Pour le moment, on ne dispose pas des données nécessaires pour une bonne estimation du profil d'efficacité et d’innocuité du molnupiravir et du PF-07321332+ritonavir. Les communications (de presse) préliminaires devront être ajustées en fonction des résultats finaux et des publications.
Les médias ont beaucoup parlé des antiviraux oraux contre la COVID-19, le molnupiravir et l’association PF-07321332 + ritonavir. Que savons-nous à leur sujet pour le moment ?
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Pour chacun de ces deux antiviraux, l'Agence européenne des médicaments (EMA) fait référence à une étude randomisée, contrôlée par placebo, menée chez des patients non hospitalisés présentant une forme légère à modérément sévère de COVID-19 et à risque de développer une forme sévère, dont les résultats intermédiaires montrent un effet positif sur le risque d’hospitalisation ou de décès. Les résultats de ces études ne sont pas disponibles en détail et n'ont pas été examinés par des pairs, ni été publiés.
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Molnipiravir (Lagevrio®)
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Le métabolite actif du molnupiravir, le N-hydroxy-cytidine triphosphate, est incorporé dans l'ARN viral et bloque ainsi la réplication virale.
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L’étude ayant évalué le molnupiravir est l’étude MOVe-OUT (étude de phase II/III). Le communiqué de presse initial de la firme, qui faisait état d'une réduction de 50% du risque « d'hospitalisation ou de décès » par rapport au placebo, a depuis été révisé. Le dernier communiqué de presse de la firme (26/11/2021) parle d'une réduction de 30% du risque : la réduction du risque n’est donc pas aussi grande que ce qui avait été annoncé initialement. Il convient également de mentionner qu'une étude avec le molnupiravir chez des patients hospitalisés (étude MOVe-IN) a été arrêtée prématurément au printemps 2021 parce qu’un bénéfice clinique dans cette population de patients était considéré comme peu probable (communiqué de presse 15/04/21).
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Le molnupiravir n'est actuellement pas autorisé au sein de l'Union européenne. Une demande d’autorisation est en cours d’évaluation auprès de l'Agence européenne des médicaments (EMA), pour une utilisation chez les patients non hospitalisés présentant une forme légère à modérément sévère de COVID-19 et à risque de développer une forme grave (situation au 06/12/21). L'EMA a publié un avis le 19/11/21 pour assister les États membres qui décideraient d'utiliser le molnupiravir avant l'octroi d’une autorisation. L'EMA a publié une sorte de RCP « provisoire », même si les données d'étude devront par la suite être nuancées, voire ajustées, en fonction des données finales (voir ci-dessus, concernant le dernier communiqué de presse de la firme).
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PF-07321332 + ritonavir (Paxlovid®)
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Le PF-07321332 est un inhibiteur de protéase du SARS-CoV-2 et bloque ainsi la réplication virale. Le ritonavir (également un inhibiteur de protéase, mais non actif contre le SARS-CoV-2) y est associé, à faible dose, pour ralentir le métabolisme du PF-07321332.
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Cette association n'est actuellement pas autorisée au sein de l'Union européenne et aucune demande d'autorisation n’est en cours d’évaluation (situation au 06/12/21). L'EMA a annoncé le 19/11 qu'elle préparait un avis pour assister les États membres qui décideraient d'utiliser cette association avant l’octroi d’une autorisation.
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L’étude ayant évalué le PF-07321332 + ritonavir est l'étude EPIC-HR : seul un communiqué de presse de la firme est disponible (05/11/21).
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Commentaire du CBIP
Les antiviraux oraux présentent l'avantage, par rapport aux anticorps monoclonaux administrés par voie intraveineuse, de pouvoir être utilisés plus largement en contexte ambulatoire. Cependant, on ne dispose pas encore des données nécessaires pour évaluer correctement l'efficacité et l’innocuité du molnupiravir et de l'association PF-07321332+ritonavir. Les auteurs de l'éditorial du BMJ Safety and efficacy of antivirals against SARS-CoV-2. We need evidence not optimism (28/10/21)1 soutiennent que les médicaments antiviraux contre la COVID-19 devraient être autorisés et utilisés sur la base de preuves, et non d'optimisme. Les auteurs soulignent également que le prix de ces médicaments n'a pas été rendu public. Ils rappellent également les expériences passées avec le VIH, où l'utilisation d'antiviraux en monothérapie avait entraîné le développement de résistances. Le rédacteur en chef du BMJ note également, dans un éditorial intitulé Covid 19: Why we need a global pandemic treaty (02/12/21), que l’on assiste aujourd’hui à une fixation inquiétante et coûteuse sur les médicaments antiviraux, dont l'efficacité n’est pas suffisamment prouvée à l’heure actuelle.
Le CBIP souligne que la recherche urgente de médicaments contre la COVID-19 ne doit pas nous faire oublier les principes de la pharmacothérapie rationnelle (voir également la déclaration de l'International Society of Drug Bulletins, organisation à laquelle le CBIP est également affilié : COVID-19 and the quest for drugs and vaccines: Statement from the International Society of Drug Bulletins (04/04/2020).
Sources spécifiques
2. Godlee F (editor in chief). Covid 19: Why we need a global pandemic treaty. Editor’s Choice. BMJ 2021;375:n2963. Doi: https://doi.org/10.1136/bmj.n2963 (02/12/21)