Voyages et médicaments
Comme chaque année, les Folia de mai s’intéressent aux voyages et aux médicaments. Les thèmes suivants, déjà discutés précédemment et dont les informations sont toujours d’actualité, sont disponibles sur notre site Web: diarrhée du voyageur [Folia de mai 2015], protection solaire [Folia de mai 2010]. Cette année nous proposons quelques messages courts, entre autres concernant la prophylaxie de la malaria et la grossesse, et sur le zika.
- L’Institut de Médecine Tropicale (IMT) offre d’excellentes informations actualisées sur la médecine des voyages (www.itg.be > Médecine des voyages), avec également des informations adressées spécifiquement aux professionnels de la santé (choisissez “Information pour experts”). Des présentations powerpoint avec des informations pour le médecin généraliste sont disponibles sur le site Web néerlandophone de l’ITG (formation LOK, avec le soutien du Vlaams Agentschap Zorg en Gezondheid): voir Reisgeneeskunde > Informatie voor deskundigen > Reizigersgeneeskunde voor de huisarts.
- Les Folia de mai 2015 se sont penchés sur le bon usage des répulsifs. Le répulsif IR3535 à une concentration de 20 % n’était pas recommandé en prévention de la malaria, et il avait été mentionné que l’efficacité des préparations plus concentrées était incertaine. Cependant, certaines sources indiquent que l’IR3535 à une concentration de 30 à 35 % est suffisamment efficace en prévention de la malaria, et que, pour les enfants < 2 ans, une concentration de 20% peut quand même offrir une protection suffisante pendant la courte période où aucune autre mesure préventive (entre autres les moustiquaires) n’est utilisée.1
- Les questions à propos de la prophylaxie de la malaria chez les femmes qui envisagent une grossesse ou les femmes enceintes sont fréquentes. Il est en général déconseillé aux femmes enceintes d’entreprendre des voyages vers des régions où la malaria est endémique et où le risque de transmission est élevé, certainement lorsqu’une malaria résistante y règne (Zone C sur la carte de la malaria de l’OMS2). Si un voyage a tout de même lieu, une prévention maximale est recommandée, d’une part au moyen de mesures insectifuges (entre autres moustiquaires et répulsifs), et d’autre part au moyen d’une prophylaxie médicamenteuse. Le répulsif DEET 20 à 30 % est à préférer chez la femme enceinte, moyennant certaines précautions (entre autres de préférence une seule application par jour); d’autres options médicamenteuse sont le répulsif IR3535 30 à 35 % et l’icaridine, mais ceux-ci ont été beaucoup moins étudiés chez la femme enceinte3 [voir aussi Folia de mai 2015]. Le choix de la prophylaxie médicamenteuse dépend évidemment du risque de contamination (entre autres en fonction du pays visité et du type de voyage), de la résistance du parasite et de contre-indications éventuelles; en ce qui concerne plus particulièrement la grossesse, il y a lieu de tenir compte des mesures suivantes4.
Les femmes qui sont enceintes et voyagent vers une région endémique
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Chloroquine et méfloquine: elles peuvent être utilisées quel que soit le stade de la grossesse. Aucun effet tératogène ou embryotoxique n’a été mis en évidence.
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Association atovaquone + proguanil: les données disponibles n’indiquent pas de risque accru pour l’enfant à naître mais les données sont limitées, certainement pour l’atovaquone. Pour raison impérieuse et s’il n’existe pas d’alternative, cette association peut être utilisée, quel que soit le stade de la grossesse.
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Doxycycline: son utilisation pendant le 1er trimestre de la grossesse est acceptable pour des raisons impérieuses et si aucune alternative n’est disponible (aucun indice d’un effet nocif); son utilisation pendant les 2ème et 3ème trimestres est, en fonction de la source, déconseillée ou contre-indiquée, et ce, en raison des effets nocifs sur le développement ultérieur des os et des dents chez le fœtus.
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Les femmes qui tombent enceintes pendant un traitement préventif antimalarique. Aucun des médicaments antimalariques à titre préventif (chloroquine, méfloquine, atovaquone + proguanil, doxycycline) ne justifie d’envisager une interruption de grossesse.
La malaria pendant la grossesse nécessite une approche spécifique et hautement spécialisée, de préférence dans un hôpital de référence.
- Une grande attention est portée sur le zika, une infection causée par le virus zika. Le virus zika est transmis principalement par la morsure d’un moustique Aedes infecté, mais il peut également être transmis de la mère à l’enfant à naître; quelques cas de transmission sexuelle ont également été décrits. On attire surtout une attention particulière sur le lien entre le zika pendant la grossesse et les malformations chez le fœtus. On admet de plus en plus que l’exposition du fœtus au virus Zika peut mener à une microcéphalie et d’autres anomalies telles qu’un retard de croissance, des anomalies oculaires ou une fausse couche. Actuellement (situation au 01/04/16), plusieurs instances (entre autres IMT, OMS, CDC américain) déconseillent aux femmes enceintes et à celles qui pourraient le devenir pendant ou juste après un voyage de se rendre dans des régions où règne l’épidémie de Zika (Amérique du sud ou Amérique centrale, Caraïbes et quelques îles de l’Océan Pacifique)5. Outre le problème de grossesse, des cas de syndrome de Guillain-Barré ont été décrits chez des personnes infectées par le virus Zika. Il n’existe pas de traitement spécifique, ni de vaccination contre le virus Zika. Les seules mesures préventives consistent en des mesures insectifuges pendant la journée (les moustiques Aedes piquent pendant la journée): le port de manches longues et de pantalons, et l’usage de répulsifs [voir Folia de mai 2015].
- En 2014, les recommandations à propos de la vaccination contre la poliomyélite ont été renforcées [voir aussi Folia de mai 2014]. Sur le site Web de IMT, il est mentionné ce qui suit à propos des voyageurs qui résident pendant plus de 4 semaines dans un pays où circule le poliovirus: une vaccination de rappel avec une dose du vaccin contre la poliomyélite, même si une vaccination de rappel a déjà eu lieu auparavant,
• est obligatoire pour l’Afghanistan et le Pakistan (certificat de vaccination officiel);
• est fortement conseillée pour les six pays suivants: Ukraine, Madagascar, Nigeria, Guinée, Myanmar et Laos.
Cette vaccination de rappel doit être effectuée entre 4 semaines et 12 mois avant de quitter ces pays6.
- Les Folia de mai 2015 ont accordé une attention particulière à la maladie de Lyme. Les résultats d’une étude randomisée, en double aveugle et contrôlée par placebo, menée aux Pays-Bas, concernant l’utilité d’une antibiothérapie prolongée chez des patients présentant des symptômes persistants liés à la maladie de Lyme (pendant plus de 2 ans en moyenne), sont parus récemment dans le NEJM.7 Les résultats ne montrent aucun avantage de l’antibiothérapie prolongée. Ceci confirme le message de l’article dans les Folia: il n’existe aucune preuve de l’utilité d’une antibiothérapie prolongée chez ces patients.
1 www.itg.be/itg/Uploads/MedServ/FMALTXT.pdf; wwwnc.cdc.gov/travel/yellowbook/2016/the-pre-travel-consultation/protection-against-mosquitoes-ticks-other-arthropods
2 www.itg.be/itg/Uploads/MedServ/Malaria-World-2015.pdf
3 www.itg.be/itg/Uploads/MedServ/FMALTXT.pdf
4 www.itg.be/ITG/Uploads/MedServ/fgrossesse.pdf; Drugs in pregnancy and lactation (G. Briggs et R. Freeman; 10ième édition; version en ligne); http://lecrat.fr; Lareb: geneesmiddelen bij zwangerschap (www.lareb.nl/Teratologie > Ik ben zorgverlener > Geneesmiddelen bij zwangerschap)
5 www.itg.be > médecine des voyages > nouvelles; www.who.int/mediacentre/factsheets/zika/en/ et www.who.int/ith/fr/; www.cdc.gov/zika/index.html; New Engl J Med, publication en ligne du 13/04/16 (doi: 10.1056/NEJMsr1604338)
6 Pour plus de détails, voir www.itg.be > Médecine des voyages > Nouvelles (communiqué du 14/04/16)
7 N Engl J Med 2016;374:1209-20 (doi: 10.1056/NEJMoa1505425), avec éditorial 1277-8 (doi: 10.1056/NEJMe1502350)