV, a priori).

Dolutégravir + rilpivirine (Juluca®, ▼chapitre 11.4.3.6)

Avis du CBIP. L’association dolutégravir + rilpivirine est une option thérapeutique chez des patients porteurs du VIH-1, virologiquement contrôlés, qui souhaiteraient switcher d’une trithérapie vers une bithérapie, notamment pour simplifier le traitement, améliorer la tolérance ou diminuer le coût.

Le dolutégravir (inhibiteur d’intégrase) et la rilpivirine (inhibiteur non nucléosidique de la transcriptase inverse), qui existaient déjà sous forme de spécialités mono-composées, sont maintenant commercialisés en association fixe.

Indication selon le RCP. Le Juluca® a pour indication le traitement du VIH-1, chez l’adulte virologiquement contrôlé sous traitement antirétroviral stable depuis au moins six mois, sans antécédent d’échec virologique et sans résistance connue ou suspectée aux inhibiteurs non-nucléosidiques de la transcriptase inverse ou aux inhibiteurs d’intégrase.

Efficacité. L’association dolutégravir + rilpivirine n’a pas été démontrée moins efficace qu’une trithérapie standard chez des patients sans antécédent d’échec virologique, sans résistance connue aux antirétroviraux et avec un statut virologique stable.

Sécurité. Les principaux effets indésirables sont les diarrhées et les céphalées (voir aussi dolutégravir chapitre 11.4.3.5 et rilpivirine chapitre 11.4.3.1.3).  
Les 2 molécules sont des substrats du CYP3A4 et le dolutégravir est aussi substrat de la P-gp. L’administration concomitante avec certains anti-épileptiques, la rifampicine ou le millepertuis est contre-indiquée.
La prudence est conseillée en cas d’administration concomitante d’un médicament augmentant le risque de torsade de pointes.
Comme pour les autres antirétroviraux, la prudence est conseillée en cas de co-infection par le virus de l’hépatite B ou C. Un syndrome de restauration immunitaire ou une ostéonécrose sont possibles (voir plus haut, Biktarvy®).
Le Juluca® ne doit pas être pris au même moment que des anti-H2, des antiacides, des suppléments en fer, calcium ou des multivitamines. Il est conseillé d’administrer ces médicaments 6 à 12h avant ou 4h après la prise de Juluca®. L’administration concomitante avec les IPP est contre-indiquée.
Il peut augmenter les concentrations plasmatiques de metformine, une adaptation de posologie de la metformine est généralement nécessaire à l’initiation et à l’arrêt.   
L’usage pendant la grossesse est déconseillé.10,11

Posologie. Un comprimé par jour

Coût. Le prix est de 874,29€ pour un mois de traitement, remboursé en a (chap. IV, a priori).

 Suppressions

Aciclovir pommade ophtalmique (Zovirax®, chapitre 16.1.3)

L’aciclovir sous forme de pommade ophtalmique est retiré du marché. Il reste un antiviral à usage ophtalmique disponible: le ganciclovir. Les antiviraux sous forme de pommade ophtalmique sont recommandés en cas d’accès aigu de kératite à Herpes simplex. Ils sont aussi utilisés dans le zona ophtalmique avéré, mais les preuves d’efficacité manquent. Dans le zona ophtalmique, l’administration d’antiviraux par voie orale est préférable (voir la Fiche de Transparence Zona ophtalmique).

Codéine sirop sans sucre (Toux-San Codéine®, chapitre 4.2.1)

La spécialité Toux-San Codéine sans sucre est retirée du marché. Il s’agissait du seul sirop anti-tussif à base de codéine sans sucre disponible sur le marché. Les antitussifs ne sont pas conseillés en cas de toux, en raison des doutes quant à leur efficacité et de leurs effets indésirables avérés. En particulier, la codéine est contre-indiquée jusqu’à l’âge de 12 ans, pendant la grossesse et l’allaitement. Ses effets indésirables et contre-indications sont ceux des dérivés morphiniques, et un usage abusif est possible.

Daclatasvir (Daklinza®, chapitre 11.4.5)

Le daclatasvir est retiré du marché. Il était utilisé pour le traitement de l’hépatite C chronique. Pour plus d’infos sur les traitements de l’hépatite C, voir aussi Folia de septembre 2014 et novembre 2017 + ci-dessous concernant le remboursement.

Erythromycine en sachet (Erythroforte®, chapitre 11.1.2.1)

L’érythromycine sous forme de granules en sachets est retirée du marché. La seule forme orale encore disponible est le sirop. La place de l’érythromycine est réduite depuis l’apparition des néomacrolides qui ont un spectre antibactérien similaire, une meilleure absorption par voie orale et moins d’effets indésirables gastro-intestinaux. Cependant, le CBIP rappelle que les macrolides ne sont généralement pas des antibiotiques de premier choix, vu les résistances élevées [voir chapitre 11.1.2]. L’utilisation de l’érythromycine comme gastroprocinétique est également déconseillée pour les mêmes raisons [voir Folia avril 2001].

Glycine max (Gynosoya®, chapitre 6.3.1.4)

L’extrait de glycine max est retiré du marché. Il n’existe plus de phytoestrogènes enregistrés comme médicaments. Les phytoestrogènes sont utilisés comme traitement symptomatique des plaintes péri-ménopausiques. Ils n’ont pas d’effet sur la densité osseuse. En cas de symptômes invalidants, les estrogènes, pendant une période la plus courte possible, sont le 1er choix médicamenteux. Ils doivent être associés à un progestatif si l’utérus est toujours présent [voir aussi chap. 6.3. dans le Répertoire].

Autres modifications

Dénosumab (Prolia®, chapitre 9.5.5 ): nouvelle indication

Le dénosumab (Prolia®) est un anticorps monoclonal utilisé dans le traitement de l’ostéoporose. Il est maintenant aussi indiqué dans le traitement de la perte osseuse associée à l’usage à long terme de corticostéroïdes systémiques chez des adultes à haut risque de fracture. Dans cette indication, le dénosumab augmente plus la densité minérale osseuse (DMO) que le risédronate Cependant, cette étude ne permet pas de savoir si le dénosumab est plus efficace que le risédronate pour diminuer le risque fracturaire, qui est la question clinique importante.

Le dénosumab a été comparé au risédronate chez 795 patients âgés de 20 à 94 ans (70% de femmes), prenant depuis au-moins 3 mois ou commençant à prendre ≥ 7,5 mg de prednisolone ou équivalent. Le critère d’évaluation primaire était la densité minérale osseuse (DMO). Les traitements ont été donnés pendant 2 ans et étaient associés à min. 1000 mg de calcium et min 800 UI de vitamine D par jour. Aussi bien dans le groupe continuant que dans celui débutant  les corticostéroïdes, l’augmentation de la DMO au niveau du rachis lombaire à 1 an et 2 ans était plus importante sous dénosumab que sous risédronate. Cette étude n’a pas été conçue pour évaluer la survenue de fractures.12

La balance bénéfice-risque du dénosumab dans ses différentes indications n’est pas claire. On manque d’études comparatives entre le dénosumab et les bisphosphonates sur le critère primaire de prévention des fractures. Les effets indésirables sont potentiellement graves [voir aussi le Folia de janvier 2017 et la Fiche de Transparence Ostéoporose].

Antiviraux à action directe dans l’hépatite C chronique: modification de remboursement

Les conditions de remboursement pour les antiviraux à action directe de l’hépatite C chronique sont assouplies à partir du 1er janvier 2019 [voir Bon à savoir dans ce numéro des Folia]. Ceci concerne les spécialités Harvoni®, Sovaldi®, Epclusa®, Vosevi®, Maviret® et Zepatier® (voir aussi chapitre 11.4.5).

Sources

1 Commission de la transparence, HAS, Skudexum, juin 2016.
2 Commission de la transparence, HAS, Skudexum, février 2018.
3 Skudexa, RCP
4 Dexkétoprofène + tramadol (Skudexum®) et douleurs aiguës, La Revue Prescrire, 2017 tome 37, n°409, 811-812
5 What place is there for tramadol/dexketoprofen ? DTB vol 56, N°6, June 2018
6 Immune reconstitution inflammatory syndrome: emergence of a unique syndrome during highly active antiretroviral therapy. Shelburne SA 3rd et al. Medicine (Baltimore). 2002 May;81(3):213-27.
7 Biktarvy®, RCP
8 La Lettre Médicale, volume 42 (ML 1553), n°11
9 https://www.farmacotherapeutischkompas.nl/
10 Juluca®, RCP
11 Med Lett Drugs Ther. 2018 Dec 3;60(1561):e202-204
12 Prolia®, RCP