Place des médicaments dans la prévention de la mort subite par arythmie cardiaque


Abstract

Les arythmies ventriculaires provoquées par un accident coronarien aigu constituent la principale cause de mort subite. Chez les personnes n’ayant jamais présenté d’arythmies mettant la vie en danger, mais ayant fait un infarctus du myocarde, seuls les β-bloquants ont montré un effet favorable sur le risque de mort subite, même chez les patients avec une très faible fraction d’éjection. Les antiarythmiques ne sont pas indiqués: une augmentation de la mortalité a même été observée avec certains médicaments chez des patients qui ont fait un infarctus du myocarde. Chez les personnes ayant déjà présenté des arythmies mettant la vie en danger, il n’est pas prouvé que des médicaments, y compris des β-bloquants, diminuent le risque de mort subite.

Dans le Harrison’s Principles of Internal Medicine [15ème édition, 2001] la mort subite ("sudden cardiac death&quot) est définie comme une mort naturelle d’origine cardiaque, précédée d’une perte de connaissance subite dans l’heure qui suit l’apparition de symptômes aigus, chez une personne pouvant avoir des antécédents d’affections cardiaques, mais chez qui le moment et les circonstances du décès sont inattendus. On estime qu’environ 50 % des décès cardiaques sont dus à la mort subite. Dans la plupart des cas, elle survient suite à des arythmies ventriculaires, provoquées par un accident coronarien aigu.

Est-il prouvé que les médicaments diminuent le risque de mort subite par arythmies cardiaques ? Une distinction doit être faite entre les personnes qui n’ont pas encore fait d’arythmies mettant la vie en danger (par ex. tachycardie ventriculaire persistante) ou d’arrêt cardiaque, et celles qui en ont déjà faits.


Prévention chez des patients n’ayant pas encore fait d’arythmies mettant la vie en danger

  • Pour plusieurs β-bloquants (p.ex. timolol, métoprolol), un effet favorable sur la mortalité a été démontré chez des patients ayant fait un infarctus du myocarde [voir aussi Folia de mai 1997]. Dans la plupart de ces études, une diminution du risque de mort subite a également été constatée, même chez les patients avec une fraction d’éjection très faible.
  • Les résultats d’études sur l’effet d’ antiarythmiques sur le risque de mort subite ne sont pas encourageants.
    • Avec l’encaïnide et la flécaïnide, deux antiarythmiques de classe IC, et avec le sotalol, une mortalité cardiaque plus élevée (due notamment à des arythmies ou à des infarctus du myocarde) a été constatée dans les études effectuées chez des patients ayant fait un infarctus du myocarde.
    • Dans deux grandes études - également effectuées chez des patients ayant fait un infarctus du myocarde - l’amiodarone n’a pas eu d’effet sur la mortalité, bien qu’un effet antiarythmique ait été démontré. Des analyses ultérieures de ces deux études ont suggéré un effet favorable sur la mortalité lorsqu’un β-bloquant était associé à l’amiodarone, mais des études complémentaires sont nécessaires.
    • Dans deux études randomisées dans lesquelles des antiarythmiques (antiarythmiques de classe I, amiodarone, sotalol) ont été comparés à l’implantation d’un défibrillateur cardiaque chez des patients avec une fraction d’éjection diminuée, et une tachycardie ventriculaire non persistante ou une tachycardie ventriculaire persistante induite par une stimulation électrique programmée, la mortalité était moins élevée dans le groupe avec défibrillateur cardiaque que dans le groupe traité par des antiarythmiques.

Il est actuellement difficile d’évaluer le rôle de médicaments utilisés dans la prévention d’événements ischémiques aigus, tels l’acide acétylsalicylique, les inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine et les statines, dans la prévention de la mort subite par arythmies cardiaques.


Prévention chez des patients ayant déjà fait des arythmies mettant la vie en danger

On ne dispose d’aucune preuve que des médicaments, y compris les β-bloquants et l’amiodarone, aient un effet favorable sur le risque de récidives d’arythmies pouvant mettre la vie en danger. Dans des études randomisées comparant les antiarythmiques (surtout l’amiodarone et le métoprolol) et l’implantation d’un défibrillateur cardiaque chez des patients ayant déjà fait des arythmies mettant la vie en danger et dont la fonction ventriculaire gauche est diminuée, la mortalité était plus faible dans le groupe avec défibrillateur cardiaque que dans le groupe sous antiarythmiques.

D’après

  • H. V. Huikuri et al.: Sudden death due to cardiac arrhythmias. N Engl J Med 345 : 1473-1482(2001)